« C'est le milieu ordinaire qui vient à nous »

Voici 30 ans que les Ateliers du Plantau, à Chatte, accueillent des personnes en situation de handicap intellectuel. La production horticole représente l'activité historique de cet Etablissement et service d'aide par le travail (Esat) géré par l'Aseai*. Un atelier de sous-traitance industrielle s'est développé en complément, de façon à donner du travail à l'année à la quarantaine d'usagers des Ateliers. « Puis nous avons repris une activité d'entretien des espaces verts et créé un petit atelier de construction bois où nous réalisons essentiellement des composteurs pour le compte d'une association », décrit Jean-François Lebecque, directeur adjoint en charge de l'Esat. Les personnes employées dans cet établissement médico-social sont âgées de 18 à 62 ans et orientées à l'issue d'un parcours en IME ou bien parce qu'elles ont connu diverses infortunes dans le milieu ordinaire du travail et préfèrent le cadre rassurant du milieu protégé. « Toutes les personnes sont volontaires pour travailler à l'Esat. Elles sont attirées par le travail sur la plante, par la dimension création et le fait de faire vivre quelque chose de vivant ».
Plants de légumes
Jean-François Lebecque le rappelle : à l'Esat, le travail est au service de l'éducatif, à condition de respecter un certain équilibre économique. Si l'entretien des espaces verts, est l'activité la plus rentable, c'est aussi celle qui peut manquer de bras. Car les conditions de travail sont parfois rudes. La production horticole dégage le plus gros chiffre d'affaires mais réclame les investissements les plus lourds. La clientèle est constituée de particuliers, d'entreprises, de collectivités locales. « L'activité horticole a été longtemps tournée vers le commerce de gros, mais la politique des jardineries a changé. Nous avons perdu des marchés et dû nous diversifier. Nous nous sommes lancés dans le plant de légumes à la faveur du renouveau du jardinage chez les particuliers. Par ailleurs, nous sommes de plus en plus sollicités pour faire des plantations. Ce côté paysagiste est plaisant pour les usagers. »
Pour le directeur, il importe de démystifier l'image du travailleur handicapé. « A une époque, les usagers ne tenaient pas à ce que cela se sache qu'ils travaillaient dans un Esat. Aujourd'hui, ils sont fiers de leur établissement ». Certes l'objectif de l'Esat est de permettre, aux personnes qui le désirent, de réintéger le milieu ordinaire du travail. « Mais il n'est pas question de les mettre en difficulté, » insiste le directeur. Ainsi l'établissement favorise la mise à disposition de personnel, les stages en extérieur ou bien la Reconnaissance des savoir-faire professionnels (RSFP). « Mais il ne faut pas oublier que la capacité de travail d'une personne en Esat équivaut à 30% de celle d'un salarié ordinaire. Les entreprises qui jouent le jeu le savent. Leur intérêt réside dans la baisse de leur contribution Agefiph ».
Espace agri-rural
Dans cette logique d'insertion, les Ateliers du Plantau sont un des partenaires, avec les collectivité et les organismes consulaire, de l'Espace Agri-rural qui sortira bientôt de terre, à Chatte, sur le terrain de l'Esat. « Cette fois-ci, c'est le milieu ordinaire du travail qui vient à nous ! », lance le directeur qui s'est porté volontaire pour gérer cet espace, à partir du mois de septembre, via l'association de préfiguration Créactif. Cette pépinière d'un nouveau genre pourra accueillir huit places pour des porteurs de projets en lien avec la terre et l'élevage, et quatre places pour de l'artisanat rural. Un sabotier et un maréchal-ferrant seraient même annoncés. Pour le directeur, les attentes sont fortes en termes d'échanges entre les usagers de l'Esat et les créateurs ou testeurs d'acitvités.
Isabelle Doucet
*Aseai : Association au Service de l'Enfance et des Adultes en situation de handicap de l'Isère