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LAIT

Mettre de la concurrence entre producteurs et collecteurs

La section régionale laitière Auvergne-Rhône-Alpes a tenu son séminaire, jeudi 20 février à Satillieu (Ardèche), centré sur le renforcement des liens entre syndicalisme agricole et organisation de producteurs.

Mettre de la concurrence entre producteurs et collecteurs
Une trentaine d’élus et représentants d’organisations de producteurs laitiers de la région Auvergne-Rhône-Alpes ont participé au séminaire. ©AAA_AL

Dans un contexte où la demande mondiale en produits laitiers ne cesse d’augmenter et où le cheptel français décroît progressivement, le lait devient une ressource amenée à se raréfier. Dans ce contexte, la rémunération des producteurs de lait reste quant à elle toujours insuffisante. « Nous n’avons pas à rougir de ce que nous faisons, mais si nous voulons garder une dynamique laitière, nous devons arriver à faire en sorte que 100 % des exploitations laitières soient rémunérées à hauteur de deux Smic en 2025 et 2026 », a averti Stéphane Joandel, président de la section régionale laitière de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes et éleveur laitier dans la Loire. Pour rehausser la valeur de la production et muscler le rapport de force face aux laiteries, une idée fait son chemin : « mettre de la concurrence entre producteurs et collecteurs. C’est un pari qui n’est pas simple, qui demande de reprendre en main nos collectes et la vente de lait avec une logique de territoire, prendre le risque de le commercialiser et ne plus déléguer comme cela se fait aujourd’hui ».

Lever les verrous

Cette mise en concurrence avec les collecteurs se confronte à « des verrous juridiques à lever », a expliqué Stéphane Joandel, à commencer par celui de la contractualisation obligatoire de la filière laitière fixée à 5 ans depuis janvier 2024. « Les producteurs français sont frileux et se questionnent plus sur la collecte de leur lait que le prix. Ils se sont dirigés vers des contrats de long terme, mais plus les contrats sont longs, moins nous aurons de prix car les transformateurs sont sûrs d’avoir la matière derrière. Nous devons asseoir notre position pour peser davantage sur les négociations », a-t-il dit. La révision de l’obligation d’apport total – actuellement imposée par le Code rural – offrirait aux organisations de producteurs, dans le cadre d’une concertation avec leurs membres, la possibilité de choisir un régime d’apport plus flexible, permettant ainsi de diversifier la collecte et la commercialisation du lait (par exemple en multipliant les débouchés auprès de plusieurs acheteurs). « Un élément fondamental pour se structurer selon leurs opportunités de débouchés et leur territoire », a indiqué Benoît Gavelle, secrétaire général adjoint de la FNPL, président de la section laitière de la FNSEA et éleveur laitier en Normandie. Et d’ajouter : « Il faut remettre sur le devant de la scène les contrats entre OP et industriels, avoir des OP qui gèrent des volumes et un contrat qui prévaut sur un contrat individuel pour éviter des situations comme celle de Lactalis. »

Fixer une ligne claire et commune

Sur le renforcement de la position des OP, « le syndicalisme majoritaire doit commander en tant que force d’idée », a indiqué Stéphane Joandel, qui encourage l’intégration de représentants syndicaux dans ces structures. « Même si l’idée est que les OP décident leurs propres choix stratégiques selon la volonté des éleveurs sur leur territoire, nous avons besoin d’une ligne claire et commune pour avancer et leur redonner du poids », a ajouté Benoît Gavelle. Un décryptage juridique et lexical du fonctionnement des OP a été exposé durant le séminaire par Audrey Crochet, responsable juridique à la FNPL afin que leurs représentants puissent évaluer les avantages, les inconvénients et les conditions de mise en œuvre des différents outils stratégiques existants. L’ambition est de favoriser l’adhésion des producteurs laitiers en apportant une meilleure reconnaissance des OP sans pour autant les mettre en concurrence, savoir comment les armer techniquement, juridiquement et économiquement face aux laiteries industrielles, comment reprendre en main la gestion des volumes, la facturation… Un vaste chantier collectif visant à redonner à la production laitière toute sa place.

A.L.