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Pollution atmosphérique

L'agriculture au même niveau que le bois de chauffage

Pour lutter contre les pollutions, la Métro lance une série de mesures incitatives, tandis que le nouvel arrêté inter-préfectoral se montre très contraignant à l'égard de l'agriculture dès le premier niveau d'alerte.
L'agriculture au même niveau que le bois de chauffage

Parce que l'agglomération grenobloise dépasse régulièrement, en hiver, le seuil de particules fines en suspension (les fameuses PM10*) ; parce que ces épisodes de pollution sont un véritable enjeu de santé publique, les collectivités s'attaquent concrètement au problème. De façon incitative quand il s'agit de dispositions prises par la Métro, mais aussi de manière plus contraignante avec l'arrêté inter-préfectoral pris le 1er décembre 2014, où l'agriculture, jusqu'alors épargnée, est fortement concernée, au même titre que les déplacements ou le résidentiel.

A Grenoble, les 35 jours autorisés en matière d'exposition aux PM10 sont largement dépassés, notamment sur les grands axes de circulation (54 jours en 2013). A une moindre échelle en termes de population exposée, la pollution au dioxyde d'azote (NO2) est tout aussi préoccupante. Camille Rieux, d'Air Rhône Alpes rappelle combien le chauffage au bois, lorsqu'il est mal utilisé, participe à cette pollution aux PM10. Le phénomène est essentiellement hivernal. Le chauffage au bois contribue à la pollution à 45% en moyenne (25% l'industrie et 25% le trafic), 62% en hiver et 75% par grand froid.

Renouvellement

Que le trafic routier soit un facteur de pollution, la population en a pleinement conscience. En revanche, que le bois, produit naturel, puisse être un polluant, personne n'y songe. C'est ce que révèle une étude réalisée par l'IEP en région grenobloise. L'étude précise aussi qu'environ 26 000 foyers se chauffent au bois, principalement en périphérie de l'agglomération. Or, 2/3 de ces appareils (environ 20 000) sont considérés comme polluants, même s'ils sont le plus souvent utilisés comme énergie secondaire. « Le chauffage au bois est sain lorsque le bois est de bonne qualité, ainsi que l'équipement de chauffage », prend soin de préciser Stéphane Labranche, enseignant chercheur à Sciences-Po. Il préconise une approche de la question « non culpabilisante », d'autant que la filière bois est un acteur économique à fort potentiel dans la région. D'où le lancement d'une campagne de sensibilisation pilotée par la nouvelle métropole sur son périmètre de 49 communes et intitulée « De quel bois je me chauffe ». Elle propose en outre un test en ligne pour que chaque particulier mesure sa façon de chauffer avec à la clé, un message : s'équiper d'un chauffage performant, utiliser un combustible de qualité et entretenir son chauffage. Pour être incitative, la Métro envisage la mise en place d'un plan d'aide au renouvellement des appareils de chauffage, notamment ceux installés avant 2002, selon un modèle déjà expérimenté dans la vallée de l'Arve. Le montant de l'aide pourrait être de 1 000 euros par foyer, « ce qui représenterait une enveloppe globale de 5 à 6 millions d'euros », précise Jérôme Dutroncy, vice-président environnement, air, climat et biodiversité de la Métro. Il annonce un certain nombre d'initiatives prises avec le SMTC sur le volet déplacements qui vont du report modal jusqu'à gratuité des transports en commun. Le dispositif Mur-Mur, qui vise à améliorer l'isolation des copropriétés privées ou publiques construites en 1945 et 1975, sera reconduit avec un souci de lutte contre la précarité énergétique et de renouvellement des appareils de chauffage conjointement à l'isolation.

Ecobuage, épandage...

Au deuxième seuil d'alerte, l'épandage est interdit.

Les choses peuvent se corser en cas de pic de pollution et de mise en œuvre de l'arrêté interpréfectoral qui répond à l'application du Plan air énergie climat. Dès le niveau N1** déclenché (celui qui suit l'information), l'agriculture se verra interdire, en hiver et en intersaison, l'écobuage et le brûlage des sous-produits agricoles. En intersaison, le nettoyage des silos sera proscrit et le recours à l'enfouissement immédiat obligatoire. Cela au même niveau que l'interdiction des foyers ouverts en résidentiel. Au deuxième niveau d'alerte, les épandages seront interdits. A l'intersaison, l'agriculture est considérée comme responsable de 98% des émissions d'oxydes d'amoniac, 12% des oxydes d'azote et 12% des émission de PM10, alors qu'elle ne dépasse par 4% de ces émissions en hiver. Selon les experts, l'enfouissement immédiat après épandage et l'interdiction des épandages sont considérés comme les mesures les plus efficaces, en fonction du type de pollution, au même titre que l'interdiction du feu dans les foyers ouverts et la réduction de la circulation.

Isabelle Doucet

 

*PM10 : particules fines dont la taille ne dépasse par 10u
Seuil PM10 : 50ug/m3/h pendant un jour

Combien de jours ?

En 2013, Air Rhône-Alpes a comptabilisé un total de 83 jours de pollution en Rhône-Alpes. Les zones les plus touchées (plus de 10% des jours de l'année) sont : le bassin lyonnais et le nord Isère, la vallée de l'Arve, le bassin grenoblois et les pays de Savoie. Les PM10 comptent à 90% dans ces activations. En principe, « dès deux jours de dépassement du seuil d'information, s'il y a risque de franchir à nouveau ce seuil le jour suivant, le dispositif passe au niveau d'alerte », indique Air Rhône-Alpes. Soit 13 jours en 2013, 2014 n'étant pas une année significative en raison d'une météo très particulière. Les polluants considérés sont l'ozone (O3), le dioxyde d'azote (NO2), les particules (PM10) et le dioxyde de soufre (SO2).