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Economie

Les entreprises inégales face à l'embellie

Alors que le BTP et le commerce de proximité continuent de payer le prix fort de la crise, l'agriculture ne s'en sort pas si mal.
Les entreprises inégales face à l'embellie

La crise ? Quelle crise ?  A ne regarder que les chiffres ou écouter certains experts, on pourrait presque croire que la crise est derrière nous. Si le nombre de faillites ou de procédures de redressement judiciaire a eu tendance à se tasser au niveau régional (-0,6% entre 2013 et 2014), la baisse semble bel et bien enrayée en Isère : fin 2014, le « taux de défaillance » a chuté de 10% par rapport à l'année précédente. Les banquiers constatent que la solvabilité des entreprises ne s'est pas dégradée et qu'il y a « plus d'affaire dans les tuyaux » par rapport à l'an dernier à la même époque, mais ne parlent pas pour autant de reprise marquée. « Il y a des opérations patrimoniales de restructuration pour améliorer le fonctionnement des entreprises, mais peu d'investissements », analyse Chritian Rouchon, directeur général du Crédit agicole sud Rhône-Alpes.

Les situations divergent selon les selon les secteurs. En agriculture, la baisse des prix est une réalité, mais les entreprises accusent assez bien le coup et le nombre de défaillances est relativement stable (une petite soixantaine de procédures de redressement ou de liquidation judiciaire chaque année depuis 2011. Une note de conjoncture de la MSA, parue fin janvier, annonce même que « l'emploi agricole rebondit au premier trimestre 2014, avec des indicateurs positifs, sauf dans le secteur tertiaire » (au niveau national). Il n'empêche, les trésoreries sont toujours très tendues.

Concurrence féroce

La conjoncture est bien plus difficile dans le BPT ou le commerce de proximité, qui paient le prix fort d'une crise au long court. Dans le bâtiment et les travaux publics (27 000 salariés en Isère), les PME font face à la concurrence féroce des grands groupes qui, eux mêmes en difficulté, se sont tournés vers des petits chantiers ou des marchés de proximité qu'ils négligeaient auparavant (aménagement de carrefour, enrobés, chantiers de voiries dans les villages...). Les analystes estiment néanmoins que les politiques publiques en faveur des travaux d'isolation et d'économies d'énergies dans les logements devraient apporter une bouffée d'oxygène à bon nombre d'entreprises.

Pour le commerce de proximité, la situation est plus délicate, car le secteur fait face à une « rupture de modèle » bien pire que celle provoquée par la grande distribution dans les années 70. Le transfert de l'activité commerciale vers Internet inflige une claque redoutable aux petits commerces, en ville comme en milieu rural. « Ce changement est encore plus terrible, car l'économie digitale est la moins concurrentielle qui soit », souligne Christian Rouchon. A moins que les consommateurs, qui se désolent de la désertification de leurs villages ou de leur centre-ville, se mettent à se poser les bonnes questions.

Marianne Boilève