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BIO

Groupements cherchent plateformes

L?opération « Mon lycée mange bio » associant lycées et fournisseurs bio régionaux a pointé une grande marge de progression entre la commande publique et l?offre bio.
Groupements cherchent plateformes

L?achat bio local peut encore paraître complexe pour les groupements d?achats en charge de la commande publique. Portée par le réseau régional Corabio, l'opération « Mon lycée mange bio » a réuni à La-Tour-du-Pin, en Isère, des fournisseurs et des donneurs d?ordres pour défricher un dispositif en voie de développement. Florence Dodet, de Corabio, a délivré quelques pistes pour faire rimer produits biologiques locaux, commande publique et groupements d?achats. Elle a commencé par rappeler le principe fondamental du code des marchés publics qui est la liberté d'accès. « La provenance locale ne peut pas être mise en avant par respect du principe d'égalité ». Cependant, il existe une boîte à outils permettant de privilégier le bio local, en dépit d?un cadre normatif relativement rigide. Ainsi, depuis 2006, les critères de développement durable peuvent être pris en compte, de même que les acheteurs peuvent demander « des produits issus de l'AB ou équivalents ». Il est également intéressant d?allotir un marché le plus possible pour favoriser l'accès de producteurs locaux dont la gamme de produits est limitée. « Une stratégie peut consister à faire entrer du bio en même temps que du conventionnel », précise Florence Dodet. L?introduction de variantes techniques comme la demande de fruits et légumes de saison ou de délais courts entre la cueillette et la livraison des produits participe à cette même logique de circuits courts et bio. Mais, quelque soit le marché, il convient avant tout de s?assurer qu?il existe des candidats capables d?y répondre, et, fort de la connaissance du tissu bio, d'orienter les commandes.

Le bon goût

Par ailleurs, il est possible de pondérer les critères d'attribution : le goût, apprécié dans le cadre d'une commission de dégustation mise en place par les lycées et les groupements d?achats, peut compter pour une large part dans la décision et donc représenter un levier pour le bio. A condition que le fournisseur offrant le meilleur goût soit le plus proche et bio, ce qui n?est pas forcément le cas. Depuis 2011, un critère mesure également « les performances en matière de développement des approvisionnements directs des produits de l'agriculture ». La rédaction des marchés publics et les objectifs des groupements méritent donc de faire l'objet d?une mûre réflexion. Pour autant, cette démarche volontaire peut encore achopper face à l'absence de structuration et de groupements d'achat comme c?est le cas dans l'Ain. En Ardèche, en revanche, c?est l'offre qui fait défaut. Le Drôme atteint le plus haut seuil de maturité régional, avec sa quatrième année de fonctionnement et des groupements identifiés par les fournisseurs. Le système permet à des lycées et des collèges isolés de s?approvisionner en produit bio local. « Le groupement d'achat local est la solution dans ce schéma d?approvisionnement », insiste Patrick Devaux, de la région Rhône-Alpes. La commande publique s?élève désormais à 240 000 euros dans la Drôme, soit dix fois plus qu'il y a quatre ans, mais elle ne représente encore que 5% du marché conventionnel. L'Isère fait aussi partie des départements vertueux, qui compte, depuis 2005, deux plateformes de producteurs, c'est-à-dire des interlocuteurs capables de répondre à la demande. Des marchés bio existent également, ou sont en cours, dans les Savoie, le Rhône et la Loire.
Les donneurs d'ordres le répètent : sans passer par une organisation structurée, un producteur aura du mal à répondre à un marché public. Cependant, les approvisionnements de gré à gré sont toujours possibles pour les marchés inférieurs à 4 000 euros.

Isabelle Doucet
FOURNISSEURS / Le Gaec de la grange, à Leoncel dans la Drôme, cherche encore le modèle qui lui permettra d?entrer sur les marchés publics.

« Entrer sur les marchés publics comme sous-traitant »

« Je suis un potentiel sous-traitant », affirme Frédéric Bouchet, représentant du Gaec familial de la grange dans la Drôme. Avec un troupeau de 200 bêtes dont 85 vaches allaitantes, l'exploitation produit un quota de 230 000 litres et 10 à 15 000 yaourts bio par semaine. Elle fait partie de l'association Bleu du Vercors. « Nous pourrions faire deux fois plus si nous avions accès à de nouveaux marchés en tant que sous-traitant. » Impossible pour l?exploitation de passer en direct car sa taille ne le lui permet pas. En revanche, son système de production l?autorise à pratiquer des prix compétitifs. « Le risque, c'est d'être catalogué comme casseur de marché bio », craint Frédéric Bouchet. Il travaille déjà un peu avec les plateformes Manger bio et A Pro Bio, répond à des marchés de gré à gré avec des collèges et des établissements, mais voudrait se développer. Le Gaec dispose d'une véritable force commerciale qui lui permet d'être déjà positionné sur des marchés de collectivités et des restaurants. « Nos produits sont reconnus par les professionnels de la restauration collective », explique Frédéric Bouchet, mais il regrette le passage obligé, dans certaines régions, par des groupements d?achats ou de distribution pour entrer sur les marchés. Preuve que le système cherche encore son équilibre.

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