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Méthanisation à la ferme

Transformer le fumier en chaleur... et en valeur

A Chéméré (Loire atlantique), Gérard Guilbaud a joué la carte de l'autonomie énergétique en construisant sa propre unité de méthanisation. Mais son fonctionnement est collectif.
Transformer le fumier en chaleur... et en valeur

La méthanisation, il y pensait depuis longtemps. Gérard Guilbaud, éleveur de volailles et de blondes d'Aquitaine à Chéméré (Loire atlantique), imagine d'abord de se lancer dans un projet collectif. Mais l'entreprise s'avère trop compliquée pour aboutir rapidement. L'agriculteur décide donc de faire cavalier seul en créant sa propre installation : une unité de méthanisation en voie sèche discontinue. Mise en service en novembre 2013, l'unité traite aujourd'hui 2 700 tonnes de substrat majoritairement agricole (fumier de bovins, de volailles et de porcs, menues pailles et déchets verts), apporté par l'éleveur et cinq de ses voisins. « C'est projet individuel dans l'investissement, mais collectif dans le fonctionnement : mes collègues apportent du fumier et reprennent du digestat. Chaque agriculteur reprend tonnage pour tonnage. »

Comme une panse

Pour faire simple, la méthanisation consiste à reproduire une digestion animale pour produire du biogaz et une sorte de compost amélioré appelé digestat. Il s'agit donc de traiter la biomasse humide par l'action de bactéries en l'absence d'air (anaérobie) et en milieu tiède. Un peu comme dans la panse d'une vache. Il existe deux types de techniques (procédé continu ou discontinu) et deux types de gisements (liquides et pâteux ou déchets solides) qui déterminent chacun un type de traitement : voie liquide ou voie sèche. Adaptée aux gisements dont la teneur en matière sèche est supérieure à 20%, la voie sèche discontinue pour laquelle a opté Gérard Guilbaud se compose de plusieurs digesteurs en béton dans lesquels les déchets, traités par lots, subissent une digestion anaérobie qui produit du biogaz et du digestat solide. Concrètement, le fumier solide et les déchets verts sont entreposés dans un garage où, sous l'action de la chaleur générée par un plancher chauffant et l'effet de la macération, ils produisent du biogaz. Celui-ci est brûlé dans un moteur de 55 kW, qui produit de l'électricité et de la chaleur. La première est vendue à EDF (35 000 kW/mois revendus entre 15 et 20 centimes du kW), la seconde chauffe de l'eau qui alimente le circuit de la maison d'habitation ainsi que deux poulaillers de 800 m2. Quant au digestat, il est épandu dans les champs.

D'un coût total de 700 000 euros, ce projet pilote de méthanisation à la ferme a bénéficié du soutien du conseil régional des pays de la Loire et de l'Ademe, qui en a financé près de la moitié (288 000 euros). Il permet aujourd'hui à l'éleveur d'assurer son autonomie énergétique et d'économiser 10 à 15 000 euros par an sur sa facture de chauffage.

MB

 

Aoste Bio Energie sur la bonne voie

A Aoste, les agriculteurs se sont constitués en association pour accompagner le projet d'unité de méthanisation porté par GEG en partenariat avec le groupe Jambon d'Aoste. A terme, cette unité permettra d'alimenter en chaleur l'usine de charcuterie industrielle et d'injecter de l'électricité « verte » dans le réseau de la commune grâce à la production d'une cogénération de 1,2 MWh, alimentée par le biogaz produit. Si le process du projet d'Aoste n'est pas définitivement arrêté (le projet d'Aoste, basé sur des intrants avec un taux de matière sèche autour de 20%, est compatible avec la voie liquide comme avec la voie sèche), il semble que les agriculteurs préfèrent opter pour la voie sèche, notamment parce que le volume de disgestat est divisé par deux et l'épandage simplifié. D'autant que, à montant d'investissement comparable, la rentabilité de la "voie liquide" s'est récemment trouvée dégradée du fait de la nouvelle règlementation européenne qui impose d'hygiéniser tout le gisement (y compris le gisement agricole) dès qu'il y a présence de déchets agro-alimentaires, ce qui était le cas dans le projet initial qui traitait les déchets de l'usine d'Aoste. Reste maintenant à affiner les tonnages et la saisonnalité des gisements, mais aussi à s'assurer de la pérennité des gisements secs autour d'Aoste... Des groupes de travail (éleveurs et céréalisers) se sont constitués qui ont commencé à plancher sur le sujet la semaine dernière.
MB