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Nuciculture

L'huile de noix du Dauphiné : un marché confidentiel

La production et la consommation de l'huile de noix du Dauphiné ont connu un fort développement depuis une quinzaine d'années. Dans le même temps, le produit a évolué, son image aussi.
L'huile de noix du Dauphiné :  un marché confidentiel

Parler d'une filière serait exagéré. Il s'agit plutôt d'une niche. Pour autant, la production et le marché de l'huile de noix artisanale connaissent un certain développement. Si aucune donnée concernant la production n'existe, les différents acteurs qui évoluent au sein du milieu estiment qu'elle a - au moins - doublé en dix ans. Difficile à quantifier, elle connaît de fortes fluctuations d'une année sur l'autre selon la quantité de cerneaux disponibles dédiés à ce marché.

Propriétés nutritives

Si sa fabrication est ancrée dans le territoire dauphinois, l'huile de noix d'aujourd'hui n'a plus rien à voir avec ce qu'elle était il y a encore une trentaine d'années.

Résultat d'une démarche de valorisation des déchets de noix une fois triées, l'huile était fabriquée, pour la consommation locale et familiale, avec les cerneaux petits, cassés, noirs ou rances, qui ne pouvaient être utilisés en l'état. « Dans les campagnes, auparavant, jusqu'à la génération de nos grands-parents, on ne perdait rien, quitte à ce que le produit soit mauvais », explique Michel Ageron, propriétaire du domaine du Pressoir à Rovon.

 

Michel Ageron, moulinier, est propriétaire du domaine du Pressoir à Rovon.

 

Il n'en est plus rien aujourd'hui. L'huile de noix a acquis ses lettres de noblesse. Elle est devenue un produit à part entière, fabriquée avec des cerneaux sélectionnés, plus petits et moins blancs que ceux valorisés en tant que tel, mais de bonne qualité. Un tournant a été pris il y aune quinzaine d'années. Les investissements réalisés par la profession pour améliorer la qualité des noix portent leurs fruits et celle de l'huile de noix s'en trouve aussi améliorée. Les nouvelles générations de nuciculteurs ont à cœur de produire et de commercialiser une bonne huile de noix.

 

Aujourd'hui, les cerneaux utilisés pour la fabrication d'huile de noix sont soigneusement sélectionnés.

 

Car l'huile de noix du Dauphiné (et non pas l'huile de noix de Grenoble, car elle n'est pas sous appellation) a largement dépassé le cercle restreint de la consommation familiale. Elle est devenue un produit du terroir qui s'offre volontiers à l'occasion des fêtes de Noël, mais qui se consomme aussi tout au long de l'année, ses propriétés nutritionnelles étant affirmées. Selon les acteurs de la filière noix, la prise de conscience autour de l'intérêt de l'huile de noix pour la santé a d'ailleurs largement contribué à l'accroissement de sa consommation.

Prestation de service

Conséquence de ce nouvel intérêt , sa production a augmenté. En Isère, l'huile de noix est fabriquée de novembre (dans la foulée de la récolte des noix) à avril, dans une dizaine de moulins artisanaux ou modernisés. La majorité de ces mouliniers sont aussi des nuciculteurs, qui ont hérité d'un moulin traditionnel et cherché à développer une activité complémentaire. « Avant les fêtes, il y a un important pic de production car il faut être en mesure de répondre à la forte demande qu'elles suscitent », révèle Michel Ageron, qui, lui, en n'étant pas producteur de noix et en pressant toute l'année, fait figure d'exception.

 

Michel Ageron a investi dans un pressoir à huile de noix en 2008.

 

Mais, tous allient une activité de production d'huile réalisée avec leurs propres cerneaux qu'ils distribuent pour leur compte et une autre de prestation de service, pour des producteurs de noix mais aussi pour de nombreux particuliers. Selon Denis Faure, nuciculteur et moulinier à Chatte, les deux sont complémentaires, nécessaires pour que l'installation soit rentable. Pour l'instant, la production n'est pas limitée par la demande, mais plutôt par les volumes de cerneaux disponibles. Jérémy Mathais qui vient de reprendre le moulin de son grand-père, à Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs, aimerait se développer. Mais la matière première manque. « Le déficit est encore plus important les années où les récoltes de noix sont de belle qualité », souligne Nicolas Idelon, nuciculteur à Saint-Romans. Selon Michel Ageron, « la filière de la noix devrait être davantage valorisée par le développement de ses produits dérivés. Des places sont à prendre ».

Isabelle Brenguier

Une appellation pour l'huile de noix du Périgord

 
Une démarche est en cours pour que l'huile de noix du Périgord bénéficie d'une appellation.
 
L'huile de noix du Périgord, l'autre bassin de production de noix françaises, connaît aussi un développement croissant.« Un premier état des lieux réalisé en 2004 faisait état d'une production de 100 000 litres. Elle aurait doublé, voire triplé en dix ans », explique Carmen Castro, animatrice au Syndicat professionnel de la noix et du cerneau de noix du Périgord.Forts de cette évolution, les acteurs de la filière ont entamé, il y a quelques années, une démarche pour que leur huile de noix bénéficie aussi d'une appellation.« L'objectif est de démarquer ce produit emblématique de notre région, de qualité et fabriqué grâce à un savoir-faire ancestral, des autres huiles qui peuvent la concurencer mais qui n'ont rien de commun avec elle. Nous voulons prouver l'antériorité de cette fabrication, caractériser et définir ce produit et ancrer son identité », ajoute Carmen Castro. « Cette AOP (Appellation d'origine protégée) permettrait aussi de structurer la filière. Cela accompagnerait son développement », estime encore l'animatrice.Le contenu du cahier des charges est validé.Le Syndicat professionnel de la noix et du cerneau de noix du Périgord travaillent actuellement avec l'Inao, l'Institut national de l'origine et de la qualité, à délimiter l'aire géographique dans laquelle le produit pourrait s'inscrire.
IB