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Transition alimentaire

La Chartreuse aspire au « mieux manger »

En septembre 2018, le Parc naturel régional de Chartreuse a organisé un Forum participatif pour construire et mettre en réseau des projets d'alimentation durable sur son territoire. Au menu : des attentes fortes et quelques initiatives prometteuses.
La Chartreuse aspire au « mieux manger »

Hasard du calendrier. Alors que les Etats généraux de l'alimentation focalisent les débats sur la répartition équitable de la valeur et le seuil de revente à perte, élus et habitants de Chartreuse tentent de faire bouger les choses sur leur territoire. Une trentaine de personnes ont ainsi participé au Forum alimentation organisé le 18 septembre par le Parc naturel régional de Chartreuse, avec l'appui de la Cipra et du CPIE Vercors.

Cette intitiative micro-locale est née du projet de développer une alimentation de proximité et biologique dans les restaurants scolaires du massif. Mais elle a rapidement fait émerger une aspiration plus large au « mieux manger », émanant de citoyens aux profils divers, élus, responsables de crèche, membres d'association, parents d'élèves ou cuisiniers.

Alimentation locale

Pour nourrir les débats, la Cipra avait commandé à des élèves ingénieurs de l'Isara-Lyon une étude sur l'approvisionnement en produits locaux et biologiques des cantines de Chartreuse, territoire pilote à l'échelle de l'arc alpin.

Les étudiants ont ainsi recensé les atouts et les freins permettant (ou non...) de « mettre en relation différents acteurs du territoire en charge de la restauration scolaire afin que les collectivités soient en mesure de proposer aux enfants de leurs écoles une alimentation plus locale et issue majoritairement de l'agriculture biologique »

Transition alimentaire

Les jeunes enquêteurs ont interrogé des agriculteurs (un éleveur caprin fromager en AB, une ex-agricultrice AB productrice de porcs, œufs et poulets de chair, des productrices de fruits en AB et en conventionnel), des élus, des cuisiniers, des responsables de cuisine, des parents d'élèves et l'une des chargés de mission du Parc qui accompagne les élus des communes de Saint-Pierre-d'Entremont dans leur démarche de mise en place d'une cuisine auto-gérée.

Il est ressorti de ces entretiens qu'il existe déjà une foule d'actions en faveur de la « transition alimentaire » (introduction de produits locaux dans les menus, travail sur le gaspillage, mutualisation...).

Mais les différents acteurs soulignent les freins, essentiellement logistiques pour les agriculteurs, et économiques pour les élus. Ces derniers se disent d'ailleurs plus ou moins motivés par l'approvisionnement en circuit courts et en produits biologiques et locaux, selon qu'ils se sentent - ou non - « bloqués par les budgets et la crainte d'augmenter le prix des repas ».

Décloisonner les rôles

Ce constat posé, le Forum de septembre 2018 a permis d'impulser des échanges entre des acteurs qui ne se côtoient pas d'ordinaire, histoire de décloisonner les rôles. Après avoir expliqué en quoi et pourquoi l'alimentation était importante pour lui (pour le plaisir et la convivialité, pour la santé et l'environnement, pour gagner en autonomie ou soutenir l'économie locale), chaque participant a détaillé ce qu'il faisait - ou comptait faire - à son niveau.

Approvisionnement local

Nombreux sont ceux qui consomment des produits bio et locaux. Elus et associations s'efforcent de faciliter l'approvisionnement en produits issus du terroir en organisant des marchés de producteurs, en soutenant des initiatives locales (création d'un fournil, d'un atelier de transformation...) ou en proposant aux producteurs d'utiliser la cantine pour transformer leur production.

 

Initiatives locales et propositions d'amélioration ont peu à peu recouvert la carte du Parc...

 

D'autres encore travaillent à l'amélioration de la restauration scolaire et à la lutte contre le gaspillage en participant à la Semaine du goût, en contribuant à la création d'une cuisine en gestion directe, en organisant l'approvisionnement en produits bio et locaux de la cantine de la crèche ou de l'école.

Sensibiliser les différents publics

Les débats ont ouvert des pistes pour favoriser l'accès aux produits locaux de qualité. Un couple de Saint-Laurent-du-Pont, en reconversion professionnelle, a fait part de son projet d'épicerie ambulante, bio et locale.

Des participants ont suggéré d'installer un magasin de producteurs au cœur du massif, de développer le système de cueillette à la ferme afin de réduire les coûts ou de « capter » les personnes qui ont peu accès ou sont peu sensibles aux questions d'alimentation de qualité, via les travailleurs sociaux ou les services de santé.

Cuisinothèques

Il a également été question de sensibiliser les cuisiniers, les habitants et les enfants, ou de mettre en place des « cuisinothèques » pour permettre aux familles de réaliser des recettes faciles et rapides avec des produits locaux.

On a aussi évoqué la possibilité de mutualiser ce qui peut l'être pour diminuer les coûts, d'établir des passerelles et de créer une dynamique de réseau, y compris avec les territoires voisins afin de sortir de l'isolement dont pâtissent bon nombre d'initiatives locales.

Enfin, pour répondre aux besoins alimentaires du territoire, les participants ont proposé de quantifier les besoins de façon précise grâce à des outils du type convertisseur alimentaire, de faire connaître les Groupements fonciers agricoles (GFA) et de favoriser l'installation de nouveaux agriculteurs sur le territoire. En la matière, certains en profité pour souligner le rôle d'exemplarité que les collectivités avaient à jouer.

Marianne Boilève