Le loup sur la route des vacances
Diaporama de l'opération.

Les grosses berlines venues de toute l'Europe sont à l'arrêt. Ce samedi 8 juillet, les vacanciers seront en retard sur leur lieu de villégiature.
Une heure d'embouteillage au cœur du Trièves sur la RD1075 au niveau du village du Percy.
C'est le temps nécessaire pour faire passer un message : celui de la détresse des éleveurs qui réclament que cessent les massacres perprétrés par le loup sur leurs troupeaux.
A l'appel du syndicat d'élevage du Trièves et du syndicat ovin du Trièves, les agriculteurs se sont déplacés en force, mais aussi les chasseurs, les randonneurs et beaucoup d'élus locaux ceints de leurs écharpes tricolores.
« Le loup est un problème écologique, économique et humain ! », était-il écrit sur les tracts distribués aux automobilistes.
« Je n'ai pas de problème avec le loup »
Mais en cette chaude journée de juillet, l'accueil était mitigé de la part des piégés de la route.
« Les étrangers sont plus sympas que les Français », constate une tracteuse.
M. Bob en a « rien à f... du loup », tandis que M. Para, encourage les éleveurs à l'insurrection « allez manifester devant la préfecture, mettez le feu ! ».
Un autre déclare : « Je n'ai pas de problème avec le loup ». Une réflexion qui illustre l'état d'esprit de cet échantillon de la France sur la route des vacances.
« Il y a beaucoup d'indifférence, les gens ne se sentent pas concernés », constate Stéphane Rouillon, un habitant de Clelles qui a pris fait et cause pour les éleveurs.
Le gaillard a essuyé plusieurs bordées d'injures. Quand ce n'est pas l'intolérance qui surgit, c'est le désintéressement.
Les gendarmes veillent au grain. Interviennent lorsque ça devient un peu tendu en raison de l'attente qui échauffe les esprits. La confrontation peut être violente, à l'image de ces échanges très musclés avec des gens du voyage.
« Ce n'est pas ça élever des animaux »
Côté organisateurs, le but est atteint. La mobilisation est maximale et les tracts se distribuent copieusement.
« C'est un cri de détressse de la part des agriculteurs suite aux trop nombreuses attaques qui ont eu et qui auront lieu. Dans le Trièves et le Vercors, il ne se passe pas une semaine sans qu'il y ait une attaque et il s'en produit une par jour au national », explique Amandine Viale, la présidente du syndicat d'élevage.
Elle rappelle les revendications des éleveurs : le déclassement du loup du statut d'espèce protégée, des autorisations de tir sur une meute et non pas sur un seul loup, et des analyses de prélèvement faites par des laboratoires indépendants, afin de déterminer quel est le niveau d'hybridation de ces prédateurs.
L'éleveuse insiste sur le bien être-animal. « Voir ses bêtes se faire égorger, agonisantes, ce n'est pas ça élever des animaux ! »
Les éleveurs ont rendez-vous avec le préfet sous dix jours et demandent une rencontre avec le préfet de région.
« Ces animaux sont des hybrides »
Chez les élus du Trièves, la mobilisation est générale. Yann Souriau, le maire de Chichilianne et chef de file de la prise de conscience de l'incompatibilité du loup avec l'agropastoralisme, annonce que « les premiers résultats d'analyses génétiques indiquent que ces animaux sont des hybrides ».
Pour lés élus et les éleveurs, ce constat soulève énormément de questions quant à l'origine de ces loups.
Ils sont aussi exposés à l'émergence d'une nouvelle dangerosité. Au-delà des attaques sanglantes de troupeaux et des dizaines de milliers de bêtes perdues et indemnisables, des phénomènes colatéraux sont apparus tels que la dangerosité des patous qui font renoncer les randonneurs, de nouvelles responsabilités pour les élus et les éleveurs, des bêtes qui, devenues craintives après une attaque sont agressives, des loups qui rodent désormais aux abords des villages etc.
« C'est un problème de sécurité avéré, non anticipé et non pris en compte », dénonce Yann Souriau. Pour les élus, maires, conseillers départementaux, conseillers régionaux toutes tendances confondues, « la perte de contrôle est complète ».
Le maire de Chichilianne insiste : « L'administration est renvoyée à son incompétence à gérer cette question dans la réalité.»
« Des territoires de grande nature en péril »
« Tous les élus du territoire sont présents pour défendre nos agriculteurs et toute l'économie de nos montagnes », ajoute Marie-Claire Terrier, maire de Clelles et conseillère régionale.
« C'est un fait, l'économie de montagne est en train d'être détruite. Nous demandons une régulation du loup. Nous écoutons les agriculteurs qui sont en train de jeter l'éponge.»
Pour Michel Picot, maire de Lalley, la pression du loup « met en péril les perpectives économiques des territoires de grande nature ».
Les élus craignent la désaffection touristique qu'occasionneraient la fermeture des paysages et l'insécurité des chemins de randonnée.
« Nos amis et nos voisins »
« Les chasseurs sont solidaires des agriculteurs qui sont nos amis et nos voisins », affirme à son tour Sylvain Vizzutti, adminsitrateur de la Fédération de chasse de l'Isère. « Nous intervenons dès qu'il y a besoin de nous, quand la préfecture délivre des autorisations de tirs de prélèvement », rappelle-t-il.
« Les chasseurs sont directement concernés, poursuit-il. S'il n'y a plus de bergers dans les alpages, on assiste à une fermeture du mileu, à la prolifération des gibiers comme le sanglier, qui viennent ensuite provoquer des dégâts de cultures et l'on fait à nouveau appel aux chasseurs.»
« Zéro attaque »
« L'intérêt de cette manifestation est d'être transversale, note Pascal Denolly, le président de la FDSEA Isère. Et le syndicalisme ne peut être qu'en appui.»
Il rappelle la position du syndicat des exploitants agricoles : Si présence du loup il y a, il faut le maîtriser. C'est le « Zéro attaque » lancé par Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA.
« Nous retournons la question aux environnementalistes. Nous revendiquons le droit à la défense des troupeaux et non pas celui de seulement parquer les troupeau », ajoute-t-il.
Sébastien Poncet, président des JA Isère, souligne l'importance d'une solidarité « avec les collègues de montagne. Le loup, c'est l'affaire de tous. Il est important d'être présent aujourd'hui si on veut qu'il y ait encore de jeunes qui s'installent en montagne. Il faut leur donner un avenir.»