Du vert à perte de vue

En cette dernière année de formation de terminales Bac Pro CGEA (Conduite et gestion de l'entreprise agricole et agroéquipement), les 29 élèves de la MFR de Mozas, accompagnés de trois moniteurs, ont réalisé un voyage d'étude en Irlande, du 13 au 20 octobre.
62 hectares d'herbe
Les visites techniques ont aussi été nombreuses et diversifiées : ainsi, les voyageurs ont rencontré Sean Mannion, éleveur de 100 moutons, 40 vaches allaitantes sur 62 ha... d'herbe ! Il leur a expliqué l'exploitation des tourbières, dont la matière première est récoltée dans un cadre réglementaire très strict à des fins de chauffage. Puis, les étudiants ont poursuivi avec la rencontre de Jimmy Canavan, éleveur de poney Connemara exportant ses chevaux dans l'Europe entière, et celle de Noël Kissane pour une démonstration de chiens de berger dans un élevage de moutons.
Une entreprise a marqué les élèves : l'exploitation de vaches laitières de Tim O'Leary, 56 ans, sa femme Katherine et son fils Colm, 23 ans à Blarney, près de Cork, dans le sud de l'Irlande. Cette quatrième génération de l'entreprise familiale travaille avec un troupeau de 98 vaches laitières et 75 génisses prim'holstein, jersiaises et croisées, dont la moyenne de production est de 4 500 litres, un taux de matière grasse de 40,4 g/l et un taux protéique de 34,5 g/l. L'ensemble du troupeau valorise un foncier orienté vers 90 ha d'herbe et 8 ha de forêts, dont 34 en propriété, 64 en location au prix de 400 €/ha. La problématique du foncier est très préoccupante pour les éleveurs en général car il faut compter 40 000 € pour acquérir un hectare !
Les vaches sont mises en pâture dès le printemps (mois de février/mars généralement) et ce jusqu'en automne (vers la mi-novembre). Pendant l'hiver, elles sont nourries à base d'ensilage d'herbe et d'aliments. Doté d'un climat pluvieux peu froid, l'herbe pousse de février à novembre : l'objectif des exploitants est donc de valoriser l'herbe au maximum car cela représente un aliment peu coûteux et, bien que la production laitière soit faible, elle reste extrêmement rentable et leur permet de dégager des bénéfices.
Les exploitants sont autonomes quant à la gestion du poste reproduction car ils inséminent eux-même leurs femelles reproductrices. Toutes les vaches vêlent au printemps, ce qui aménage une période sans traite en hiver et donc un peu de repos pour les éleveurs...
La traite est réalisée en salle de traite 24 places en simple équipement (12 postes), deux fois par jour. Le lait est collecté tous les deux jours par la coopérative Dairy Gold Co-op (960 millions de litres et 3 000 producteurs adhérents). Le prix de base moyen payé en 2013 était de 0,38 €/L, alors qu'aujourd'hui il avoisine les 0,32 €/L pour une référence de 36 g/l en TB et 33 g/l en TP.
Les revenus de cette entreprise proviennent majoritairement de la vente du lait et des animaux de réforme, sans oublier les aides européennes. La comptabilité est réalisée par l'Ifac (Irish farm Accounts Coopérative : coopérative comptable des fermes irlandaises) et au même titre que les exploitations françaises, des impôts sont prélevés sur le revenu ainsi que des cotisations sociales.
Tim O'Leary a fait le choix de s'investir dans la profession en tant que président adjoint du IFA (Irish farmer Association : association des agriculteurs irlandais) et membre du comité de la coopérative laitière Dairy Gold. Cet investissement prend du temps, mais reste, à son sens, nécessaire afin de faire remonter les problématiques de terrain et travailler avec les forces politiques dans le but de construire ensemble le monde agricole de demain. Et concernant demain, la réforme des quotas laitiers va décupler le potentiel de production laitière de ce pays avec un élevage basé sur un système herbe peu cher et des contraintes d'hivernage bien moindres qu'en France.
Cette visite s'est clôturée par un café très apprécié accompagné de scones, pâtisseries typiquement anglo-saxonnes, témoignage de la grande convivialité des Irlandais, et ce malgré la difficulté pour les jeunes de la MFR à maîtriser un tant soit peu la langue de Shakespeare.