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Spectacle

Quatre destins de la « Grande Guerre »

Les Historiales de Pressins mettent en scène cet été l'histoire de quatre frères d'un village du Dauphiné qui ont vécu la guerre de 1914-1918.
Quatre destins de la « Grande Guerre »
« Ils étaient quatre frères : Alphonse, Pierre, Clément, Louis. On les appelait « les frères Joseph », du nom de leur père, Joseph Trilloux, agriculteur dans un village du Dauphiné. De la « Grande guerre », deux ne reviendront pas, le troisième en restera marqué à jamais. Seul, le quatrième s'en sortira grâce à l'appui de sa femme et de sa famille », résument les organisateurs des Historiales. L'histoire des frères Joseph est semblable à celles de nombreuses familles françaises durant la guerre de 1914-1918. Elle est mise en scène au sein des Historiales de Pressins, un festival de spectacles historiques, pour inaugurer le centenaire de la guerre qui aura lieu l'année prochaine.

Deux décors distincts

« Si les témoignages oraux se font de plus en plus rares, les écrits racontant l'enfer de la Grande guerre ne manquent pas », précise Serge Revel, écrivain et metteur en scène des Historiales. Anciens témoignages, lettres et autres documents, constituent un vivier d'informations permettant des reconstitutions relativement fidèles de cette époque. Le texte des frères Joseph s'appuie donc sur une histoire vraie et de nombreuses recherches historiques sur la vie des poilus. Pour la mettre en scène, il a nécessité la préparation de deux décors distincts. D'abord, une reconstitution du village de la famille Trilloux, avec la ferme, l'école, la mairie, le café, la forge. Et un peu plus loin, le front où 100 mètres de tranchées ont été creusées. Deux scènes pour vivre les deux volets de la guerre : celui des familles qui attendent ceux qui sont partis combattre, mais qui doivent continuer leur quotidien, et celui des poilus, qui vivent dans la boue, les odeurs insupportables des cadavres et le vacarme des bombardements.

Une grande famille

La préparation de ce son et lumière historique mobilise, entre les acteurs, les équipes chargées du décor, des peintures et des trompe-l'�"il, de l'électricité, des artifices, du son, des costumes, et de la communication, plus de 200 bénévoles du canton de Pont-de-Beauvoisin et de ses environs, qui ont travaillé plusieurs milliers d'heures depuis octobre dernier. Pour Martine Micoud, actrice et responsable de l'atelier couture, « la préparation du spectacle est comme le rassemblement d'une grande famille. Nous adorons être ensemble. Et depuis 1989 qu'existent les Historiales, nous avons toujours le même élan. Chaque année, nous donnons envie aux spectateurs de nous rejoindre comme nouveaux participants. Le but est que chacun amène ses compétences ». Sans faiblir au fil des saisons, la motivation des bénévoles a même pris cette année une nouvelle dimension, en raison du thème du spectacle. C'est ce qu'a constaté Serge Revel. « Tout le monde a été touché par la guerre de 1914-1918. Le souvenir de cette période est encore proche et reste dans la mémoire collective ».
Isabelle Brenguier

Légende photo blessé (crédit photo : les Historiales) : Les Historiales de Pressins mettent en scène l'histoire de quatre frères d'un village du Dauphiné qui ont vécu la guerre de 1914-1918.


Légende photo repet armée (crédit photo : les Historiales) : La préparation de ce son et lumière historique a mobilisé plus de 200 bénévoles du canton de Pont-de-Beauvoisin et de ses environs.


Légende photo transport blessé (crédit photo : les Historiales) : Les acteurs se retrouvent tous les samedis après-midi sur le site pour répéter le spectacle des frères Joseph.�


Légende photo décor (crédit photo : les Historiales) : Le spectacle des frères Joseph a nécessité la mise en place de deux scènes distinctes : le front et le village.


En bref

Les Historiales

Le festival historique des Historiales de Pressins, dans le canton de Pont-de-Beauvoisin, se déroule chaque année, depuis 1989, au cours de la deuxième quinzaine du mois de juillet. Un nouveau spectacle est proposé tous les deux ans. Celui des " frères Joseph ", proposé pour la première fois cette année, inaugure le début d'un cycle sur la guerre de 1914-1918, en vue du centenaire de la " Grande guerre " qui aura lieu l'année prochaine.
I.B.

Informations pratiques

Les " frères Joseph" du 17 au 27 juillet 2013, à Pressins.
Durée : 1h30. Accès au site : de 21h à 21h45. Début du spectacle : 22h.
Prix des places : adultes : 17 euros ; moins de 18 ans : 10 euros.
Réservations sur le site Internet des Historiales : www.leshistoriales.fr ; à la maison du tourisme de Pont-de-Beauvoisin, sur place les soirs de spectacle, à partir de 20h.
Chaque soir à partir de 19h00, le repas du poilu peut être pris dans la cour de l'école. Au menu : soupe du poilu, fromage blanc ou sec, gâteau de riz. Pas de réservation.
I.B.

Encadré valorisé
Témoignage / Bernadette Bonhomme, institutrice à la retraite, partage les souvenirs de la grande guerre qu’elle a pu glaner au sein de sa famille.

La vie rurale pendant la première guerre

Bernadette Bonhomme, institutrice à la retraite, aujourd’hui âgée de 76 ans, vit à Saint-Albin-de-Vaulserre, dans le canton de Pont-de-Beauvoisin. A l’aide des lettres que son grand-père, Louis Bernard écrivait depuis les tranchées, des témoignages de son père, Louis-Henry Bernard, et de ses tantes, Henriette et Georgette Bernard, elle a pu reconstituer le quotidien de sa famille pendant la guerre de 1914-1918, compilé dans un livre édité à compte d'auteur.
Une vie très dure
Veuf (sa femme était morte en couches), père de deux petites filles, Henriette et Georgette, nées en 1900 et en 1902, et d’un petit garçon, Louis-Henry, né en 1910, Louis Bernard, paysan en Bourgogne, n’était pas obligé de partir au front. Mais, pour lui, c’était un devoir dont il ne pouvait s’affranchir. Ses filles, alors âgées de 14 et 12 ans, ont donc dû s’occuper de la ferme et accomplir l’ensemble des travaux agricoles. « Elles devaient traire les vaches, sarcler, battre le blé, faire les foins, s’occuper de la vigne, faire macérer les fruits, faire le vin, s’occuper des repas et de bien d’autres tâches encore. Il n’y avait que le dimanche après-midi durant lequel elles avaient le droit de broder. Mais, en aucun cas, elles ne pouvaient rester sans rien faire. C’était une vie très dure », raconte Bernadette Bonhomme. Comme il n’y avait plus d’hommes dans les campagnes (entre 18 et 48 ans, ils partaient au front), les femmes et les enfants étaient parfois aidés par les personnes âgées. Mais, à l’époque, ces dernières ne vivaient pas très longtemps, rarement au-delà de 60 ans et étaient déjà très usées. Du front, par courrier, les hommes indiquaient les travaux à accomplir et suivaient les rendements. Les courriers étaient nombreux mais censurés par l’armée. Ils ne pouvaient pas mentionner leurs souffrances physiques et psychologiques de la guerre.
Peu d’argent
Dans les campagnes, la population vivait en autarcie. « On cultivait le jardin pour avoir des légumes et on élevait les lapins, les poules qui fournissaient les �"ufs, les cochons. On buvait le vin qu’on produisait, souvent de la « piquette ». Le pain était fabriqué tous les 15 jours. A la fin, il était dur comme du bois, mais mangé quand même. Il n’y avait que les sabots qui étaient achetés. De toute façon, il n’y avait pas beaucoup d’argent », explique Bernadette Bonhomme. Toutes les générations vivaient dans la même maison. Bien évidemment, il n’y avait ni l’eau, ni l’électricité. Il fallait aller puiser l’eau dans le puits et promener l’unique lampe dans toute la maison. Pour chauffer l’intérieur des maisons et faire cuire les aliments, il y avait une cheminée dans pièce commune, mais c’était la seule pièce chauffée. C’était une vie très spartiate.
I.B.


Légende photo poilus (crédit photo : les Historiales) : Veuf, père de deux petites filles et d'un petit garçon, Louis Bernard, paysan en Bourgogne, n'était pas obligé de partir au front.