La Boucle du Rhône a des envies de méthane

« Tout ce que nous faisons, c'est bénévolement. C'est dire que nous croyons en cette profession et cela nous laisse notre liberté de ton », lançait Eric Rodamel, le président du Comité de territoire Boucle du Rhône, lors de l'assemblée générale qui s'est déroulée mardi 1er décembre. Le comité était accueilli par la commune de Saint-Sorlin-de-Morestel, dont Philippe Allagnat, associé du Gaec de l'Abreuvoir, est maire. Des projets, des idées, les membres du comité, qu'ils soient agriculteurs, élus ou membre de la société civile, n'en manquent pas. A preuve, la mise en place de la collecte de pneus usagers, la participation au PAEC*, l'élaboration de la Charte du bien vivre ensemble, le marché de producteurs ou le suivi du projet Via Rhôna.
En 2016, le comité s'engagera dans une réflexion structurelle d'envergure avec l'émergence d'un projet de méthanisation. Un comité technique provisoire s'attache, depuis quelques mois, à animer la démarche. Il est composé de quatre membres dont Richard Andreosso, responsable filière route pour le conseil départemental dans le Haut Rhône dauphinois. Ce dernier a mis au point une technique de fauchage des accotements et d'aspiration avec pour perspective de valoriser ces végétaux à travers une filière de méthanisation. Son but : lutter contre les plantes invasives et allergisantes qui font florès dans le secteur. Il est rejoint par Serge Menuet, chimiste et ancien élu, Yvan Gautronneau, agronome à la retraite, et Jean-Paul Sauzet, Monsieur énergies renouvelables de la chambre d'agriculture.
« Nous en sommes au stade 1, celui de l'émergence du projet, prévient Serge Menuet. Nous cherchons à avoir la vision la plus claire possible des différentes options et des portes à ouvrir. » La question se pose notamment du type d'intrants à mobiliser, un savant cocktail entre les effluents d'élevage, au potentiel méthanogène limité mais indispensables au processus de méthanisation, les menues pailles aux capacités remarquables, les cultures intermédiaires, les déchets de collectivité ou les graisses de bacs de restauration... Il convient également de s'orienter vers des options techniques : injection de gaz dans le réseau, utilisation thermique avec une chaufferie associée, production de carburant, d'électricité.
Les membres du comité provisoire insistent sur les enjeux environnementaux et économiques liés à ce projet. Il s'agit de l'entretien des accotements, de la collecte de substrats issus des exploitations de façon à ce que ces fermes puissent limiter leurs dépenses de mise aux normes et enfin, du traitement des déchets verts des collectivités locales, voire, des boues des stations d'épuration.
Plantes invasives
La question des plantes invasives est abordée avec la plus grande prudence. C'est la raison pour laquelle une étude a été commandée à l'INSA Lyon**, sur le comportement de ces plantes dans le processus de méthanisation. L'ardoise est un peu salée, 17 000 euros, mais supportée à 50% par la région, 25% par le département. D'autres financements restent à trouver, si bien que dans la salle, on estimait opportun de solliciter le député Alain Moyne-Bressand sur sa réserve parlementaire, au titre de son engagement dans la lutte contre les plantes invasives. Pour aller un peu plus loin, Serge Menuet a listé les éléments en faveur du projet baptisé Biogaz BRD : au-delà de la lutte contre les plantes invasives, il s'inscrit dans une dynamique régionale de production de biogaz, sur une zone à fort potentiel, avec des collectivités locales à l'écoute et des élus qui considèrent le projet comme structurant pour le territoire, avec une possible entrée dans le programme Leader.
En attendant, un comité de pilotage, relais décisionnel du comité technique, devrait se mettre en place avec des élus et des agriculteurs. Le projet sera d'ailleurs débattu le 16 décembre prochain avec les élus des trois communautés de communes du secteur. Yvan Gautronneau se veut rassurant : « Nous ne sommes pas dans une logique industrielle, il est important que les agriculteurs soient des investisseurs ». D'autant qu'il peut s'agir d'un projet unique comme de plusieurs petites unités. Thierry Blanchet, élu à la chambre d'agriculture, souligne l'importance « d'associer les citoyens afin qu'ils puissent s'identifier au projet », le risque lié à l'acceptation sociale étant toujours présent.
*PAEC : Projet agro-environnemental et climatique
** Insa Lyon : Institut national des sciences appliquées
Isabelle Doucet
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