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Rentrée scolaire

L'agroécologie fait sa rentrée

Dans les établissements agricoles isérois, les pratiques d'agroécologie ne sont plus seulement dans l'air du temps. Elles font partie intégrante de l'enseignement dispensé.
L'agroécologie fait sa rentrée

L'agroécologie, les établissements isérois n'ont pas attendu les engagements du Ministère de l'agriculture du printemps 2014 pour l'insérer dans leurs enseignements. Selon André Roux, directeur de la Maison familiale rurale (MFR) de Chatte, « cette dimension est intégrée de façon diffuse dans nos cours depuis 20 ans. A l'époque, nous expliquions déjà aux jeunes l'importance de réaliser des analyses de terre, de ne pas mettre plus d'azote que nécessaire. Nous les emmenions déjà aussi visiter des exploitations qui avaient ce type de raisonnement et de pratiques ». Si tous les établissements n'ont pas cette approche depuis autant d'années, ils l'ont acquise depuis. Pour Virginie Fontaine-Delaveaud, directrice de la MFR de Vif, « les générations qui arrivent sont formées en ce sens. Elles ne peuvent pas y échapper ». Aussi, sans qu'il y ait de cours intitulé « agroécologie », (tous les enseignants s'en défendent. « Il ne s'agit pas d'une matière en soi, mais d'une dimension transversale », analyse David Jouve, directeur du lycée Agrotec de Vienne), l'apprentissage de pratiques pour produire autant avec moins, en limitant le recours aux intrants pour préserver l'environnement, est lancé en Isère. Il fait partie des projets d'établissements et ces techniques de production sont intégrées dans l'ensemble des matières étudiées (agronomie, zootechnie, phytotechnie, économie, agro-équipement, mécanique ...), dans les visites réalisées et dans les projets mis en œuvre. Pour les équipes pédagogiques, cette évolution est une obligation. Comme l'indique Sophie Queyron, monitrice à la MFR de Mozas et référente agro-écologie du réseau des MFR au niveau régional, « nous sommes obligés de nous adapter et d'enseigner ces pratiques. Nous nous devons d'être au plus près du terrain, de ce que vivent les jeunes quand ils vont en stage dans les exploitations. Nos pratiques pédagogiques doivent être en lien avec cette réalité. Nous ne pouvons pas être en décalage ».

De multiples compétences

L'accueil réservé  à ces enseignements qui font la part belle aux analyses de sol, aux diminutions de traitements, aux techniques culturales simplifiées (TCS), aux traitements phytothérapiques ou homéopathiques, n'est pas le même partout. Si l'apprentissage de pratiques agroécologiques au sein de la MFR de Vif correspond à une demande locale en lien avec le contexte territorial de l'environnement montagnard du sud-Isère, il faut parfois faire preuve de plus de pédagogie pour convaincre dans d'autres secteurs. Car des réticences liées à l'habitude de pratiques plus conventionnelles subsistent. Mais deux arguments font mouche. D'abord, les explications et les démonstrations des agriculteurs lors des visites ou des stages. Pour André Roux, « il faut toujours montrer aux élèves que ces techniques fonctionnent. Quand c'est un paysan qui le dit, le message est bien plus efficace que lorsqu'il est délivré par un enseignant ». Même analyse de Sophie Queyron, qui utilise le vécu et les multiples expériences des étudiants. « Aujourd'hui, tous les agriculteurs sont obligés d'avoir des pratiques agroécologiques. Mais ils le font à différents niveaux. C'est à nous de montrer qu'il y a de bonnes idées à prendre chez tout le monde. Cette mise en commun des expériences est d'une grande richesse. Mais elle est de plus en plus nécéssaire car la valorisation du terrain, de l'environnement de l'exploitation inhérente à l'agroécologie nécessite de multiples compétences que nous devons transmettre aux jeunes pour qu'ils soient armés ». Ensuite et surtout, le bénéfice économique que les agriculteurs peuvent retirer de ces pratiques. Pour André Roux et Sophie Queyron, la dimension économique ne doit en aucun cas être oubliée. « Apprendre aux élèves qu'en faisant un seul traitement au bon moment permet d'en éviter quatre autres fonctionne, les interpelle. C'est par cette approche là que nous pourrons convaincre le plus grand nombre », précise le directeur de l'établissement de Chatte.

Une plus grande réflexion personnelle

Alors, pour montrer que « ça marche », les initiatives et les expériences se multiplient. La création d'une classe de troisième « Nature » avec des thèmes de découverte professionnelle à la MFR de Vif, l'étude des TCS au sein de la section agro-équipement de la MFR de Mozas, l'utilisation de techniques d'agriculture de conservation sur trois parcelles de la ferme du Lycée de La-Côte-Saint-André et la recherche d'une totale autonomie pour l'alimentation de ses animaux sont quelques exemples qui illustrent la volonté des établissements du département d'aller dans cette direction. Avec une conscience que cette approche nécessite une plus grande réflexion personnelle pour trouver les solutions adaptées à chaque exploitation, qu'elle peut prendre du temps et que ce n'est pas parce que le résultat n'est pas probant dés le premier essai que cela ne fonctionne pas. Selon Sophie Queyron, « il est important que les élèves ne lient pas l'agroécologie à l'écologie. Il faut qu'ils comprennent que c'est un système d'exploitation, qui s'appuie sur le territoire, avec un contrôle des charges ». Quant à Pascal Denolly, président de la FDSEA de l'Isère, bien décidé à mettre en œuvre cette dynamique dans le département, il prévient : « il est primordial que l'approche menée dans les établissements ne fasse pas fi des apports de l'expérience des agriculteurs. En aucun cas, la formation ne doit être déconnectée du métier. Et elle doit bien être mise en œuvre dans ses trois dimensions, environnementale, économique et sociale ».

Isabelle Brenguier

Pour aller plus loin : http://draaf.rhone-alpes.agriculture.gouv.fr/Enseigner-a-produire-autrement

 

 

L'enseignement agricole au cœur du projet agroécologique pour la France

L'enseignement des pratiques agroécologiques au sein des établissements agricoles n'est pas nouveau. Mais depuis la circulaire du Ministère de l'agriculture du printemps 2014 « L'enseignement agricole au cœur du projet agroécologique pour la France », il se formalise. « La transition vers de nouveaux systèmes de production plus durables repose sur une modification majeure des cadres de pensée et des modes d'acquisition des savoirs et des pratiques. Pour cette raison, l'enseignement agricole doit assumer un rôle majeur pour adapter et anticiper l'évolution des connaissances et des modes de raisonnement ». Un plan d'action est décliné dans les projets régionaux de l'enseignement agricole, coordonnés par les Draaf. Les référentiels de certains diplômes et les pratiques pédagogiques ont été rénovés. Ce fut le cas des BTS Acse (Analyse et conduite des systèmes d'exploitation) et Darc (Développement et agriculture des régions chaudes) en 2014. C'est le cas du Capa du secteur de la production agricole en 2015. Ce sera le cas du Bac pro CGEA (Conduite et gestion de l'exploitation agricole) lors de la rentrée 2016.
Source : Ministère de l'agriculture
Pour aller plus loin : http://agriculture.gouv.fr/le-projet-agro-ecologique-pour-la-france