La cohabitation, bel enjeu pour l'Adabel

« L'Adabel a changé, son environnement aussi. » C'est par ce constat qu'Audrey Abba, apicultrice et présidente de l'association pour le développement de l'agriculture de Belledonne, a introduit l'assemblée générale de l'Adabel à Revel, début avril. « Autrefois, nous étions tous agriculteurs et nous parlions la même langue, poursuit-elle. Aujourd'hui, nous sommes quelques agriculteurs au milieu d'habitants, de touristes, de randonneurs. La plupart des habitants ou des élus ne sont plus issus du monde agricole. Ce qui était naturel il y a seulement deux générations est devenu étranger. La cohabitation est une préoccupation quotidienne. »
Pédagogie
Pour améliorer les relations, rien de tels que les échanges et la pédagogie. Sous toutes ses formes. Voilà pourquoi, l'an dernier, le conseil d'administration de l'Adabel a choisi de concentrer ses efforts sur la communication. « Le but est de repenser notre projet associatif, d'adapter nos supports aux évolutions territoriales et mieux faire passer les messages auprès de nos interlocuteurs », explique la présidente.
Outre les opérations classiques de type marchés à la ferme (23 de mars à décembre 2018) ou Prenez la clé des champs, l'Adabel met à profit toutes les manifestations sportives ou culturelles pour parler de son action et faire la promotion des produits fermiers du massif. Auprès de tout le monde, les plus jeunes comme les plus âgés. Dans le cadre de la Semaine du goût, trois agriculteurs du réseau ont ainsi animé des ateliers dans les écoles de Revel, les Adrets, Allevard, Laval et Chamrousse (1). En fin d'année, ce sont les séniors qui ont été ciblés, via les colis de Noël commandés par les communes (411 livrés en décembre 2018).
Réexpliquer l'agriculture
Reste le plus difficile : toucher l'immense majorité des habitants et des visiteurs, qui ne sont pas forcément captifs ou réceptifs. L'enjeu est d'autant plus important qu'en Belledonne, « l'agriculture est partout, dans l'assiette, dans le paysage, sur les routes et les chemins », observe Audrey Abba, ajoutant qu'« il faut la réexpliquer pour que les contraintes qui lui sont liées soient comprises et que la cohabitaiton soit fructueuse ». Tâche noble et difficile, surtout « dans un environnement déjà envahi par la communication tous azimuts ».
Une BD pour communiquer
L'Adabel a pas mal réfléchi à la question. Deux grands chantiers ont été lancés : une bande dessinée grand public et un plan de promotion du réseau des fermes de Belledonne. Un groupe « communication » s'est constitué pour lancer les bases du projet de BD, articulé autour de trois personnages : Pierrot, Clémentine et leur chien Titus. Agriculteurs dans le massif, Pierrot et Clémentine sont confrontés à différentes situations (partage de la route, respect des cultures et des clôtures...), chaque fois déclinées en une planche de BD conclue par un épilogue pédagogique. « Pour nous, c'est une façon de communiquer de façon sympa sur l'agriculture, sans être donneurs de leçon ni moralisateurs », assure Audrey Abba. Ecrit par les agriculteurs, le scénario de chaque planche est mis en image par Nicolas Julo, un illustrateur local qui s'est fait connaître pour ses bandes dessinées chartroussines. La première planche devrait sortir dans les prochains jours.
Lifting signalétique
Parallèlement à cette action pilote, l'association va financer, avec le soutien de l'Espace Belledonne et des fonds Leader, le tirage de dix photos issues d'un reportage professionnel réalisé en 2017, tirages destinés à organiser des expositions et à embellir les stands le cas échéant. Il est également prévu de revoir la signalétique pour les fermes du réseau, fabriquer des panneaux pour les nouveaux membres, éditer un nouveau dépliant et investir dans un barnum. Le logo de l'Adabel va lui aussi avoir droit à un lifting. Autant de petites touches destinées à donner un coup de jeune à l'image de l'Adabel. Et une meilleure visibilité à son action.
Marianne Boilève
(1) Pour motiver les troupes, chaque intervention est rémunérée à hauteur de 60 euros, la moitié financée par l'Adabel, l'autre par l'école.
Stratégies de reconquête
Retour sur une série de dynamiques animées par l'Adabel à travers le territoire de Belledonne.Après une première victoire - une parcelle regagnée sur la forêt et remise en prairie à Laval -, l'Adabel entend bien poursuivre sa stratégie de reconquête. En 2019, l'association compte faire évoluer la doctrine pour permettre à d'autres communes de suivre la voie tracée à Laval. « Comme pour les PAEN, il faut une volonté politique de la part de la commune, mais aussi que les agriculteurs s'emparent de la démarche », a prévenu Claudine Chassagne, vice-présidente en charge de l'agriculture et de la forêt du Grésivaudan lors de l'assemblée générale de l'Adabel le 8 avril.MéthodologieParmi les autres chantiers suivis par l'association, on retiendra la mise en place d'une méthodologie pour le suivi-évaluation du Paec de Belledonne, la mise en œuvre du programme d'actions « gisements fonciers » porté par le Grésivaudan et le lancement d'un nouvel appel à candidatures (avec des financements Leader) pour rouvrir des espaces embroussaillés ou boisés.Côté emploi, là aussi, l'heure est à l'offensive. Relancé en 2017, le groupement d'employeurs de Belledonne s'est appuyé sur AgriEmploi 38 pour embaucher une salariée à temps partiel. Après une période-test très fructueuse, le contrat s'est muté en CDI à temps plein en janvier 2018. Une expérience concluante qui a poussé l'Adabel à ouvrir un second poste (CDD de 5 mois pour l'instant). Il s'agit d'un emploi d'agent d'élevage polyvalent, partagé entre trois exploitations en volailles et bovin viande. « Nous ne proposons pas un temps plein pour l'instant, mais ça pourrait évoluer rapidement, indique Audrey Abba. Mais le problème, c'est de trouver le candidat. »Groupes d'échangesIl est aussi question de partage aussi avec le groupe lait qui a inspiré de nouvelles dynamiques territoriales. En effet, suite aux rencontres croisées de 2018, les producteurs laitiers de Belledonne ont éprouvé le besoin de monter un groupe lait afin d'échanger sur les questions techniques, d'organisation ou de transmission. De nouvelles rencontres sont prévues. Une première s'est déroulée en mars dernier à la ferme Truc-Vallet et une seconde est prévue à l'automne. Dans le sillage de cette initiative, un groupe végétal (maraîchage, petits fruits et plantes aromatiques) est en cours de structuration. Enfin, une réflexion sur le montage d'une Cuma est engagée dans la partie nord du massif.MBPour les informations sur le poste d'agent d'élevages en Belledonne, contacter Elise Embs (AgriEmploi38) au 06 34 14 24 55.