S'il y a bien un endroit où les choses se disent, c'est à la foire de Beaucroissant. Deux fois par an, les élus se retrouvent au contact direct de la profession agricole. Et après le traditionnel tour du champ de foire - au sec, une fois n'est pas coutume - les discours indiquent l'état d'esprit de chacun.

Jean-Claude Darlet, le président de la chambre d'agriculture de l'Isère a voulu faire montre d'un esprit positif mais a profité de la présence du secrétaire d'Etat à la réforme territoriale, André Vallini, et de nombreux édiles, dont Christian Nucci, vice-président du conseil général en charge de l'agriculture, la presque sénatrice (elle prendra officiellement le siège d'André Vallini le 10 mai prochain) et vice-présidente du conseil régional, Eliane Giraud, Georges Civet, le maire de Beaucroissant, Robert Veyret, conseiller général du canton de Rives, mais aussi Patrick Lapouze, le nouveau secrétaire général de la préfecture de l'Isère, pour faire passer quelques messages. Le renouvellement des exécutifs au lendemain des élections municipales est l'occasion de prendre date pour parler de la place de l'agriculture dans les collectivités, « tant au niveau économique, car nous sommes créateurs d'emploi, de valeur ajoutée, d'activité, que sur la partie foncière, où nous voulons avoir toute notre place », a lancé le président de l'organisme consulaire. Il a également mis sur la table la question de la gestion qualitative et quantitative de l'eau comme donnée collective. Le deuxième dossier d'actualité concerne la valorisation de la production du saint-marcellin. Le fromage isérois a obtenu en décembre dernier le label de qualité IGP, mais les producteurs et les éleveurs ont besoin d'être accompagnés dans leur développement. « Sans lait, il n'y a pas de saint-marcellin », a rappellé Jean-Claude Darlet. Il milite pour « la mise en place d'un outil de transformation qui appartienne à la profession et non pas à un ou deux grands groupes, qui gèrent comme ils le souhaitent la rémunération de la matière première ». Enfin, la président de la chambre d'agriculture s'est ému du carcan normatif et règlementaire qui, cette fois-ci, entrave la transmission et l'apprentissage. Le décret du 13 octobre 2013 tendrait en effet à « couper toute relation entre les maîtres d'apprentissage et les apprentis » en raison de règles de plus en plus difficiles à appliquer et propres à décourager les employeurs de prendre des apprentis de moins de 16 ans. Et ce citer l'exemple de la traite des vaches ou du travail en hauteur, désormais soumis à conditions et autorisations. « C'est une aberration dans notre pays. Comment ferons-nous demain pour transmettre notre métier ? », interroge-t-il.

Intercommunalités et région

Le message a été entendu par André Vallini, en première visite officielle à la Beaucroissant en tant que secrétaire d'Etat. Il s'est confié sur sa mission de réforme territoriale. « J'ai accumulé beaucoup d'expérience », a-t-il déclaré en préambule, en faisant référence à toutes les fonctions politiques qu'il a remplies. « Une mission difficile m'attend », à commencer par convaincre les élus et surtout les présidents de conseils généraux. Il rappelle que depuis 30 ans, les départements ont été au cœur de la décentralisation. « Mais il faut regarder les choses comme elles évoluent. Tout bouge plus vite. Les distances se sont raccourcies. » Le secrétaire d'Etat considère nos voisins européens « qui ont tous bougé. Moins de communes, moins de niveaux : ne soyons pas les derniers de l'Europe à faire évoluer l'organisation de nos compétences ». Sa réforme est également motivée par les économies d'échelle à réaliser. Il invite les communes à se rapprocher davantage et à mutualiser encore plus leurs services. « Le couple d'avenir, c'est la région et les intercommunalités. » Il réaffirme la volonté de l'Etat de voir le nombre des régions divisé par deux, de façon à augmenter leur taille, avoir un poids démographique plus important et une plus grande visibilité internationale. « Nous laisserons le temps aux élus d'agrandir leurs intercommunalités et aux présidents de région de nouer le dialogue, mais un jour, le Gouvernement tranchera », à affirmé André Vallini.

Isabelle Doucet

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