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Gestion forestière

Les vieux taillis pour le bois énergie

Ne pas tout passer en plaquettes, c'est le cri que pousse certains professionnels de la forêt. Autrement dit, chaque bois doit être utilisé pour son vrai potentiel.
Les vieux taillis pour le bois énergie

Quand on ne peut rien faire d'autre, on fait du bois énergie. C'est le message que veulent faire passer certains professionnels de la filière forestière car ils craignent une future concurrence à terme entre les différentes utilisations de la ressource bois. « Ici, sur ce chantier entre Plan et Saint-Paul-d'Izeau, le taillis de châtaignier a dû être oublié au moins lors des deux dernières coupes, constate Rémi Mallein, technicien du service forêt de la chambre d'agriculture de l'Isère. Normalement, ce genre de taillis est coupé tous les 20 à 25 ans. Ils sont situés sur des sols peu favorables à de beaux fûts et ont toujours été menés de cette façon. Mais alors qu'à 25 ans on peut les valoriser en piquets, à la taille où ils sont aujourd'hui, ils ne valent pas grand chose. Ils sont trop gros et même souvent victime de roulure. Il est donc logique de les passer en bois énergie », autrement dit en plaquettes pour le chauffage dans les chaufferies collectives.

 

                 S'ils ne sont pas coupés tous les 25 ans, les taillis de châtaigniers deviennent gros et sujets à la roulure. La seule issue : le broyage en plaquettes.

« L'intérêt, c'est que nous allons, à partir de là, pouvoir repartir sur une rotation normale. Dans 25 ans, ils feront de beaux piquets ou du bois bûche, tandis qu'aujourd'hui on les utilise pour le seul potentiel qu'ils ont ». Cependant l'exploitant, Roland Dussauge fera faire un tri entre les différentes qualités que l'on pourra quand même trouver, essentiellement entre bois bûches et plaquette.

Orfèvre

Ce travail de reconquête, Rémi Mallein a dû le mener avec beaucoup de patience : la surface en chantier ne couvre que 3,5 hectares mais répartis entre sept propriétaires et neuf parcelles. Un travail d'orfèvre car il a fallu les retrouver tous, les convaincre de l'intérêt du chantier et obtenir leur accord. La zone, en certains endroits très en pente, semblait inaccessible et le travail insurmontable aux propriétaires individuels. Mais bien coordonné, et surtout par temps sec, l'ouvrage est réalisable. C'est Olivier Breymand, possesseur d'une abatteuse qui s'est chargé de l'opération. L'engin de 37 tonnes semble pouvoir passer partout, « ou au moins jusqu'à une pente de 50%, selon son propriétaire, au-delà on commence à serrer les f... » La limite, c'est quand l'assiette de la cabine, même corrigée à fond continue de pencher vers l'avant. Mais l'homme n'est pas fou. Il connaît les limites. Et il travaille avec passion.

L'abatteuse spécialisée en feuillus peut évoluer dans de fortes pentes. Elle abat sans ébrancher.              L'abatteuse peut exploiter des parcelles jusqu'à 50% de pente. La correction de l'assiette de la cabine est ici commandée par le conducteur.             La tête scieuse est épaisse de 6 cm et attaque le bois par sa seule inertie.   

Taillis et chênes, la bonne association

« J'ai vu un fût très beau, je l'ai laissé », avoue-t-il à Rémi Mallein lors d'une visite de chantier. C'est vrai que le chêne en question présente un port, une rectitude exemplaire. « Le propriétaire a dit de tout abattre, mais je crois qu'Olivier a eu raison de le laisser. Les petits-enfants du propriétaire nous remercieront », s'amuse le technicien forestier. Le mélange local de taillis de châtaigniers et de chêne est intéressant.

 

Taillis de châtaigniers et chênes sont complémentaires, les premiers permettant aux seconds de pousser droit et sans branches basses.

« Les deux essences sont complémentaires, précise-t-il. Les taillis évitent que le chêne fasse des branches le long de son tronc. On arrive ainsi à des longueurs de fûts intéressantes. Bien sûr, quand on coupe le taillis, les chênes vont produire des gourmands en raison de la lumière soudaine, mais ils disparaîtront avec la repousse des taillis. C'est un bon partenariat entre les deux espèces au profit du propriétaire ».

Jean-Marc Emprin