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Société

Le dialogue pour construire une ruralité meilleure

A quelle occupation des territoires peut-on s'attendre dans les années à venir. Le dialogue doit être tripartite si l'on en croit un débat qui s'est tenu à La Bâtie-Divisin au cours de la finale cantonale de labour.
Le dialogue pour construire une ruralité meilleure

A quel type de ruralité peut-on s'attendre dans les années à venir ? Cette question n'a, bien sûr, pas été résolue, mais était sous-jacente au débat qui s'est instauré à La Bâtie-Divisin, samedi dernier, sur les lieux de la finale cantonale de labour. Quelques élus locaux, Didier Villard, vice-président de la chambre d'agriculture, Françoise Soullier, présidente des JA, organisateurs de la finale de labour, étaient présents sous le chapiteau prévu pour la rencontre.

Paysans protégés ?

« Nous sommes devant de nouveaux virages, constate Didier Villard, où nous devons nous demander ce que la société attend de nous. Produire autrement en protégeant l'air, le paysage, les sols, l'eau ? Et les paysans, les protège-t-on ? » Car aujourd'hui, ceux-ci ont l'impression de crouler sous de nouvelles contraintes, en y répondant du mieux possible, sans que le reste de la société leur exprime beaucoup de reconnaissance, ni dans les faits, ni dans les prix. Dans le petit film projeté juste avant le débat, François Thabuis, ancien président de JA national rappelait que le métier d'agriculteur était de plus en plus choisi. « L'Europe nous accompagne financièrement dans certaines évolutions, reconnaît Didier Villard, mais elle nous demande également de nombreux comptes et beaucoup de paperasserie. Les JA sont mieux formés que les générations précédentes, mais ils passent de très longues heures dans leur bureau. Ce temps-là leur manque pour aller échanger avec leurs voisins. »

Question d'équilibre

Car le malaise ressenti dans les villages s'explique en grande partie par cette perte des échanges naturels entre voisins, entre habitants. « Il est nécessaire de réapprendre à discuter », affirme Didier Villard. La présence des agriculteurs, l'aménagement de l'espace dans une commune doit être le fruit d'un dialogue entre élus, agriculteurs et les consommateurs. « La question est de savoir comment trouver et maintenir un équilibre résume Thierry Clayet-Marel, maire de La Bâtie-Divisin. Dans un village, il faut une école, donc une population jeune qui se renouvelle. De même, pour maintenir la population, il faut 10 à 15% d'habitation en plus pour répondre aux décohabitations entre générations, aux divorces, et aux simples questions de confort. Il faut arriver à rendre cela compatible avec la présence agricole et la protection du foncier. »

L'élu local sait de quoi il parle puisque 10 hectares ont été rendus à l'agriculture dans le dernier PLU. Quelquefois, certaines décisions locales peuvent avoir des conséquences imprévues. Pendant la période 2001-2011, les documents d'urbanisme prévoyaient que 1 500 mètres carrés suffisaient pour construire. Mais dans la pratique, une parcelle en vente de 3000 m2 n'était jamais divisée et partait donc d'un bloc... Autant de perte pour la densité urbaine.

Refus d'une ferme à 1 000 vaches

« Nous avons l'impression d'être les derniers à tenir, avant la fin, rapporte Didier Villard. Nous avons l'impression que les gens attendent après nous pour dilapider le foncier. La transmission et l'installation ne sont pas acquis. »  Mais positif, le maire de la commune estime que « la réflexion aujourd'hui est plus globale et va dans le bon sens » et considère que le Scot et le PLU intercommunal donnent plus de hauteur aux perspectives d'aménagement. Quelques autres élus, présents sous le chapiteau, se montrent réticents à cette évolution et estiment que les derniers pouvoirs locaux vont disparaître au profit d'une technocratisation des décisions : l'aménagement local va être déconnecté des réalités locales et être pris de façon plus réglementaire, plus froide. « Le PLUI peut être un bon outil à condition qu'il soit bien partagé », avance Didier Villard, par ailleurs élu de sa commune, Torchefelon. Dernière question abordée, un peu sous forme d'anecdote : l'agriculture de demain sera-t-elle comparable à une multiplication de fermes des 1 000 vaches ? Ce n'est pas souhaitable affirme pour sa part l'élu consulaire car il suffirait de quelques unités de ce type pour remplacer la quasi-totalité de la production française. « C'est tout le contraire d'une agriculture à taille humaine, maîtresse de ses décisions, présente dans les territoires en permanence et impliquée dans la vie locale.» Une vision partagée par la plupart des élus présents, complètement convaincus lorsqu'ils ont appris que la ferme des 1 000 vaches est avant tout un projet financier basé sur la valorisation des effluents d'élevage, la production laitière devenant dans ce raisonnement un sous-produit de l'exploitation. Les échanges et le dialogue ont donc du bon.

Jean-Marc Emprin