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Inauguration

Haute tension voironnaise

Occasion de revendications publiques, l'inauguration de la foire a vu l'évocation des tensions politiques issues de l'élaboration du PAEN Voironnais.
Haute tension voironnaise

Ils l'avaient dit, ils l'ont fait. Une quarantaine de manifestants d'origine agricole est venue clamer ses inquiétudes quant au projet de PAEN* dans le Voironnais, aux élus du cortège officiel, lors de l'inauguration de la foire de Beaucroissant, vendredi dernier. Groupés devant le stand de la FDSEA de l'Isère, sous le chapîteau Agrivillage, ils ont fait entendre leur voix lors de l'arrivée des élus. « Nous voulons rester maîtres de nos terres, pouvoir les transmettre pour le projet agricole que nous souhaitons, ne pas être dépossédés par un droit de préemption qui serait dévolu à la collectivité publique (sous-entendu au conseil général, ndlr) ». Ce dossier, délicat et localement tendu depuis plusieurs mois, a donc été évoqué par Pascal Denolly, président de la FDSEA, dans les allées d'Agri village. « La FDSEA demande une protection renforcée de l'outil de travail qu'est le foncier, pas du capital », tient-il à préciser immédiatement, connaissant le trouble naissant dans l'esprit de certains élus locaux qui ne comprennent plus la position agricole. « Ce paquet PAEN est mal ficelé, c'est une dynamite car il a un mode opératoire flou et constitue une usine à gaz », explique-t-il. Surtout qu'il intervient dans un contexte où la concurrence sur le foncier est réelle : « 500 000 m2 de locaux industriels sont innoccupés en Nord Isère, alors qu'en même temps la profession subit les conséquences de construction en zone humide et une artificialisation galopante », indique-t-il. Dénonçant également les propos de « certains va-t-en guerre (élus locaux, ndlr) qui avancent que dans la zone du PAEN, il n'y aura plus, à terme, de propriétaires agricoles ». Mais le responsable agricole ne veut pas se cantonner à la seule opposition, et se place en réel interlocuteur : « Si vous voulez être facilitateur d'une redynamisation agricole, bravo ; au-delà, nous disons stop ! On peut être ensemble autour de la table avec une idée : la définition des actions dans le PAEN doit être concertée avec les agriculteurs et le droit de préemption rester dans le giron de la Safer ». Un positionnement apprécié par les agriculteurs présents si l'on en juge par le tonnerre d'applaudissements qui s'en est suivi.

Coup de colère

Tonnerre ou plutôt éruption peuvent être les qualificatifs utilisés pour l'intervention de Christian Nucci, vice-président du conseil général, qui s'est exprimé un peu plus tard sur ce dossier. « Dois-je rédiger le testament de l'intervention du conseil général en matière de politique agricole départementale ? lance-t-il d'emblée. Je prends tout avec beaucoup d'humour, mais en moi, l'Etna est en ébullition ! » Et l'élu s'emporte contre une idée qu'il juge préconçue : « Dans la copie définitive, il y aurait que le conseil général s'occuperait du droit de préemption ? Mais on trouvera bien quelqu'un d'autre pour le faire à sa place ! », s'exclame-t-il d'une voix forte. « La seule chose qui m'engage, c'est ce que j'ai dit et fait depuis des années. Notre responsabilité est de ne pas brader le potentiel agricole. Le PAEN s'inscrit dans cette constance de la politique départementale. Le fond est bien le foncier et l'installation. La troisième charte sur ce thème a été signée à mon initiative en début d'année. Nous souhaitons donc continuer la concertation, sauf si vous nous dites d'arrêter ce projet. Mais alors, la spéculation reprendra ses droits ».

Négociation

« La foire est un lieu d'échanges, de discussions et de négociation, relève Jean-Claude Darlet, président de la chambre d'agriculture. Entre producteurs, entre citoyen et monde agricole, mais également entre profession et élus. La chambre d'agriculture et la profession sont partisanes du PAEN, mais je soutiens aussi les manifestants. On doit remettre les choses à plat avec le conseil général. Le droit de préemption ? Il doit rester à la profession agricole ! Le programme d'actions ? Il doit être fait par les agriculteurs du territoire concerné ! » Et de rappeler également qu'il est nécessaire d'arrêter d'empiler des zonages, source de démoralisation des agriculteurs. « Nous ne sommes pas dans un département à l'agriculture intensive », souligne le président de la chambre. Sa conclusion est simple : « Echanger avec les agriculteurs, ils ont plein de choses à dire ».

 

*Protection des espaces agricoles et des espaces naturels péri-urbains

Jean-Marc Emprin