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Dephy Expe

« Dès que l’on est en réaction, on est déjà en retard »

À l’issue de la journée de restitution des résultats du Dephy Expe 2, la parole a été donnée à Christian Huyghe et Anne-Claire Vial, deux experts de l’agriculture. L’occasion pour eux d’évoquer les nouveaux enjeux agricoles.

« Dès que l’on est en réaction, on est déjà en retard »
Christian Huyghe, chargé de mission auprès de la direction scientifique agriculture de l’Inrae et Anne-Claire Vial, présidente de l’Acta.

« Ces expérimentations, effectuées dans une grande diversité de filières, ont permis de mettre en avant six méthodes transversales : le biocontrôle, la lutte physique, les pratiques culturales, la gestion de la diversité intra parcellaire, la gestion des paysages et la sélection variétale. C’est donc une autre manière de faire de l’agriculture par rapport à celle que nous avons connue il y a 40 ans… Il est donc important d’associer les agriculteurs à la construction des projets », a indiqué Anne-Claire Vial, présidente de L’Association de coordination technique agricole (Acta) et agricultrice dans la Drôme. « Nous sommes à la fin d’un cycle très long dans lequel les systèmes agricoles ont été instables dans leur conception et leur évolution, avec deux ressources totalement disponibles : une énergie peu coûteuse et des phytosanitaires disponibles en quantité importante », a poursuivi Christian Huyghe, chargé de mission auprès de la direction scientifique agriculture de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae).

La protection des cultures – dans un contexte de réduction de l’usage des pesticides – entraîne un certain nombre d’enjeux et de solutions à trouver. « Nous arrivons assez difficilement à documenter la réalité du terrain quant à l’état de la pression sur une culture, en fonction des années », déplore Christian Huyghe. « Il nous faut aussi explorer l’effet du changement climatique qui sera très difficile à traverser, se prémunir et organiser nos systèmes pour qu’ils soient résilients face aux grandes variations interannuelles. Cela nous invite à changer notre façon d’effectuer la recherche et le développement, en transférant plus vite les méthodologies. Il nous faut plus de courage à anticiper. Dès que l’on est en réaction, on est déjà en retard… », estime Christian Huyghe.

« Anticiper les retraits de molécules »

Anticiper, c’est ce que cherche à faire la profession agricole autour de la question du retrait éventuel de molécules. En effet, une étude a permis d’identifier 75 substances actives dont le retrait – possible à moyen terme — conduirait à des impasses techniques. « Il nous faut gérer la disparition des matières actives », a averti Anne-Claire Vial. Dans ce contexte, le plan d’action stratégique pour l’anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures, plus connu sous l’intitulé « Parsada », viendra apporter des solutions face aux risques d’impasses techniques dans les différentes filières agricoles.
Dans ce programme, chaque filière dispose d’un plan d’actions visant à anticiper un éventuel retrait de molécules, pouvant mettre à mal les systèmes de productions : gestion des adventices en plantes à parfum, aromatiques, médicinales et condimentaires, lutte contre les ravageurs coléoptères en semences et plants, gestion des maladies fongiques en agriculture biologique, etc.
Au total, 146 millions d’euros seront consacrés au programme « Parsada » par le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.

Amandine Priolet