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Météorogie

La sécheresse menace les exploitations

Les cultures et l'élevage souffrent du manque d'eau en Isère et plus particulièrement dans la Bièvre.
La sécheresse menace les exploitations

La situation devient critique. Les prémices d'une catastrophe liée à une sécheresse commencent à se préciser.

Jacky Mange, éleveur de vaches allaitantes de race aubrac et salers à Pommier-de-Beaurepaire, en est persuadé.

« Nous connaissons un réel manque d'eau depuis le mois de juin, mais le déficit hydrique court déjà depuis juin 2016, soit presque un an et demi. Nous avons des terres plutôt limono-argileuses, elles tiennent bien le sec, mais faut-il encore qu'il pleuve de temps en temps. Nous avons eu 70 mm en août. Cela a été un coup de chance qui nous a permis de tenir un peu plus longtemps. Mais depuis cet été, nous n'avons plus d'eau "naturelle". Source, ruisseau, mares, tout est à sec. Le ru qui passe dans nos terres s'assèche complètement en général en août. Là, il n'y a plus une goutte depuis le mois de mai. Notre source a toujours coulé. C'est la première fois que je la vois sèche. »

 

Crédit : Chrystelle Challaye,CA38
Les sources et les ruisseaux qui coulent d'ordinaire dans la Bièvre mais également dans les Terres froides sont à sec depuis longtemps, obligeant les éleveurs à adopter des stratégies d'abreuvement et d'alimentation des bêtes au champ.

 

Le constat est accablant, alarmant. Et si Jacky Mange témoigne, ce n'est pas pour attirer particulièrement l'attention sur lui.

« Je suis connu pour échanger avec tout le monde. Et tous mes voisins, tous les éleveurs que je croise, sont dans le même cas.»

Alors beaucoup d'entre eux sont obligés de tirer l'eau publique et d'abreuver les bêtes au champ ou de les ramener à la stabulation pour les faire boire.

« Quand on charrie l'eau c'est du travail, mais surtout c'est un surcoût que l'on devra payer. Et au prix où sont la viande ou le lait, cela va déséquilibrer nos comptes, il n'en faut pas beaucoup », estime la plupart d'entre eux.

Réserves d'hiver

A Thodure, Jean-Michel Bouchard, responsable laitier à la FDSEA, dresse le même constat. C'est normal, son exploitation est aussi dans la Bièvre.

Cependant, le versant nord des Chambaran est plutôt une éponge locale. « Mais si l'eau ne tombe pas, l'éponge est sèche », constate-t-il. Lui aussi connaît des sources qui ont toujours coulé, désormais à sec.

Dans le Pays antonin, comme dans les Terres froides, même constat et les éleveurs doivent charrier de l'eau auprès des troupeaux pour les laisser dans les champs plutôt que de les avoir sous les bâtiments.

Parce qu'il y a le problème de l'abreuvement avec un coût supérieur, mais aussi celui de l'alimentation. Car pas d'eau induit forcément pas d'herbe. Les prés sont grillés, partout.

La rosée ou une pluie, quelques millimètres, donnent un peu de verdure mais vite rasée par les dents des animaux. Alors, les uns et les autres apportent du foin.

C'est le cas de Jacky Mange qui tape dans les réserves d'hiver, mais qui en a aussi acheté cet été, tandis que d'autres limitent les coûts en donnant de la paille. 

« Les stocks commencent à baisser, indique Jean-Michel Bouchart, ce n'est pas encore irrémédiable, mais la situation devient tendue. Il faudrait que le temps tourne rapidement à la pluie. » C'est pas gagné.

Beaucoup citent les anciens qui parlent des quatre temps et prédisent une absence d'eau significative jusqu'au mois de janvier. 

 

Jean-Marc Emprin

 

Semis compromis ?

Les semis d'automne sont bien partis à la faveur d'un automne sec... trop sec. Car s'il ne faut pas qu'il y ait trop d'humidité pour semer, il faut quand même suffisamment d'eau pour faire germer, puis démarrer la plante.
« Mes semis de céréales démarrent à la faveur de la rosée, mais crèvent... aussi sec », se désole Jacky Mange, agriculteur à Pommier-de-Beaurepaire.
Ce qui est inquiétant, « c'est l'absence de réserve d'eau. Les réserves sont alimentées par les pluies d'automne et la neige d'hiver, avance Jean-Michel Bouchard, de Thodure. Cette année, on commence à avancer dans la saison et cela ne vient pas. L'année 2018 pourrait en souffrir. »
JME