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Les Abrets

La boucherie à l'école de la patience

La boucherie à l'école de la patience

Ils sont les seuls éleveurs-bouchers du département. La Maison Jean, aux Abrets, est une institution construite pierre à pierre par la famille Jean. Une histoire singulière, qui commence par une exploitation familiale en bovins lait. « Progressivement, nous avons arrêté le lait pour faire de la viande. En 1978, j'ai acheté une boucherie puis j'ai repris la ferme de mon père. J'ai mis 10 ans avant d'avoir mon inscription MSA car un boucher qui prenait une ferme, ce n'était pas logique », indique René Jean. L'exploitant débute avec des limousines, comme naisseur et engraisseur, mais se tourne rapidement vers la race charolaise en engraissement seul. « J'achète des vaches laitonnes de 6-10 mois au printemps. Cela permet de trier dès le départ, de retenir une trentaine de bêtes sur un lot de 400. On sort de la viande extraordinaire ! » Le retour sur investissement dépend pour beaucoup de cette sélection opérée dans les élevages de Saône-et-Loire et du berceau charolais. Plus de 90% de l'élevage bovin de la ferme est vendu à la boucherie Jean.

Les bêtes ne sont pas conduites à l'abattoir avant trois à quatre ans.

« Le secret pour faire de la viande charolaise : la patience. Il faut attendre la bête pour qu'elle évolue », explique l'éleveur-boucher. Son fils, Christophe, qui s'est associé avec ses parents il y a 20 ans, insiste sur la nourriture exclusivement à l'herbe des bêtes dans le cadre d'une agriculture raisonnée. L'hiver, celles qui sont attachées sont nourries au foin complété d'un peu de farine. « L'animal a le goût de ce qu'il mange ». Les bêtes ne sont pas conduites à l'abattoir avant trois à quatre ans. Si les bouchers se permettent de prendre leur temps c'est qu'ils portent un regard aiguisé sur les bêtes choisies, savent à partir de quelle broutarde ils pourront obtenir une vache de 400 kilos. Carnet d'abattoir à l'appui, ils sortent des bêtes jusqu'à 500 kilos. « Nous fabriquons la viande que nous avons envie de vendre », poursuit Christophe Jean.

Se remettre en question

Les pièces restent ensuite une semaine dans les frigos de l'abattoir de Chambéry, puis environ huit jours pour les avants et deux semaines pour les cuisses dans les chambres froides de la boucherie. Cette maturation de trois semaines est indispensable pour la finition de la viande ; mais les goûts évoluent. « Les gens veulent de la viande rouge », observe les bouchers. Ils suivent avec intérêt cette évolution de leurs clientèle, M. tout le monde. « On mange moins de bœuf, mais de meilleure qualité ». Avec le même souci de communication sur leur métier, les bouchers ouvrent les portes de la ferme au mois de septembre. L'occasion de découvrir aussi le troupeau fétiche de René Jean, des higland cattle, race de vaches rustique aux grandes cornes et grands poils.

Les higland cattle :troupeau fétiche de René Jean.

« Nous devons toujours nous remettre en question », reprend Christophe Jean au moment de se lancer dans les journées Made In Viande. Forte de ses produits de qualité, la boucherie ne s'est pourtant jamais reposée sur ses acquis. Elle emploie 10 personnes et maintient son chiffre d'affaires autour d'un million d'euros en investissant régulièrement et en cherchant de nouvelles niches commerciales. « Il nous faut innover tous les deux ans. Cette année nous venons de lancer le drive », annonce le boucher.

Isabelle Doucet

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