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Législation du travail

« Le compte pénibilité a été simplifié »

Michel de Virville, rédacteur du rapport sur le compte de prévention de la pénibilité a accepté de répondre à quelques questions sur le compte pénibilité.

« Le compte pénibilité a été simplifié »

 Les facteurs qui entrent dans le compte pénibilité des salariés sont-ils faciles à appréhender par les employeurs ?

« On relève 10 facteurs de pénibilité qui peuvent se diviser en deux groupes. Une série de trois facteurs, faciles à expliquer : l'hyperbare, le travail de nuit et le travail en équipes successives dont une partie la nuit. Il en reste sept. Trois ne posent pas de problème : le bruit, la température et la répétitivité. La température se mesure aisément. Concernant le bruit, les entreprises ont pris des mesures pour les salariés depuis une dizaine d'années. La répétitivité a fait l'objet d'un important travail pour mesurer le nombre d'actions techniques à la minute. La plupart des patrons partagent eux-mêmes le métier, et savent le degré de répétitivité du travail réalisé. »

 

Un autre facteur de pénibilité, le seul de son espèce, concerne le risque chimique ?

« Il est à craindre que le sujet pose problème. Beaucoup d'entreprises ne sont pas conscientes du risque pour les personnes qui utilisent des produits de nettoyage, des lubrifiants, respirent la poussière d'usinage, la fumée de soudure... Des dispositifs de prévention existent. Ils font appel aux conditions pragmatiques d'utilisation mais ne concernent pas le dosage et les mesures dans l'air. Il est important de savoir si le salarié est en contact avec le produit et combien de temps. Par rapport à l'inhalation, il faut distinguer poussières lourdes, moyennes et légères. On sait par exemple que la poussière de bois est un cancérigène puissant. Il faut au minimum un système d'aspiration et parfois aussi des masques. »

 

La manutention, la posture et les vibrations sont trois facteurs qui sont difficiles à mesurer ?

« Ces trois facteurs, la manutention, la posture et les vibrations, posent une vraie difficulté aux employeurs. Quand quelqu'un travaille, on ne va pas enregistrer tout ce qu'il fait. Les petits génies du gouvernement, pour simplifier la vie des entreprises, se sont dits compliquons la vie des branches. Il leur est demandé de faire une cartographie des täches et de faire un référentiel avec les degrés d'exposition et de pénibilité des tâches effectuées. Sachant que les salariés sont souvent polyvalents, des fiches par poste de travail avec un pourcentage en fonction de son temps de travail, permettront aux employeurs de faire leur déclaration. »

 

Le compte pénibilité est perçu comme une complication administrative de plus par les agriculteurs. Qu'en pensez-vous ?

« Comme je vous l'ai dit, la procédure d'évaluation de la pénibilité a été simplifiée. L'idée d'une fiche de pénibilité a été abandonnée en juillet dernier. Les employeurs n'ont plus à procéder à une analyse individuelle et peuvent se reporter à des évaluations par postes, métiers et situations de travail définies par un accord de branche professionnelle. La demande des petites entreprises et particulièrement des agriculteurs employeurs a été entendue. L'objectif du compte pénibilité est surtout de faire de la prévention. Quand un agriculteur utilise un produit chimique, ce n'est pas sans impact sur l'environnement et sur lui-même. Il doit se protéger, le salarié aussi. Ma remarque à Xavier Beulin sur la distinction des vibrations entre “sol dur” et “sol mou” peut prêter à plaisanterie, mais cette réalité existe dans le monde de l'entreprise. Les entreprises ont fait une distinction de pénibilité entre un sol en ciment uni et un atelier rugueux. Les vibrations sont à considérer comme un facteur de pénibilité surtout sur terrain caillouteux. » 

 

A quelle étape en sommes-nous aujourd'hui ?

« Les branches réalisent un accord collectif qui sera homologué par le ministère du Travail. Le compte pénibilité s'appliquera à partir du 1er juillet (2). La première déclaration annuelle de l'employeur sur l'exposition de ses salariés interviendra le 1er janvier 2017. »

 

Propos recueillis par I.P

(1) Le compte pénibilité vise à permettre aux salariés ayant exercé des métiers pénibles de pouvoir se former, travailler à temps partiel ou partir plus tôt à la retraite en accumulant des points.

 

(2) La FNSEA et la CGPME ont réclamé, le 4 mars, “une année blanche” pour le compte pénibilité.

 

 

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