Les irrigants en ordre de bataille

« Les études de volumes prélevables arrivent à leur terme avec des conclusions contestables pour la plupart », lançait en préalable à l'assemblée générale des irrigants du département de l'Isère (Adi38), son président Franck Doucet, vendredi dernier à Moidieu-Détourbe. De fortes inquiétudes animent en effet la profession agricole (voir dossier Terre dauphinoise de la semaine dernière) au regard de l'évolution administrative de la gestion de l'eau.
« Nous avons observé en 2013 des ressources en eau avec des niveaux jamais atteints depuis les années 70 », poursuivait le président de la jeune association, en présence de près d'une centaine d'agriculteurs. Un seul mot d'ordre face à la menace d'une réduction des autorisations de prélèvement : la mobilisation. Ils ont été fortement encouragés en cela par les représentants de l'association des irrigants de la Vienne, venus dispenser leurs conseils et partager leur douloureuse expérience. « Vous devez vous mobiliser derrière vos responsables professionnels », a exhorté l'animateur de l'Adiv, les mettant en garde face au risque d'une gestion régionalisée. Il leur a fait quatre recommandations : communiquer, faire parler de soi, se défendre et proposer. Pas question pour les Isérois de concevoir des restrictions alors que les projets agricoles se multiplient. « Pour envisager la croissance aujourd'hui, il faut oser proposer des projets de développement de l'irrigation dès à présent », a martelé l'irrigant Jean-François Charpentier.
Solutions de substitution
Stockage et optimisation ont été présentés comme des axes de développement fort de la part des collègues irrigants viennois. A commencer par la substitution, c'est-à-dire la constitution de réserves bâchées pour pomper l'eau l'hiver et la réutiliser l'été en période d'irrigation, les forages habituels étant alors fermés. Dans le panel de l'amélioration de l'efficience et pour compléter les efforts réalisés par les agriculteurs déjà depuis de longues années, il existe désormais des systèmes de sondes capacitives qui mesurent l'humidité des sols et permettent de gérer les arrêts d'irrigation. Plus délicat à mettre en place, l'aménagement des assolements consiste par exemple à limiter le maïs consommation au profit du blé dur... Répondant à une question de la salle quant à la gestion des besoins des différentes filières agricoles de façon à éviter les rivalités, les irrigants viennois ont rappelé que c'est le poids de leur association qui leur permet de négocier les dérogations pour les cultures à forte valeur ajoutée.
Eviter le piège
La chambre d'agriculture de l'Isère a réaffirmé sa volonté d'accompagner les irrigants dans leur démarche. Sa désignation comme organisme unique de gestion lui permettra de garder la main sur la répartition des volumes, mais son président Jean-Claude Darlet, qui attend encore beaucoup de réponses de la part de l'Administration, s'est montré déterminé quant à son refus de voir des secteurs passer en zone de répartition des eaux, qui caractérise les territoires où la ressource est déficitaire. Un classement absurde dans une zone où « la réserve est colossale », comme le rappelait Pascal Denolly, le président de la FDSEA. « Ne pas se laisser empiéger », tel était son mot d'ordre aux côtés de l'Adi et de la chambre d'agriculture. « La question ne devrait pas se poser en Isère, alors ne cherchons pas à nous éparpiller, mais à nous regrouper ». Tous les représentants de la profession souhaiteraient en effet voir l'ensemble les irrigants de l'Isère, et non pas la moitié comme c'est le cas aujourd'hui, adhérer à l'Adi et peser derrière les responsables. De plus, la défense de l'intérêt commun, représente un coût, notamment pour le financement des contre-études et passe donc par l'adhésion de tous les irrigants à l'Adi38.
Isabelle Doucet
Investissements /
Chères réserves
La solution de substitution la plus rapide à mettre en œuvre est sans doute la réserve d'eau. Mais attention, ces équipements représentent un investissement important : de 7 à 8 euros par m3 stocké pour un dispositif inférieur à 100 000 m3 et de 4 à 5 euros par m3 stocké au-delà de 200 000 m3, la géomembrane représentant 30% de l'enveloppe financière. En coût de fonctionnement, il faut compter moins de 10 centimes par m3 et par an. De plus, la réserve est grande consommatrice d'espace. Par exemple, dans la Vienne, le dernier projet en cours nécessite plus de 7 hectares pour une réserve de 370 000 m3. Pour 600 000 m3 de stockage, il faudrait consacrer entre 10 et 12 hectares...
Salon national de l'irrigation
Organisée par Aquanide, la biennale de l'irrigation se déroulera du 23 au 27 septembre 2014 près de Mauzé-sur-le-Mignon dans les Deux-Sèvres.