Le village qui voulait renouer avec son comice

Située dans le triangle Lyon-Vienne-Saint-Quentin-Fallavier, limitrophe du Rhône, la commune de Luzinay tient à son caractère rural. Ce village de 2 300 habitants aurait pu se transformer en ville dortoir, à la faveur de sa facilité d'accès aux autoroutes A7, A43, A46. Mais non, il a résisté. Il a évolué, grossi, s'est transformé, tout en parvenant à limiter l'étalement urbain et le mitage.
« Ne pas grandir trop vite », c'est la tâche à laquelle s'assignent le maire, Christophe Charles et son conseil municipal. D'autant que Luzinay fait partie de la communauté d'agglomération du Pays Viennois, forte de ses 18 communes et 70 000 habitants. Si la croissance de l'aire urbaine a été conséquente dans les années 90, elle se stabilise aujourd'hui. Le développement démographique se tourne davantage au sud de Vienne et le long de la vallée du Rhône. C'est une tendance conforme au Scot des Rives du Rhône qui affiche dans ses objectifs d' « orienter la croissance démographique et urbaine dans la vallée plus que sur les plateaux, au sud plus qu'au nord ». Les coteaux de Seyssuel en profitent pour se parer de vignes tandis que les villages baignés par la Sévenne, Villette-de-Vienne, Serpaize et Luzinay s'inscrivent dans un développement mesuré. C'est clairement les ambitions affichées du nouveau plan local d'urbanisme (PLU) de Luzinay, publié en juillet dernier. « Le projet de PLU favorisera un développement dans l'enveloppe urbaine existante, afin de (re)construire le bourg ou les hameaux », est-il mentionné.
« Nous souhaitons privilégier les commerces en centre bourg et non dans les zones d'activité », reprend le maire. Il accorde un intérêt tout particulier à la place du village, sur laquelle il entend attirer « de nouveau des habitants ». Le premier signe fort a été la réouverture du stationnement autour de la place pour éviter sa désertification. « C'est un lieu de rencontre et de convivialité », insiste Christophe Charles en regrettant « la disparition des fêtes de village et des bals populaires ». Reconquérir la place du village, relancer le vivre ensemble : l'organisation d'un comice, absent – faut-il le rappeler – depuis 51 ans de Luzinay, participe de cette nouvelle dynamique villageoise. « Je n'en ai jamais connu de ma vie », reconnaît l'élu. Il mesure l'importance « pour les populations nouvelles de Luzinay, de garder ses racines et le dialogue ».
Sentant la nécessité d'œuvrer pour le vivre ensemble, c'est donc la municipalité qui a initié le projet de comice. « S'installer dans un village comprend aussi des contraintes qu'il faut accepter », explique le maire. Pour créer du lien, il a mis en place des binômes au sein de l'équipe municipale entre anciens et nouveaux venus ainsi que des conseils d'habitants dans quatre quartiers du village.
Pourquoi pas nous ?
« Nous sommes à une quinzaine de kilomètres de Vienne et une trentaine de Lyon. Les trois-quarts de la population n'ont pas ou peu de connaissance du monde agricole. Ils n'ont qu'une vision du tracteur qui fait du bruit ou du pulvé », confirme Jean-Pierre Guillot, céréalier d'une trentaine d'années et cheville ouvrière du comice. « Nous profiterons de la venue des gens sur place pour les inviter à changer d'avis sur certaines pratiques. Nous avons prévu une exposition de matériel de Cuma pour leur expliquer ce que c'est. »
« Le comice agricole permet aussi de faire le lien », ajoute l'élu. « Ca a mis longtemps à démarrer, puis c'est parti d'un seul coup », s'enthousiasme Jean-Pierre Guillot. L'association constituée pour le comice rassemble un noyau dur d'agriculteurs. Il faut dire que Luzinay compte encore plus d'une vingtaine d'exploitants, dont beaucoup de jeunes. Le benjamin, Nicolas Guinet, 21 ans, est d'ailleurs le président du comice. Dans le secteur, la commune peut ainsi s'enorgueillir d'être celle qui compte le plus grand nombre d'agriculteurs. Toutes les productions sont représentées. « C'est assez dynamique. Certaines exploitations existent depuis plusieurs générations, d'autres sont des reprises ou des installations », décrit Jean-Pierre Guillot. Tous se connaissent car ils utilisent généralement des outils de travail collectif. Alors, pour le comice, tout le monde a mis la main à la pâte. L'objectif : « Attirer le maximum de personnes ». Le dernier comice de Saint-Pierre-de-Chandieu a connu une fréquentation d'environ 15 000 visiteurs. « Pourquoi pas nous, espère l'organisateur. Il y a beaucoup de monde dans le Pays Viennois, on relance un truc, on a fait une communication importante. » D'autant qu'en cas de succès, la manifestation est appelée à être renouvelée dans les communes de l'ancien canton de Vienne Nord qui se porteront volontaires. « Nous passeront le flambeau avec plaisir ».
Isabelle Doucet
Trois jours de comice
Le comice prendra place le long de la D36, impasse Pan perdu, sur un site de 5 ha, à l'entrée du village, depuis Saint-Just-Chaleyssin.Le 2 septembre, à partir de 19 heures, sur la place du village, dépôt de gerbe au monument aux morts, accueil de la délégation irlandaise, remise de la clé du village au président du comice et animations.
Le 3 septembre, impasse Pan perdu, à partir de 10 heures, marché des producteurs, repas sous chapiteau, animation à partir de 14 heures, exposition de bétails et présentation des éleveurs, démonstrations équestres et vieux métiers, animations. A 18 heures, remise des récompenses aux éleveurs, puis grande soirée et repas dansant.
La 4 septembre, messe en plein air à 9h30, concours de labour au lieu-dit Saint-Germain et Grand-Sauze, couronnement de la Reine (Alison Guinet) et de ses dauphines à 11 heures, repas et discours officiels à 12h30, corso fleuri dans les rues à 14 heures, résultats du concours de labour et classement des chars à 19 heures.