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interview

« Les agriculteurs doivent être pleinement associés au projet »

La loi du 23 février 2005 portant sur les territoires ruraux a instauré les périmètres de protection des espaces agricoles et naturels périurbains (PAEN). Alors que les premiers projets voient le jour en Isère, Pascal Denolly, le président de la FDSEA, donne les positions du syndicat majoritaire sur ce sujet.
« Les agriculteurs doivent être pleinement associés au projet »

Quelle est la position de la FDSEA sur ces nouveaux dispositifs de « PAEN » ?

L'objectif de la loi de 2005 était de créer des outils juridiques solides pour préserver durablement le foncier agricole dans les documents d'urbanisme. Nous partageons donc pleinement cet objectif, car nous constatons qu'en dépit des Scot et des PLU, la consommation de foncier agricole a continué fortement ces dernières années, puisqu'il disparaît encore plus 600 hectares par an dans notre département. Le problème maintenant c'est qu'entre l'esprit de la loi de 2005 et son application en 2013, il peut y avoir des écarts que nous n'accepterons pas.

C'est-à-dire ?

La loi de 2005 donne aux collectivités locales la maîtrise d'?uvre des PAEN. Concrètement, sur le premier projet départemental, dans la plaine de Voreppe, c'est donc le Conseil Général et les communautés d'agglomération de Grenoble et du Pays Voironnais qui ont enclenché le dispositif. Or, il est très clair pour moi que les agriculteurs doivent être pleinement associés dès le départ du projet. Non seulement le périmètre doit être décidé avec les agriculteurs mais surtout, le plus important, c'est que le contenu des actions menées à l'intérieur du périmètre soit décidé par la profession. Je mets les collectivités en garde sur le fait que la préservation du foncier agricole ne doit en aucun cas devenir un prétexte pour mener une sorte de politique agricole parallèle à celle de la profession ! Il faut respecter la démocratie, des élections ont eu récemment lieu et ont conféré à notre liste FDSEA-JA la majorité absolue pour mener une politique départementale.

Vous avez le sentiment que c'est le cas aujourd'hui ?

Oui, car pour commencer je pense que la profession n'a pas été suffisamment associée pour définir le périmètre. La chambre d'agriculture n'a été consultée qu'une fois le périmètre validé et seulement pour avis. Les communes se sont donc prononcées sur la seule proposition des collectivités. Ensuite, le PAEN implique un plan d'action avec des objectifs  pour les années à venir. Or, sur le contenu de ce plan d'action, je sens, du côté des collectivités locales, des velléités, si ce n'est d'imposer, du moins de fortement orienter l'agriculture dans le périmètre concerné. Et aussi, la volonté d'intégrer dans le PAEN des objectifs qui relèveraient davantage d'une politique de la ville, avec par exemple des aires de promenades ou des pistes cyclables, que de la véritable préservation du foncier agricole productif. C'est hors de question ! Je le dis très fermement.

Quelles sont maintenant  les prochaines étapes ?

Pour l'instant, les dix communes se sont uniquement prononcées sur le périmètre. Avant d'aller plus loin dans le contenu des actions, je souhaite que nous rencontrions, avec le président de la chambre d'agriculture, les élus du conseil général. Nous devons avoir publiquement des garanties sur nos demandes. Dans la Loire, par exemple, les agriculteurs sont très satisfaits de la mise en ?uvre des PAEN parce qu'ils en ont été eux même les auteurs. Il n'y a donc aucune raison de procéder différemment chez nous. Nous avons organisé plusieurs réunions avec les agriculteurs sur le terrain et le climat est très tendu, voire même explosif. Des garanties fermes doivent donc nous être données, sans ambigüité. Une fois ces garanties données, nous avancerons.

Dernier point, la loi confère au conseil général un droit de préemption à l'intérieur du PAEN, quelle est votre position sur ce point non négligeable en matière de gestion du foncier ?

Ma position est très claire : le PAEN doit proteger le foncier pour que l'agriculture soit securisée et que les agriculteurs puissent developper leurs projets.Or, le droit de préemption de la Safer s'applique exactement en ce sens sur ce territoire-là. Par conséquent, si les élus locaux veulent véritablement agir pour l'agriculture, ils respecteront notre demande que seule la Safer puisse intervenir, y compris à la demande du conseil général, en préemption dans le périmètre du PAEN. La Safer peut être parfois critiquée, mais elle reste pilotée par un comité technique composé d'agriculteurs et de représentants des collectivités. Nous l'avons déjà dit et nous le redemanderons au conseil général comme une condition indispensable de notre engagement.

Propos recueillis par LP