Télé Grenoble organise le débat

Le débat a été courtois, mais les positions souvent fermes ou tranchées. Il n'en pouvait être autrement dans l'émission de Télé Grenoble consacrée aux élections à la chambre d'agriculture avec les trois têtes de listes agricoles en présence.
Christophe Revil, le journaliste de Télé Grenoble animateur de la rencontre, a amené les représentants agricoles, Jérôme Crozat pour la liste FDSEA-JA, Maud Charat pour la Confédération paysanne (Conf') et Thierry Boiron, pour la Coordination rurale (CR) à échanger sur plusieurs grands thèmes.
Le défi écologique et l'utilisation des produits phytosanitaires.
Jérôme Crozat rappelle que la profession agricole travaille depuis 30 ans à faire évoluer le recours aux produits de traitement en collaboration avec la recherche et les fabricants, et que la volonté de diminuer les doses n'est pas nouvelle. « Les agriculteurs ont pris part à la formation nécessaire », et il indique que « la profession veut dans les mois qui arrivent mettre en place une charte de bon voisinage pour expliquer et rassurer ». Ce point lui paraît important alors que les nuciculteurs qui épandent de l'argile fine sur les noix sont l'objet d'attaques de voisins belliqueux sans raison, sauf celle de l'ignorance des pratiques.
Maud Charat est plus catégorique et affirme la volonté de la Conf' d'abandonner les produits phytosanitaires, « mais il faut accompagner les producteurs qui veulent s'en sortir ».
Thierry Boiron, comme ses deux collègues, ne soutient pas le recours aux phytos, mais dénonce le décalage avec les pays concurrents qui exportent en France des produits traités avec des substances interdites dans l'Hexagone.
La France peut-elle conserver une agriculture puissante ?
La divergence est nette entre les différents syndicats. « Je ne suis pas pour le libre échange, confirme Maud Charat, tout le système agricole est à reconstruire ». Pour elle, le jeu des exportations et des importations « n'engraisse que l'agro-industrie », pas les producteurs.
A l'inverse, Jérôme Crozat reste favorable aux échanges mondiaux mais pas pour faire entrer de la viande hormonée. Car le principe de réalisme est sous-jacent : « que faire de notre champagne et notre cognac ? », cite-t-il en exemple. Mais il dit « déchanter un peu face à des multinationales comme Danone qui ont étudié de près le futur marché des consommateurs et qui implante sur place des usines de productions et de transformation (...). Le contrat gagnant-gagnant avec les industries agroalimentaire est rompu ».
Thierry Boiron attaque sans pitié « une Pac négociée en 1992 alors que les pays membres de l'UE étaient bien moindre et que l'euro n'existait pas ».
Le bien-être animal, les vegan
« S'ils ne veulent pas manger de la viande, c'est leur problème » estiment Jérôme Crozat et Thierry Boiron. Mais ce dernier, comme Maud Charat, serait aussi pour des abattoirs de proximité, même de grande proximité, la Conf' prônant les abattoirs à la ferme. Jérôme Crozat ramène quand même l'accent sur l'économie : « s'il veut tout ça, le consommateur devra payer plus cher son alimentation ».
L'installation
« Il faut favoriser les petites structures et la maîtrise des quantités produites, pour arriver à installer des agriculteurs », estime Maud Charat. Thierry Boiron demande un soutien pendant 5 à 10 ans après l'installation, mais des prix également d'un niveau supérieur à celui des cours mondiaux actuels. Jérôme Crozat estime que la loi Alur a permis de récupérer des milliers d'hectares pour l'agriculture, mais il faut une implication des professionnels auprès de toutes les communes ou intercommunalités pour gérer la question foncière. Des prix de productions à la hauteur sont également importants pour installer. Pour les installations en bio, il considère que le soutien à la conversion est nécessaire, pas celui du maintien, les exploitations devant s'appuyer sur le marché pour fonctionner.
Le loup
Belle unanimité de l'ensemble des syndicats. Globalement, il est incompatible avec le métier d'éleveur et doit être régulé de manière plus sévère qu'aujourd'hui.
Jean-Marc Emprin