C'est l'histoire d'une famille qui fait découvrir l'histoire d'un territoire. La famille Saviné, qui a vécu en Belledonne nord (d'Arvillard en Savoie, jusqu'à La-Ferrière en Isère), de 1821 à 1904 et dont les différents membres qui se sont succéder sur plusieurs générations travaillaient dans la sidérurgie et la métallurgie. « La vie de cette famille fictive - le nom des Saviné provient de la contraction entre Savoie et Dauphiné - est retranscrite au travers d'une bande dessinée qui permet de découvrir l'ensemble du processus sidérurgique utilisé jusqu'à la fin du XIXème siècle, qu'il s'agisse de l'extraction du minerai de fer dans les mines, la production du charbon de bois, le grillage du minerai dans les fours à griller ou la fabrication du fer et de la fonte », explique Claude Selva, trésorier de l'association Arvill'art. Cette bande dessinée est l'un des supports qu'a mis en œuvre et qu'utilise le réseau naissant des « Chemins du fer et de l'eau en Belledonne » pour faire découvrir cette histoire de l'archéologie minière.

Sept sentiers thématiques

Mais ce n'est pas le seul. Des totems disposant d'une charte graphique commune, des bornes interactives, des panneaux d'interprétation et des livrets de découverte ont aussi été créés et sont désormais présents sur les différents sites qui composent ce réseau, afin de les mettre en valeur et de permettre à la population locale, aux communes et aux visiteurs de bénéficier d'un outil de compréhension de ce patrimoine local.

Car les infrastructures de production et de transformation du minerai ont laissé de nombreux vestiges (mines, centrales hydrauliques, forges, conduites forcées, fours à griller) aujourd’hui partiellement valorisés, sur quelques sites assez éloignés les uns des autres. Le réseau des « Chemins de l’eau et du Fer en Belledonne » tente de refaire vivre des liens qui existaient par le passé, en créant des liaisons entre les sites actuels. Aujourd'hui, ce réseau rassemble, dans deux départements (l'Isère et la Savoie), sept sentiers thématiques pédestres, jalonnés de panneaux et de jeux pour les enfants, trois espaces muséographiques, mais aussi huit communes, des associations et un conseil scientifique. « Cette initiative aurait pu avoir la forme d'une route culturelle, elle a eu celle d'un réseau d'acteurs, concernés par un territoire et des thématiques communes et partagées », précise Valérie Lecorre, agent de développement à l'association Bien vivre en Val Gelon.

Arrêt sur image

Si l'approche se veut ludique et accessible, toute la documentation préparée par le réseau repose sur des données précises locales relevées par des historiens locaux et le conseil scientifique de Saint-Georges-d'Hurtières, grâce à de nombreuses archives. Aucune généralité de l'époque n'est reprise. Et Annayk Toulouse, responsable du service environnement à la commune de Saint-Pierre-d'Allevard, de donner quelques exemples : « dans la bande dessinée des Saviné, les vêtements sont ceux portés à l'époque dans le secteur. Et les personnages utilisent, à la place de la commune lampe à pétrole de l'époque, des coupelles remplies d'huile de noix. Ces détails permettent de concrétiser le réalisme de l'information que nous dispensons ». Et pour que la connaissance de l'activité sidérurgique de Belledonne soit complète, les membres du réseau ont aussi souhaité faire un arrêt sur image de l'activité d'aujourd'hui. Car certains sites, tels que les sociétés Leborgne Fiskars à Arvillard, Winoa au Cheylas, ou l'aménagement hydro-électrique du Bréda, né à la fin du XIXème siècle, sont toujours en activité. Pour faire accéder le public à l'intérieur du décor de ces sites, des bornes interactives installées dans les musées du réseau diffusent des films qui présentent le travail de ces entreprises.

Programme Leader

La mise en réseau de ces acteurs du fer et de l'eau en Belledonne n'est pas terminé. Satisfaits de l'initiative, les partenaires de la première heure ne demandent qu'à ce que le réseau s'enrichisse. Comme l'explique Annayk Toulouse : « il est impossible pour un seul acteur, qu'il s'agisse d'une association ou d'une commune, de sauver le patrimoine. En revanche, grâce à ce réseau qui rassemble des sites ou des structures qui partagent le même filon, la même généalogie, nous avons réussi à créer un projet cohérent à l'échelle du massif. Cela nous donne aussi accès à des subventions européennes (via le programme Leader) intéressantes ». D'autres projets sont prévus pour la prochaine programmation Leader. En plus de nouvelles restaurations de site, le réseau prévoit la création d’un recueil des bandes dessinées de la saga des Saviné, la mise en place d’un nouveau sentier sonore à La Ferrière, la promotion des sentiers et des sites, la formation de guides-accompagnateurs pour qu'ils s'approprient l'histoire des lieux et la communique aux visiteurs, l'organisation d'animations et de journées à thème... et le développement du thème de l'eau. Si beaucoup a été réalisé, il reste donc encore beaucoup à faire pour ce réseau qui n'aspire qu'à se faire connaître.

Isabelle Brenguier

Les acteurs du réseau des « Chemins du fer et de l'eau en Belledonne »