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Sport et territoire

L'Isère, locomotive du trail

Depuis une petite dizaine d'années, le trail connaît en Isère un fort engouement porté par les professionnels de la discipline et du tourisme. L'objectif est d'inscrire le département comme "une terre de trail".
L'Isère, locomotive du trail

Le Grand Duc, le trail des Passerelles du Monteynard, l'UT4M, l'Echappée belle, l'Ultra-trail du Vercors... Les week-ends se suivent et les trails aussi. On croit souvent que la discipline est toute jeune, mais il n'en est rien. Pour preuve, le Grand Duc, l'ultra-trail de Chartreuse, a célébré cet été sa 27ème édition.

Mais la pratique n'est plus confidentielle comme elle l'était, pratiquée par une poignée d'afficionados - ou de fous, penseraient certains - avides d'efforts et de dénivelé. Même si le trail reste une niche, l'activité connaît un essor sans précédent. 

« Aujourd'hui, la demande explose. Le trail génère un sentiment de liberté qui attire de plus en plus de monde, venu de la pratique sur route. Les pratiquants ont besoin de se confronter à eux-mêmes », affirme Pierre Gagnaire, passionné de trail

En dix ans, le nombre de trail a d'ailleurs été multiplié par plus de quatre et l'on en dénombre en France environ 2 500 par an. Les experts considèrent que la croissance annuelle de ce secteur devrait être comprise entre 5 et 10 % (1).

Cinq stations

Le département de l'Isère, avec ses quatre massifs (Belledonne, Chartreuse, Vercors et Oisans) et ses 9 000 km d'itinéraires balisés, se prête naturellement à cette pratique.

C'est le cas dans d'autres régions françaises, mais c'est bien en Isère que les professionnels de la discipline, les nombreux organisateurs de trail, et ceux du développement touristique l'inscrivent dans le territoire, chacun contribuant à créer et à asseoir une identité « trail » au département.

L'engouement, parti de Saint-Pierre-de-Chartreuse, avec l'implantation, en 2011, de la société Raidlight(2) et de la première station de trail de France (3), s'est rapidement étendu au delà des frontières chartrousines.

La seconde station française était celle de Villard-de-Lans et aujourd'hui, l'Isère en compte cinq (4) parmi les 27 présentes dans le territoire national.

Une niche

L'ensemble des acteurs de la discipline considère le trail comme une opportunité à saisir en matière de développement touristique.

En Chartreuse, « le concept de station a été lancé pour réaliser une offre touristique à part entière. L'idée était de créer une visibilité importante au territoire pour les pratiquants », explique Hervé Soder, chargé du développement des stations de trail en Isère et à l'étranger.

Pour Christian Douchement, directeur de la station de Villard-de-Lans, « même si cela reste une niche, le trail contribue à dynamiser le territoire. Il ne remplacera pas le ski, mais il peut participer, avec d'autres activités, à une nouvelle proposition des stations. Nous avons travaillé à son développement pour répondre à un marché émergent dont l'offre n'était pas encore structurée ». Mais sans créer de nouveaux supports. En s'appuyant sur les moyens humains et physiques dont la station disposait déjà.

Et le directeur d'ajouter : « Naturellement, l'Isère a une vraie carte à jouer en matière de trail, sans avoir quelque chose d'artificiel à créer ». 

Retombées économiques

Les acteurs du secteur sont accompagnés dans leur démarche par Isère Tourisme, qui a fait du trail une de ses priorités. Selon sa présidente, Chantal Carlioz, « la pratique du trail permet la valorisation de l'ensemble du territoire, de son identité, de ses paysages, de ses montagnes, de ses lacs, de ses villages, de ses châteaux, de ses sentiers... C'est un projet innovant et structurant, puisqu'il s'appuie sur cette diversité ».

D'autant que l'activité génère des retombées économiques. Disparates et encore peu nombreuses, quelques données apparaissent cependant. Entre 80 et 100 000 euros dépensés pendant les « Trois jours de Chartreuse », 220 000 euros pendant le « Trail des passerelles du Monteynard » pour leurs éditions 2015.

Pour leurs courses, les trailers sont accompagnés de leur famille, ce qui génère nuitées et dépenses. Et simplement pour la pratique, les séjours et les vacances liées au trail se multiplient dans les différents massifs isérois, occasionnant de nombreuses visites ou activités dans le territoire.

« Selon plusieurs études, seuls 2 à 3 % des personnes viennent uniquement pour la pratique sportive. La majorité est là pour la qualité des paysages, les rencontres, les relations humaines », souligne Emmanuel Heyrmann, responsable du service tourisme au Parc naturel régional de Chartreuse.

Cet impact économique est d'autant plus important que le trailer dispose d'un bon pouvoir d'achat. Les pratiquants sont issus des catégories socio-professionnelles les plus élevées.

 

(1) Enquête socio-économique réalisée par le Think tank trail auprès de 2 003 pratiquants

(2) Entreprise spécialisée dans la fabrication de matériel, qui emploie 50 personnes à Saint-Pierre-de-Chartreuse

(3) Une station de trail est un lieu dédié au trail, qui propose des parcours, des services, et des outils. Elle est composée de parcours balisés, d'ateliers de stade de trail, d'une base d'accueil avec vestiaires et douches, d'un site internet et d'une application smartphone.

(4) Saint-Pierre-de-Chartreuse, Villard-de-Lans, Belledonne-Pays-d'Allevard, Oisans et Alpe-du-Grand-Serre.

Isabelle Brenguier

 

Un plus grand respect des lieux et des activités

Crédit photo : RaidLight-Vertical
Le développement du trail ne doit pas se réaliser au détriment de l'environnement et des activités déjà présentes.
Si le territoire de l'Isère se prête au trail, son développement ne doit pas se réaliser au détriment de l'environnement et des activités déjà présentes, comme le pastoralisme, la chasse ou la forêt. Son déploiement, il y a une dizaine d'années, ne s'est pas toujours réalisé dans les meilleurs conditions. Depuis, les professionnels du secteur s'attachent à communiquer auprès des pratiquants pour un plus grand respect des lieux et des activités, et les organisateurs de trails cherchent des itinéraires qui minimisent l'impact de la discipline. Pour Pierre Gagnaire, réalisateur du film « Isère, terre de trail » commandé par Isère tourisme pour encourager au développement de l'activité et au respect des autres composantes du milieu, « il est important d'intégrer en amont l'ensemble des acteurs pour un meilleur partage du territoire ».
IB