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Etats généraux de l'alimentation

Qu'avons-nous fait de nos valeurs ?

A Villemorieu, sur l'invitation de la députée Cendra Motin, les acteurs économiques de la filière agricole du territoire ont discuté à bâtons rompus autour des sept thèmes proposés dans le cadre des Etats généraux de l'alimentation.
Qu'avons-nous fait de nos valeurs ?

En moins de deux, la question des produits phytosanitaires était posée.

« Nous utilisons des produits homologués, nous ne les mettons pas n'importe comment. Nous appliquons des doses en dessous de ce qui est prescrit par les laboratoires », lance Georges Dechanoz, exploitant à Saint-Romain-de-Jalionas.

Pour les agriculteurs, la contamination des sols est un héritage de pratiques déjà datées. « Il y a 30 ans, on s'occupait à 70% de l'efficacité des produits, aujourd'hui on s'occupe à 70% de leur toxicité », ajoute un autre agriculteur.

Il pose la question de l'alternative. « Dans la nature aussi, il y a des produits hautement toxiques et on risque de voir le retour de maladies oubliées sur les céréales. »

François Cholat, dirigeant de l'entreprise éponyme de Morestel, insiste sur le fait que  « les produits de biocontrôle ne sont pas aussi efficaces que les autres et qu'il y a de grosses pertes de rendement. »

 

 

Il précise que si les industries ont vu leur chiffre d'affaires en pesticides augmenter, cela ne signifie pas qu'il y a une augmentation des ventes de pesticides, mais que les produits vendus sont plus chers en raison des efforts réalisés en recherche et développement.

« Les agriculteurs utilisent des produits car ils leur permettent de résoudre les problèmes », rappelle Yvan Gautronneau, ex-enseignant chercheur à L'Isara Lyon.

Interpelé sur les pratiques agricoles, il oppose le coût d'un déchaumage mécanique à celui d'un déchaumage chimique, sans être certain du gain en matière d'empreinte écologique. Il indique également que le bio « n'est pas généralisable car il n'y a pas suffisamment de consommateurs prêts à en payer le prix ».

Un état des lieux

Alors si les agriculteurs admettent que le système actuel semble arrivé au bout, les alternatives ont du mal à émerger.

Yves François, de la Cuma de Faverges, se désole que l'agroécologie ne soit pas davantage suivie.

« Qu'avons-nous fait de nos valeurs ? s'interroge un participant. Il y a un gros travail de pédagogie à refaire. »

Jérôme Crozat, premier secrétaire de la FDSEA acquièsce. « Il est facile de taper sur 600 000 agriculteurs, mais pas sur 30 à 40 grosses industries alimentaires », dont il doute fortement de la qualité des produits transformés. « L'agroalimentaire est allée trop loin », lance-t-il.

Yvan Gautronneau, fait valoir les circuits intermédiaires, ceux dont on ne parle jamais. « Il ne faut pas avoir une vision binaire, mais multiple. »

Justement, Stéphane Carrel, transformateur à Hières-sur-Amby, l'assure : « On a tous évolué et on n'a jamais mangé aussi sainement qu'aujourd'hui. »

Le problème réside peut-être dans cette coupure entre les producteurs et les transformateurs, qui souvent, ne se connaissent plus. « Pour vendre de la marchandise, il faut avoir un fournisseur qui puisse répondre 52 semaines par an. Pour cela, il faudrait faire un état des lieux. » 

 

 

Si beaucoup s'accordent à reconnaître que l'origine n'est pas forcément un critère de qualité, les collecteurs comme La Dauphinoise et la Maison Cholat, soulignent les initiatives comme Passion Céréales destinées à mieux faire connaître les productions de la région.
De son côté, Philippe Allagnat, agriculteur en AB et maire de Saint-Sorlin-de-Morestel se félicite que les cantines scolaires du secteur soient passées avec un opérateur en circuit court. Une question d'organisation.

Peut-être est-ce un moyen de réussir la transition écologique et solidaire qu'encouragent les Etats généraux de l'alimentation.

Les agricutleurs savent aussi que l'avenir de l'agriculture française, seule garantie face aux produits importés, passe par le renouvellement des générations. C'est également la mutualisation des moyens et des compétences pour une agriculture durable, la recherche sur des variétés adaptées aux critères qualitatifs et non plus seulement basées sur le rendement et surtout, l'amélioration de la communication entre producteurs et consommateurs. 

Isabelle Doucet