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Syndicalisme

Les JA veulent aller vite

En mettant en oeuvre un dispositif expérimental destiné à anticiper et organiser les transmissions d'exploitation, appelé Fast, les jeunes agriculteurs d'Isère, Savoie et Haute-Savoie veulent endiguer la chute prévisible du nombre d'exploitations.
Les JA veulent aller vite

Ce n'est pas qu'une préoccupation de jeunes, mais ce sont eux qui s'y collent. La transmission des exploitations a été au cœur des débats de l'assemblée générale des Jeunes Agriculteurs de l'Isère, le 15 mars à Saint-Joseph-de-Rivière.
Animateur de la table ronde organisée pour l'occasion, Aurélien Clavel, éleveur mais aussi membre du bureau national des JA, le rappelle comme une évidence : « il n'y aura pas de renouvellement s'il n'y a pas de transmission. » En la matière, la profession se trouve désormais devant une urgence. A peine deux agriculteurs sur trois sont remplacés, alors qu'un tiers des exploitants s'arrêteront d'ici cinq ans. Le mouvement s'accélère. « Il y a un enjeu de vitalité des territoires, insiste-t-il, surtout pour les zones difficiles, et un enjeu social, car la présence d'agriculteurs crée un lien, un tissu économique et humain de base dans les territoires. »

Attractivité

Parmi les témoins invités à la table ronde, Gérald Gandy, co-président de la coopérative des Entremonts, indique qu'en « reprenant en gestion directe le volume de ses adhérents, l'idée de la coopérative était bien de mieux valoriser les litrages produits, et donc d'atteindre rapidement 500 euros les mille litres. Augmenter le prix du lait, c'est redevenir attractif. » La logique est parfaite, mais François Chamot, des JA 74, tempère un peu l'enthousiasme. « En Haute-Savoie, les 500 euros sont atteints depuis longtemps, la filière est attractive, mais les jeunes restent toujours peu nombreux dans les projets de reprise. »

Fonctionnel et reprenable

Alors une idée est née chez les JA des trois départements alpins, Savoie, Haute-Savoie et Isère. « On doit mutualiser nos forces autour de l'idée de la transmission, explique François Chamot. Les organisations professionnelles agricoles (OPA) doivent unir leur énergie pour accompagner de manière concertée les cédants et les repreneurs. Mais sensibiliser les cédants est plutôt difficile et doit se faire suffisamment tôt. Nous avons pensé à nous appuyer sur la MSA afin de bâtir avec elle un dispositif d'allègement des cotisations quand le cédant est dans une démarche de préparation à la transmission. » L'idée est séduisante. Elle « évite d'assister à des achats de matériels en fin de carrière seulement motivés par l'idée de défiscaliser, alors qu'ils ne serviront peut-être pas après la transmission. » Cela augmente aussi la valeur de l'exploitation alors que les reprises s'appuyant de plus en plus sur des hors cadres familiaux, ceux-ci peuvent avoir du mal à les financer. « Il faut que l'outil soit fonctionnel et reprenable et qu'il ne soit pas une petite bombe économique », résume François Chamot.

Expérimentation

Ce dispositif dénommé Fast, pour Fonds d'aides à la succession et à la transmission, va être expérimenté dans la zone de la caisse interdépartementale de la MSA Alpes du Nord. Les trois syndicats de jeunes agriculteurs concernés, les DDT vont être impliqués. « Nous allons mettre en place dix dossiers par département afin d'avoir une diversité de situations. Si l'expérience est concluante elle pourra être reproduite au niveau national. » Les collectivités locales, communautés de communes et établissements publics de coopération intercommunale seront dans la boucle parce que la démarche a une dimension territoriale, mais aussi les coopératives car le renouvellement de leurs membres est nécessaire pour assurer leur pérennité. Sylvain Francillon, président de l'Association des agriculteurs de Chartreuse, soutient cette idée et la démarche entreprise par la coopérative des Entremonts de valorisation du lait standard. « Il ne faut pas faire croire que tout passera par les circuits courts et la vente directe. On a besoin de tout le monde », estime-t-il. Gérald Gandy insiste sur l'aspect « vivable des reprises » qui doivent conserver une qualité de vie regroupant une vie sociale, familiale nécessaire afin de susciter l'envie de reprendre et de rester dans l'exploitation. Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l'Isère souhaite pour sa part « étendre la réflexion à des exploitations de taille plus importante, qu'elles soient en lait ou en grandes cultures ». Et prendre en compte le volet emploi car « l'agrandissement n'apporte rien en termes humains, tandis que l'existence d'Agri-emploi ou des services de remplacement préparent les futurs repreneurs. Quand on a 300 000 euros à transmettre ou à reprendre, ces expériences favorisent l'instauration d'une indispensable confiance. »

Jean-Marc Emprin