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Aménagement

Trièves : les riverains se mettent en route

Une quarantaine d'exploitations agricoles sont concernées par l'aménagement de la RD 1075 dans le Trièves. L'heure est à la concertation et à la recherche de solutions les moins problématiques possibles.
Trièves : les riverains se mettent en route

« On respire un peu mieux », reconnaît un des agriculteurs concernés par le projet d'aménagement de la RD 1075 dans le Trièves.

A l'issue de la concertation publique, l'heure est à la concertation avec la profession agricole afin de limiter les impacts et d'aborder la question de la compensation.

Après les premières réunions à Roissard et Clelles, le dialogue est ouvert, constructif, car la plupart des riverains reconnaît l'intérêt du projet.

Entre le col du Fau et celui de la Croix-Haute, les 32 km de la RD 1075, ex-RN 75, sont empruntés en moyenne par 7 000 automobilistes par jour, voire 14 000 en haute saison, dont 10% de poids lourds.

« Les infrastructures sont une cause aggravante »

L'axe est structurant, alternative Nord-Sud à l'autoroute A7. Seulement voilà, après le col du Fau, l'autoroute A51 s'arrête et n'est pas prête à repartir, l'Etat ayant reporté le projet sine die.

Las, le Département a pris les choses en main, et décidé d'investir 57 millions d'euros pour sécuriser et aménager cet axe.

Il est ainsi prévu de modifier 18 carrefours, de créer 11 créneaux de dépassement, de rectifier un virage et d'installer des passages dédiés aux piétons et aux cyclistes, soit une trentaine d'opérations pour améliorer la sécurité de la route utilisée tant pour la desserte locale que pour le transit.

En dix ans, 155 accidents se sont produits sur cette portion de route  « et les infrastructures sont une cause aggravante », précise Marc Roux, chef du service Etudes, stratégie et investissement à la direction des mobilités du Département de l'Isère.

Eviter une ferme

La chambre d'agriculture de l'Isère a été missionnée pour réaliser une étude d'impact, recueillir la position des exploitants agricoles et proposer des suggestions au Département.

Elle mène également une concertation avec les acteurs forestiers, l'ONF et le CRPF, jusqu'en avril 2019.

Postulat de base : il n'y aura pas d'interdiction  de circulation des engins agricoles ou forestiers.Les aménagements ne doivent pas être une entrave aux travaux agricoles ou forestiers.

Une quarantaine d'exploitations sont concernées par le reprofilage de la route et la consommation foncière agricole est estimée à 8 hectares.

« L'objectif du Département est de trouver des compensations foncières plutôt que de verser des indemnités d'éviction. Mais d'abord, nous devons rechercher des solutions qui pénalisent le moins possible les exploitations », insiste Marc Roux.

« Des terres, il n'y en a pas »

Dans le sens Grenoble-Sisteron, le premier chantier est un cas d'école car il prévoit la rectification de la courbe au niveau de la ferme Farceyre ou ferme du Virage à Roissard.

Aujourd'hui, la route traverse les bâtiments de l'exploitation.

Le nouveau tracé prévoit un passage en-dessous du corps de ferme.

« Au début, nous étions plutôt contre », reconnaît Solène Vacher, en Gaec avec sa mère à la ferme du Virage.

Habituées à la route, à laquelle la maison tourne le dos, elles font valoir que le projet « chamboule tout » du fonctionnement de l'exploitation.

Elles ont ainsi demandé à ce que la route épouse au plus près le tracé de la voie ferrée en contrebas, afin de réduire au maximum le morcellement parcellaire.

Comme de nombreux agriculteurs, elles attendent surtout des compensations foncières, « mais des terres, il n'y en a pas ». 

Reprendre les délaissés

Cette première opération, présentée en réunion le 5 mars dernier, pose aussi toutes les questions afférentes à ce type de chantier.

Dans le Trièves, les agriculteurs sont en effet très sensibles aux délaissés, ces bouts de routes abandonnés lors du dernier reprofilage des années 70 et qui ponctuent la RD 1075.

Il y en aurait environ 50 hectares sur les 32 km.

Beaucoup sont aménagés en aire de repos, encore plus nombreux sont ceux devenus des dépotoirs. « Nous n'avons pas prévu de laisser d'enrobés sur les bouts de route délaissés », tient à rassurer Marc Roux.

Lors de la réunion à Clelles, il a encore insisté sur la restitution « à la nature des anciens et des nouveaux bouts de route ».

Quant aux aires de repos résiduelles, un travail est  engagé avec la communauté de communes afin de les limiter et d'aménager celles qui restent en cohérence avec la politique touristique.

Compensation foncière

Ce qui bouleverse le plus le fonctionnement des exploitations, est la création ou la modification de la vingtaine de carrefours, afin de sécuriser les entrées et sorties sur la départementale.

Pour l'aménageur, il convient de créer des carrefours à plat, avec des accès perpendiculaires et sécurisés, le plus souvent par des îlots de tourne-à-gauche plutôt que des zébras que les automobilistes ne respectent pas.

 

Des îlots remplaceront les zébras dans les carrefours.

 

L'impact sur le foncier est de trois ordres : empiètement, création de voies d'accès et possible isolement de parcelles.

D'où l'important travail de concertation avec le monde agricole, chaque accès de parcelle étant réfléchi, de même que la possibilité d'échange de terres.

Un chemin dévié, c'est un tracteur ou une moissonneuse qui ne passe plus, c'est une parcelle coupée de la route et de la voie ferrée ou de son passage sous les infrastructures.

Le Département doit passer une convention avec la Safer pour porter la question de la compensation foncière, qu'il s'agisse des anciennes friches agricoles récemment inventoriées ou du retour des délaissés à l'agriculture après décroûtage et revégétalisation.

Trouver des solutions

Lors des deux premières réunions, à Roissard et à Clelles, les agriculteurs ont répondu présents afin de réfléchir ensemble, cartes à l'appui, aux alternatives à proposer au Département.

Ainsi, à Longefonds, les exploitants ont demandé le rétablissement de l'accès initialement supprimé dans l'étude et de reculer le départ du créneau de dépassement.

A Clelles, la mairie a suggéré de transformer un délaissé en déchetterie pour les artisans.

 

A Clelles, les agriculteurs étudient, cartes à l'appui, les solutions les moins problématiques pour l'exploitation de leurs parcelles.

 

En outre, les projets de réaménagement prévoient la création ou le renforcement d'une douzaine d'ouvrages de franchissement dédiés aux modes doux (piétons, cycles, chevaux).

« Rien n'est figé »

A l'issue de cette période de concertation agricole, une restitution sera faite au Département avec les propositions de la profession, assorties du calcul des emprises parcellaires, des impacts sur les cheminements, de l'identification des risques de parcelles isolées, de l'évaluation des indemnités d'éviction individuelles.

« Rien n'est figé et la chambre d'agriculture fera tout remonter pour trouver des solutions », a déclaré André Coppard, vice-président de la chambre d'agriculture en charge de l'aménagement.

Les travaux sur la RD 1075 pourront être engagés dès 2020 après l'enquête d'utilité publique.

D'ici là, le Département pourra procéder à des opération anticipées car non soumises à la procédure de déclaration : sécurisation de certains carrefours et rabotage de la bosse de Saint-Michel-les-Portes.

A raison de cinq à six opérations par an et quelques alternats de circulation, les travaux pourraient durer cinq à six ans, voire plus longtemps en fonction du rythme des opérations.

Isabelle Doucet

 

Calendrier

Les trois autres réunions de concertation agricole seront  :
- Le 19 mars, après-midi, pour les secteur de Lalley et Saint-Maurice.
- Le 20 mars après-midi, pour les secteur de Saint-Michel-les-Portes, Saint-Martin-de-Clelles.
- Le 25 mars, matin, pour les secteur du Percy et du Monestier-du-Percy.
Echéancier :
- Courant 2019 : traitement des premières opérations anticipées.
- 2019-2020 : enquête d'utilité publique et enquête parcellaire.
- 2020 : déclaration d'utilité publique.
- Fin 2020 : engagement des travaux.
- Horizon 2030 : Finalisation de l'ensemble des aménagements.