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Aménagement

La cohérence écologique implique les agriculteurs

Les schémas de cohérence écologique nécessitent des décisions locales au niveau communal ou intercommunal. Un dossier que suit de près le syndicalisme, en particulier la FDSEA, qui estime qu'économie et écologie sont totalement compatibles et indissociables.
La cohérence écologique implique les agriculteurs

A la fin de l'été 2012, la Région Rhône-Alpes et l'Etat lançaient dans tous les départements des consultations élargies pour l'élaboration du schéma régional de cohérence écologique. C'est dans ce cadre que sont apparus les premiers projets de corridors écologiques porteurs d'inquiétudes pour les agriculteurs. Pascal Denolly, président de la FDSEA, revient sur ce dossier sensible qui fait à nouveau l'actualité.

Pascal Denolly, il y a un an votre syndicat était mobilisé au sujet des corridors écologiques, qu'en est-il aujourd'hui ?

Tout d'abord, il faut rappeler le contexte : il y a un peu plus d'an, nous découvrions un peu par hasard les objectifs du conseil régional et de la Draaf lors de grandes consultations publiques. On nous expliquait alors que les lois Grenelle imposaient désormais de recenser tous les types de zonages environnementaux dans des cartes qui, à terme, s'imposeraient dans les documents d'urbanisme, Scot et PLU. Après l'épisode des zones humides, nous avons très vite vu venir les risques que ces nouveaux zonages pouvaient présenter pour les activités agricoles. C'est pour cette raison que nous avons rapidement réagi, avec la chambre d'agriculture, lorsque l'on nous a présenté les premiers projets de corridors écologiques dans la Bièvre.

Pourquoi parlez-vous de risques ?

Parce que c'est toujours pareil. En général, et ce fut le cas avec les zones vulnérables ou les zones humides, au départ on nous explique qu'il s'agit de simples zonages sans conséquences pour nos activités et puis, au fil du temps, on assiste à l'empilement de nouvelles réglementations et de nouvelles contraintes qui pénalisent l'économie agricole. D'autant plus que tous ces zonages intègrent le code de l'urbanisme et qu'une fois validés ils deviennent obligatoires. C'est pourquoi nous avons dit « stop ». Nous avons exprimé des positions très claires et très fermes sur le refus de toutes nouvelles contraintes et nous avons sillonné tout le département à l'automne dernier pour informer les agriculteurs, pour qu'ils suivent ce dossier auprès de leurs élus locaux et soient vigilants vis-à-vis de décisions communales qui pourraient figer de nouveaux zonages contraignants.

Avez-vous été entendus par les autorités régionales ?

C'est difficile à dire. Nos demandes ont été très claires et très détaillées. Nous avons exigé que les espaces agricoles soient officiellement reconnus comme des « continuum écologiques » et non pas comme des obstacles pour le développement de la biodiversité. C'est d'ailleurs ce terme de « continuum écologique » qui avait été utilisé pour qualifier les espaces agricoles dans une étude menée dans la Bièvre et qui nous était très favorable mais qui, bizarrement, a été quelque peu mise de côté. Nous avons donc exigé que toutes nos productions soient reconnues comme favorables à la biodiversité, sans exception. Il ne faut pas confondre la perméabilité écologique (nos cultures sont perméables) avec l'évolution des pratiques agricoles. Maintenant, la difficulté c'est que les autorités régionales mettent toutes les contributions sur un même pied d'égalité et la profession agricole est loin d'être majoritaire.

C'est-à-dire ?

Lors des réunions publiques, il y avait plus de 80 personnes à chaque fois avec une multitude de représentants des administrations, des collectivités et des associations environnementales en tout genre. La profession était donc sous représentée avec seules la FDSEA et la chambre d'agriculture. Je considère qu'il serait totalement anormal que des positions d'associations militantes pèsent autant que nos positions professionnelles qui sont, j'insiste, celles d'un secteur économique à part entière. J'espère donc que les autorités régionales feront la part des choses et prendront en compte les enjeux économiques. Mais à ce jour, je n'ai aucune garantie.

Quelles sont vos relations avec ces associations environnementalistes ?

Elles restent difficiles car nous avons du mal à communiquer sereinement, les agriculteurs ont le sentiment d'être en opposition permanente entre une approche économique et une approche idéologique. D'ailleurs, je trouve cette opposition déplacée car soit la politique environnementale est passéiste soit elle est « agricolo-compatible ». Mais il est inutile de rêver d'une nature où l'Homme bat en retraite. Or j'ai malheureusement le sentiment que c'est une approche majoritaire dans les courants environnementalistes. L'agriculture a beaucoup évolué depuis 50 ans mais la nature reste le partenaire numéro un de notre activité. Et nous composons avec elle tous les jours, même quand elle se déchaîne comme le 24 octobre dernier dans les Chambarans. Les environnementalistes doivent comprendre que nos relations seront meilleures quand ils auront intégré nos contraintes économiques. D'ailleurs, l'économie agricole ne s'arrête pas au seul cercle des agriculteurs, c'est toute une chaîne qui fait vivre nos territoires. Il vaudrait mieux travailler à la mise en œuvre de techniques sérieuses autour de l'agroécologie plutôt que d'ajouter toujours plus de contraintes et de réglementations qui freinent les initiatives et les investissements. Car notre l'agriculture a un grand besoin d'initiatives et d'investissements mais pour cela les exploitants doivent retrouver confiance.

Où en êtes-vous aujourd'hui de vos démarches sur les corridors écologiques ?

Nous savons que les communes et les intercommunalités doivent se prononcer avant fin novembre sur les zonages qui leur ont été transmis par la Région. Nous avons donc saisis tous les maires et les présidents d'intercommunalités pour les avertir des risques qu'ils feraient prendre à l'économie s'ils n'associaient pas les agriculteurs avant de délibérer. Nous avons insisté sur l'extrême importance de solliciter et de questionner « leurs » agriculteurs, en amont, sur la pertinence de ces zonages. Nous mettons la pression pour qu'aucune décision ne soit prise à la légère. Car vu  l'état  général de notre économie nationale et de nos finances publiques nous n'accepterons pas que des contraintes supplémentaires viennent encore pénaliser l'activité économique. Evidemment nous sommes favorables à la biodiversité, nous travaillons chaque jour avec elle et j'affirme que nous la connaissons très bien ! Mais nous n'acceptons pas que la protection de la biodiversité soit conçue au détriment des activités économiques agricoles. J'en appelle donc au sens des responsabilités de nos élus locaux.

Pour en savoir plus : 

- Incohérence écologique pour la FDSEA de l'Indre.