Accès au contenu
Forêt

Les feuillus, un vrai potentiel insuffisamment organisé

Les feuillus, un vrai potentiel insuffisamment organisé

Quel avenir peut avoir la forêt du nord Isère ? Car si elle est bien présente au-dessus d'une ligne reliant Le Grand-Lemps à Vienne, elle est caractérisée par un « handicap » certain : c'est une forêt de feuillus. Et le feuillus, même si les gens trouvent ça beau et indispensable, c'est dans la nature et pas dans leur salle à manger sous forme de meubles. C'est sur cette vaste problématique que l'association Valfor qui regroupe des propriétaires forestiers du Nord-Isère s'est penchée lors de son assemblée générale il y a une quinzaine de jours.
« Valfor assure une présence permanente auprès des propriétaires forestiers depuis 1995 afin de les aider à valoriser leurs parcelles forestières », rappelle Bertrand de Germiny, son président. Depuis 20 ans, les choses ont bien évolué. Peu à peu, la qualité des bois s'améliore sous l'effet d'une meilleure gestion impulsée par les réglementations. Ainsi, « PEFC est incontournable car cette certification est de plus en plus demandée par les acheteurs, mais également parce que l'accès aux aides publiques en dépend », constate-t-il. Malgré tout, la sensibilisation à la bonne conduite des parcelles est indispensable. « Un peuplier non élagué perd la moitié de sa valeur, illustre le propriétaire forestier, et un merisier dont les branches basses meurent naturellement offre rapidement une entrée à la pourriture. » Alors des formations ou des prêts d'outils pour l'entretien font partie de la panoplie de services proposée par l'association aux divers propriétaires de parcelles forestières. L'association a également engendré une structure filiale : l'ASLGF (1) Nord-Isère. Celle-ci a grandi assez rapidement et regroupe 600 hectares et une quarantaine de propriétaires forestiers. Ils confient la gestion de leurs parcelles à l'ASLGF, « mais elle ne fait pas tout à leur place, elle les associe étroitement aux décisions », insiste Bertrand de Germiny. Car l'objet est bien de coordonner les interventions dans les parcelles afin de proposer un volume suffisant et un prix assorti aux prestataires potentiels.

Bertrand de Germiny, président de Valfor.

 Besoins locaux

Et c'est toujours dans cette veine d'organisation collective et mutualisée des biens forestiers que veut s'engager Valfor au travers du programme Leader Boucle du Rhône en Dauphiné. Ces fonds européens agrégés au co-financement locaux doivent favoriser le développement de l'économie locale. La filière bois pourrait bénéficier d'une meilleure structuration. « Il est nécessaire de raccourcir les circuits et de mieux valoriser le bois de notre territoire, estime le président de Valfor. La demande aval du secteur ne peut pas absorber la production locale de feuillus. Nous devons agir pour mieux organiser cela. Des charpentiers locaux recherchent du chêne par exemple. Il leur est difficile d'en trouver. Ce n'est pas normal. Nous allons réaliser un travail de collecte des besoins de l'aval et des possibilités de production de l'amont pour les mettre en adéquation. Nous devons aboutir à des circuits courts de gestion du bois. » Le peuplier, abondant dans le secteur, est utilisé en déroulage et non en ossature bois d'où une perte de valorisation. Là aussi, des rapprochements entre amont et aval doivent être mis en œuvre.
Le chemin va être long car la filière iséroise et surtout tournée vers le résineux comme le constate Gwenaelle Scolan, directrice de Créabois. Les feuillus sont essentiellement valorisés en bois énergie, donc avec une valeur ajoutée happée par les transformateurs. La charpente, les meubles n'offrent pas ou peu de débouchés, de toute façon insuffisants. Et le cercle est vicieux car on compte moins de dix scieries prêtes à travailler le feuillu. Ayant peu de débouchés, elles restent tournées vers l'amont, n'investissent pas et restent modestes en termes de main d'œuvre. Alors que les scieries plutôt tournées vers le résineux ont depuis plusieurs années beaucoup investi, fait progresser leur capacité de production et acquis un réel professionnalisme.

(1) Association syndicale libre de gestion forestière

 

Jean-Marc Emprin

 

Lyon-Turin, on fait comme si...

Le syndicat des propriétaires forestiers (l'Union de la forêt privé, UFP 38) s'appuie sur des groupements de propriétaires locaux pour suivre des sujets. Il en est ainsi du dossier de la ligne à grande vitesse Lyon-Turin, sur lequel Henri Greffie de Bellecombe passe beaucoup de temps. « La DUP date de trois ans et aucune décision n'et encore prise, résume-t-il, mais on fait comme si les travaux allaient se réaliser. » Un tiers de la surface foncière touchée par le tracé concerne des parcelles boisées, réparties entre le Rhône, l'Isère et la Savoie. « Les enjeux sont particuliers car la production forestière s'envisage sur plusieurs dizaines d'années. Il y aura donc un traitement spécifique. » Notamment, quand il y aura expropriation, un portage sera effectué pendant quinze ans, c'est-à-dire que les forêts continueront à être entretenues. Si les travaux n'étaient pas réalisés, il y aurait restitution aux propriétaires initiaux (destockage). La conservation des peuplements est donc nécessaire pour éviter un dommage patrimonial. Bruno de Quinsonas, président de l'UPF38 a souligné que les propriétaires forestiers avaient dû s'imposer pour se faire reconnaître comme interlocuteurs spécifiques auprès de la SNCF.
Le CRPF a pour mission d'inventorier dans les prochains mois l'ensemble des parcelles concernées.
JME