Services municipaux en sabots

Au début, Jean-Paul s'est montré plutôt sceptique : il n'arrivait pas à « voir le cheval dans la ville ». Mais un petit voyage d'étude à Perpignan a rapidement convaincu l'élu et ses collègues de l'intérêt d'une telle initiative. Et c'est ainsi que, depuis 2009, les enfants de Vendargues, une petite commune de l'Hérault, vont à l'école en carriole et les agents de la commune collectent les déchets à l'aide d'une benne tirée par des chevaux de trait, lesquels assurent également l'arrosage des espaces verts et le nettoyage des rues. La démarche des élus n'a rien de folklorique. « Chez nous, le développement de l'hippomobilité correspond à une volonté politique : ça s'inscrit dans le cadre de notre plan d'action Agenda 21 », explique l'adjoint Max Rascalou. Une volonté politique qui explique que les deux élus aient fait le déplacement en Isère pour assister aux démonstrations de véhicules adaptés au travail dans les collectivités.
Organisée par le réseau Rhône-Alpes de traction animale, l'après-midi a vu défiler de puissants chevaux tirant balayeuse, benne-trieuse, système d'arrosage et autres attelages adaptés au transport de personnes, handicapées ou non. Dominique Gallien, d'Atout Trait, une petite entreprise de Sassenage, spécialisée dans le loisir attelé et les prestations de type débardage, entretien d'espaces verts et de rivières, est venu avec ses deux juments pour « montrer tout ce qu'on peut faire en traction animale ». Maniant son équipage avec douceur et doigté, le meneur avance, recule et se positionne au millimètre près, comme s'il était au volant d'une Twingo avec direction assistée. Impressionnant. Quand on l'interroge sur les mérites de la traction animale, Dominique est intarissable. Mais il constate aussi la frilosité de certains élus : « Il ne faut pas désespérer, mais on a l'impression qu'ils ont un peu peur quand on leur parle de travail à cheval... »
Alternative au moteur
Pourtant, quand il existe, le service est très apprécié par la population. Et parfois plus efficace qu'un engin mécanique et motorisé. « L'an dernier, nous avons collecté les déchets dans le parc de la Villeneuve, à Grenoble, raconte Dominique, qui a réalisé la prestation pour le compte d'H2C Services. Ça a créé du lien social. Les habitants ont même profité de l'occasion pour démontrer que, vu la configuration du site, la collecte à cheval était parfaitement adaptée et permettait d'éviter le réaménagement du parc, non conçu pour laisser passer de gros camions-bennes. » Autre intérêt : l'investissement personnel des habitants qui « attendent » le passage des chevaux et, de fait, se montrent plus rigoureux dans leur façon de trier. Quand les déchets sont collectés à l'aide de la traction animale, les agents remarquent en effet que le volume de collecte augmente, que la qualité du tri est meilleure... et que leur rôle s'en trouve revalorisé « Ce type de prestation revient un peu plus cher à la commune, notamment pour le transport scolaire, mais au niveau des nuisances sonores, les sabots des chevaux sont bien plus appréciés que le bruit d'un moteur », fait remarquer Jean-Paul Finart, adjoint au maire de Vendargues. D'où la pertinence de ce type d'intervention au cœur des villages, en site touristique, dans les centres historiques ou les zones piétonnes, mais aussi dans les parcs ou les espaces sensibles où la motorisation n'est pas possible.
Quant au bilan carbone du cheval, il est imbattable. En France, près de 250 communes et intercommunalités recourent à la traction animale pour de la police montée, du transport ou du portage, de la tonte, de la fauche tardive, l'entretien des espaces verts ou l'arrosage. « L'impact environnemental du cheval est très faible : il n'y a pas d'émission. Juste une pelle et un sac à crottin qui permet ensuite d'amender les plates-bandes », sourit Hervé Champomier, d'H2C Services. Sans compter le rôle apaisant de l'attelage sur la circulation automobile : loin de s'énerver, les conducteurs ralentissent pour adopter son rythme.