La seconde jeunesse des bergères

C'est l'un des rares chantiers de cette ampleur en France. Trois bergères et dix fauteuils à la reine, qui auraient été offerts à la famille Béranger, les châtelains de Sassenage, à l'occasion des noces de Louis XV, bénéficient aujourd'hui d'un travail de conservation hors du commun. Pour ce geste retrouvé, le tapissier Frédéric Durmort, qui a créé l'atelier Osiris à Quaix-en-Chartreuse, est lauréat 2014 du « Prix savoir-faire » qui récompense la virtuosité de cet artisan d'art. Spécialisé dans la restauration des sièges des XVIIIe et XIXe siècles, le tapissier d'ameublement a débuté cette rénovation il y a deux ans. Pour lui, ce prix récompense le travail qu'il mène depuis 10 ans et s'inscrit dans la mise en valeur d'un métier « perdu » tel que cette restauration lui a permis de retrouver.
« Je suis ému à chaque fois que je travaille sur ces sièges », confie-t-il. Il pose un regard respectueux sur les ébénistes, tapissiers et doreurs qui ont réalisé ces objets il y a 250 ans. « C'est une époque où tous les matériaux étaient fabriqués à la main. » Patiemment l'artisan d'art a inscrit ses gestes dans ceux de ses aînés. Avec les mêmes matières, il s'emploie à redonner leur éclat aux bergères et aux fauteuils de cet ensemble qui n'a jamais quitté le château de Sassenage. Au-delà de l'étoffe tâchée et déchirée, Frédéric Durmort a repris toutes les garnitures. Dessous : du lin, du chanvre, du crin animal. Dessus : un damas en soie cramoisie spécialement réalisé par la manufacture Prelle à Lyon. Le tapissier insiste sur la « pose précise et minutieuse, en simultané, de chaque pièce d'étoffe des trois bergères », comme sur la « confection de trois housses, soit 30 mètres de coutures à la main ! ». Le chantier de restauration, qui s'étale sur plusieurs années, bénéficie du soutien de la Fondation de France, du conseil régional et du conseil général.