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Fromage

Fermier et IGP : la combinaison gagnante

A Quincieu, la fromagerie Rochas transforme l'ensemble de sa production laitière en saint-marcellin depuis les années 70. La récente labellisation IGP ne vient que confirmer les pratiques de l'exploitation.
Fermier et IGP : la combinaison gagnante

Cela fait moins de dix jours que les premiers fromages, avec leurs nouvelles étiquettes porteuses du label Indication géographique protégée (IGP), ont été mis en marché. « Alors pour le moment, nous n'avons pas encore eu de retombées », reconnaît Jean-Noël Rochas, qui dirige la fromagerie familiale Rochas à Quincieu. Il est l'un des quatre producteurs fermiers à avoir intégré l'IGP survenue fin novembre 2013. « Le label arrive un peu tard. Depuis 15 ans, beaucoup de fromagers et de petits producteurs ont disparu », regrette-t-il cependant.

La bonne épaisseur

Lovée dans la combe de Quincieu, l'exploitation de 30 hectares dont trois de noyers et le reste en prairies naturelles, compte 48 vaches laitières de race montbéliarde. Des bovins avec de beaux jarrets puisqu'ils paissent régulièrement du côté du col Lachard, nom commercial porté par la production fromagère. Le quota laitier de 300 000 litres est entièrement transformé en saint-marcellin (60%, soit une production annuelle de 22 000 petits fromages), saint-félicien (7 000 par an) et fromages blancs. « Le passage à l'IGP n'a pas présenté de difficulté particulière car, en ce qui concerne l'élevage, nous sommes déjà à 100% en foin et nous avons toujours fait pâturer les bêtes. Ce qui change, c'est qu'avant nous achetions trois camions de luzerne dans les Hautes-Alpes et qu'aujourd'hui, nous ne pourrons en faire venir plus qu'un, car 80% de la matière sèche doit provenir de la zone IGP », poursuit Jean-Noël Rochas.

Jean-Noël Rochas transforme en fromages saint-marcellin et saint-félicien les 300 000 litres de lait de son exploitation.

Les seules modifications portent sur la transformation : « Nos fromages étaient trop épais. Le cahier des charges prévoit une hauteur comprise entre 20 et 25 mm alors que les nôtres en font 28 minimum. Nous avons donc dû les réduire et l'expliquer à la clientèle. Les fromages ont ainsi perdu 7 à 8% de leur masse. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de na pas augmenter les prix, ni en 2013, ni en 2014 ». Depuis le mois de juillet 2013 où l'IGP était imminente, la fromagerie Rochas se demandait si ses saint-marcellin, qu'elle vend à des grossistes, des magasins de détail et sur les marchés, auraient la bonne épaisseur. Ne pas satisfaire aux critères, c'était perdre l'appellation saint-marcellin... Le fabricant a donc adapté ses moules. « En pleine période de fêtes, l'activité était un peu chargée, concède-t-il. Il a également fallu faire attention aux doses de sel, car le fromage était moins volumineux, et aux temps de séchage et d'égouttage ». En revanche, produire davantage de fromages n'est pas un problème pour cette entreprise familiale où sont employés épouse, sœur et fils, ainsi qu'une salariée. Seul obstacle à son développement : des installations, entièrement rénovées et agrandies en 2000, mais déjà entièrement optimisées. La stabulation de 800 m2 en logettes paillées est pleine et la salle de traite ne compte que six postes, ce qui prend des heures matin et soir pour venir à bout du troupeau.

Des effets positifs

Avec son activité de négoce de produits fermiers, l'exploitation dégage un chiffre d'affaires annuel de 565 000 euros, en légère progression. La structure est aujourd'hui en nom propre, mais Jean-Noël Rochas a pour projet, en 2014, de séparer les activités entre la partie agricole et la partie négoce. Si aujourd'hui les fromages du Col Lachard, se vendent bien, c'est que les produits fermiers bénéficient d'une image de qualité. « C'est un fromage recherché », explique le producteur qui tient à son statut fermier et donc ne court pas après les volumes et la grande distribution, pour ne pas déplaire à sa clientèle. Et cela marche bien puisqu'il n'a pas connu l'inflexion d'activité que les grands producteurs de saint-marcellin ont subie ces dernières années.

Pour lui, l'IGP représentera « toujours un plus, une reconnaissance. Elle aura des effets positifs dans la mesure où elle permettra de garder les quelques fromageries restantes du secteur. Mais certains transformateurs, qui ne font que de la vente directe, n'entreront pas dans l'IGP, car ils ne veulent pas s'embêter avec les contrôles et n'ont pas besoin de cela pour vendre. » Pendant longtemps Jean-Noël Rochas s'est battu pour l'obtention du label. Il s'est lassé tout en restant persuadé que c'est un avantage à défendre. Les retombées, il ne les attend pas avant quelques années, notamment sur les prix. « Il faudra que le Comité interprofessionnel du saint-marcellin (CISM) mette les moyens en termes de communication. » En revanche, il ne se montre guère optimiste pour les producteurs laitiers : «  je ne pense pas qu'ils doivent attendre beaucoup des transformateurs ». Ca bloque toujours du côté du prix du lait.

Isabelle Doucet
Producteurs laitiers du saint-marcellin

Une assemblée générale autour du label

 
L'union des producteurs laitiers du saint-marcellin tiendra son assemblée générale le mardi 14 janvier prochain à la salle de conférence de l'espace Saint-Laurent à Saint-Marcellin. Au programme : la structuration de l'organisation professionnelle saint-marcellin, son évolution depuis sa création fin 2011, ses objectifs et son agrément par le ministère de l'Agriculture, mais aussi le contexte du prix du lait (payé au producteur en 2013) et les projection 2014 (lait IGP et non IGP). Enfin, Jean-Philippe Goron, du contrôle laitier, présentera les résultats technico-économiques des systèmes d'exploitation laitiers de la région.