La bonne conduite, ça se cultive

Avec le changement d'heure et de temps, nous voilà entrés dans la mauvaise saison. Celle des petits matins gris et brumeux, avec leur cortège de températures négatives et d'intempéries, de vent, des risques de neige et de verglas. Des situations que chaque automobiliste appréhende, même s'il les connaît bien. Anticiper, bien sûr, est la règle d'or. Adapter son comportement s'avère d'autant plus important que les conditions météorologiques ne sont pas forcément les seuls vecteurs de danger sur la route. « Il n'y a pas un conducteur qui voit la même chose au même moment, rappelle Cathy Simon, directrice du centre de formation Centaure de L'Isle-d'Abeau. On conduit des véhicules différents, mais on partage la même route. » La situation se complique du fait des technologies embarquées (régulateur de vitesse, aide au freinage, systèmes d'alertes et d'assistance à la conduite...). « On ne conduit pas aujourd'hui comme il y a trente ans, fait remarquer l'experte en sécurité routière. Les voitures sont équipées d'une connectique embarquée. Elles font tout pour nous, nous sommes cocoonnés. Dans certaines situations, cela peut être assez dangereux, car nous ne sommes plus acteurs de notre conduite. Il y a un vrai travail de sensibilisation au risque routier à faire. »
Situations conflictuelles
La directrice du centre Centaure en sait quelque chose : elle voit défiler des centaines de stagiaires chaque année, qui sont à peu près tous sont convaincus d'être de bons conducteurs, notamment parmi les professionnels (1). « En général, ils ne viennent pas de façon joyeuse, mais à la fin du stage, ils s'aperçoivent qu'ils ont appris des choses et sont souvent dans des situations conflictuelles génératrices d'accident », constate Cathy Simon. Un chiffre parle de lui-même : après un stage de conduite, la « sinistralité » en entreprise baisse de 50% et la gravité des accidents diminue nettement. Quand on sait que le risque routier constitue aujourd'hui le premier risque d'accident mortel au travail, cela donne à réfléchir.
D'où l'intérêt d'une petite séance de « pédagogie active ». Le centre Centaure de l'Isle-d'Abeau est équipé pour. Il dispose de quatre plateaux d’exercices et d'un parc de véhicules spécialement équipés (15 V.L, 1 V.U.L, 1P.L, 4 monospaces d’animation). La formation qui y est dispensée comporte deux aspects, l'un théorique (les principes de la conduite de la conduite professionnelle (2)), l'autre pratique. Le premier permet de rappeler les fondamentaux comme les bonnes pratiques (règles de conduite, manœuvre...) ou l'identification des situations à risques. Le second présente l'avantage de placer le conducteur en situation périlleuse... en toute sécurité.
Instinct de survie
L'expérience est assez déstabilisante. Assis au volant d'un véhicule à priori normal, le stagiaire démarre sans savoir ce qui va lui arriver. La voiture avance en douceur sur le plateau d'exercice. Le conducteur prend de l'assurance, accélère... Soudain un mur d'eau surgit devant le capot. La voiture chasse de l'arrière, dérape. Coup de frein provoqué par l'instinct de survie. Erreur : la voiture part dans le décor. « Une telle situation n'est pas forcément compatible avec le freinage, analyse Christophe Philip, le formateur. Il fallait débrayer, contre-braquer et placer le regard, autrement dit regarder là on l'on veut aller. C'est fondamental. » Et ça marche. Au deuxième essai, le conducteur applique ce qu'on vient de lui expliquer et franchit le mur d'eau sans problème.
Aquaplaning, plateau-virage (une plaque tournante simule un choc latéral ou l'éclatement d'un pneu), plateau-pente (simulation d'une phase d'évitement en montée ou en descente), tous les exercices représentent des situations courantes et sont construits sur le même modèle : expérience d'abord, puis mise en place de bases théoriques et enfin mise en pratique sur la piste. « C'est ce qu'on appelle la philosophie curative, explique Christophe Philip. Le but est de faire vivre les choses aux gens pour leur faire comprendre qu'il ne faut pas que ça arrive sur la route. » La méthode est efficace. On comprend très vite l'intérêt d'adapter sa vitesse. Et surtout d'anticiper.
Marianne Boilève
(1) 83% des conducteurs qui suivent un stage Centaure sont des salariés d'entreprise.
(2) Le véhicule comme outil de travail, les éléments qui interagissent avec la conduite (météo, état des routes, conditions de circulation...), le conducteur, l'organisation et l'optimisation des déplacements professionnels et la réglementation.
Plus de morts sur les routes
Selon les statistiques provisoires de l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière, 316 personnes ont perdu la vie sur les routes de France métropolitaine en octobre 2016, contre 378 en octobre 2015, soit une baisse de 16,4% et 62 vies épargnées. Cet écart est en partie dû à l'accident de Puissegrain qui, le 23 octobre 2015, avait fait 43 victimes. Les accidents corporels sont quant à eux en hausse de 7% : 5 440 en octobre 2016 contre 5 085 en octobre 2015, soit 355 accidents. En Isère, sur les neuf premiers mois de l’année, le nombre de personnes tuées sur les routes s'élève à 50 (contre 44 sur la même période en 2015). Selon le groupement de gendarmerie de l’Isère, les causes principales d’accident résident dans le non-respect de priorité et la vitesse (33%).
Education
« 10 de conduite » à Pont de Beauvoisin
