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Agro-écologie

Agroforesterie : miser sur la synergie des cultures pour produire plus et mieux

Lors d'une journée d'information consacrée à l'agro-écologie, la chambre d'agriculture de l'Isère a proposé un atelier sur l'agroforesterie. Une pratique agricole qui consiste à tirer profit de la complémentarité des besoins des arbres et des cultures.
Agroforesterie : miser sur la synergie des cultures pour produire plus et mieux

« Pour vous, c'est quoi l'agroforesterie ? » Olivier Perin, responsable de la mission forêt à la chambre d'agriculture de l'Isère, inaugure son atelier par une question. L'auditoire hésite. Un jeune homme se risque : « C'est un mélange de culture et de plantation sur une parcelle... » Un autre : « Ça permet de valoriser une parcelle en mettant du bois d'œuvre... ». Effectivement : l'agroforesterie regroupe toutes les pratiques agricoles qui intègrent l'arbre dans un environnement de production et s'inspirent du fonctionnement de la forêt pour valoriser les ressources d'un milieu et améliorer les capacités de production. Voilà pour la théorie.

Complémentarités

Dans les faits, il n'existe pas une, mais des agroforesteries. Bocage, pré-verger, cultures intercalaires en vergers fruitiers, sylvo-pastoralisme, les systèmes agroforestiers sont des pratiques ancestrales. Si on redécouvre leurs vertus aujourd'hui, c'est que les chercheurs ont établi scientifiquement ce que les anciens avaient appris empiriquement : en les associant et en les gérant de manière appropriée, l'arbre et la plante développent des synergies dans le partage des ressources en lumière, en eau et en nutriment du sol qui permettent de « produire plus et mieux en travaillant les complémentarités ». Des études de l'Inra ont en effet prouvé que l'on augmentait les rendements en associant arbres et cultures, plutôt qu'en les séparant. Dans l'Hérault, une expérimentation conduite sur un système blé-noyer a ainsi montré qu'une parcelle agroforestière de 100 hectares pouvait produire autant de biomasse (bois et cultures) qu'une parcelle de 136 hectares où les deux cultures auraient été séparées. Soit un gain net de 36%.

Changer de raisonnement

« C'est un changement de raisonnement par rapport à la parcelle », précise, d'entrée de jeu, Olivier Perin. Certes l'agroforesterie implique deux gestions différenciées (culture/élevage et partie ligneuse), mais comme l'une profite à l'autre, l'exploitant s'y retrouve largement, tant en termes agronomiques qu'économiques. Les arbres ont plusieurs atouts. Ils fournissent un habitat qui abrite une faune et une flore diversifiées, favorables aux pollinisateurs et aux auxiliaires, mais aussi de l'ombre qui protège les cultures – ou les animaux – des excès climatiques (chaud, froid, vent, inondation, sécheresse...). Leur filet racinaire, dense et profond, joue un rôle particulièrement important : « Ce qui n'est pas utilisé par les plantes est récupéré par les arbres qui agissent comme autant de pompes en allant chercher les éléments minéraux à la surface, tout en maintenant une hygrométrie satisfaisante », explique Olivier Perin. Ce mécanisme a pour effet d'augmenter la réserve utile en eau et de limiter l'infiltration des nitrates dans les nappes ou les cours d'eau. En outre, la biomasse des arbres, riche en lignite, contribue à former un humus stable et fertile, qui influe sur la consommation d'intrants. Cerise sur le gâteau : les arbres constituent, à plus ou moins long terme, une source de revenu complémentaire (production fruitière, bois d'œuvre de qualité...).
Adaptable à l'existant, l'agroforesterie a partout sa place : en grande culture, maraîchage, viticulture, élevage... Encore faut-il trouver le bon équilibre, les associations les plus pertinentes et la bonne densité d'arbres : « Il n'y a pas de règle : tout dépend du terrain, des cultures, du système d'exploitation et des objectifs poursuivis », insiste le technicien de la chambre d'agriculture. Pas de règle, mais une règle d'or : « Un projet agroforestier n'est viable que s'il s'adapte à ce qu'il y a sur l'exploitation. »

Marianne Boilève

 

L'agroforesterie, combien ça coûte ?

Le prix de revient d'un jeune arbre agroforestier oscille entre 15 euros et 20 euros (conseil et suivi, fournitures de plantation). Les prix augmentent pour des essences fruitières. Côté investissement en temps, c'est la plantation qui demande le plus de temps. Pour 50 arbres à l'hectare, il faut compter une demi journée pour la préparation et  une journée à 3 ou 4 personnes pour la plantation (avec paillage, protections etc.) La taille des arbres demandera quelques heures par an les premières années puis une demi-journée par an et par hectare pour des élagages d'arbres déjà formés.
Aides financières
En tant que parcelles agricoles, les parcelles agroforestières sont éligibles aux aides du premier et du second pilier de la PAC. Avec la nouvelle réforme (2014-2020), l'agroforesterie satisfait la conditionnalité et permet de respecter les critères du verdissement (% de maintien des Surfacs d'intérêt écologique). Il n’y a aucun risque de perdre les aides, si les densités réglementaires sont respectées. Attention toutefois au cumul des aides couplées pour les fruitiers notamment, telles que les primes pour fruits à coques : dans le cadre d’une association à une culture, il faudra choisir une des deux primes seulement.
Au sein du second pilier, il existe des mesures de soutien relatives à l’agroforesterie. C’est aux régions et départements qu’il revient d’activer et de définir leurs modalités (ancienne mesure dite « 222 » d’aide à la plantation).
Source : AFAF