Une adaptation volontaire et continue

Pas d'annonce évidemment pour la dernière session de la chambre d'agriculture de la mandature 2013/2018. Mais un bilan tout en nuance de la part de l'ensemble des responsables de pôle. « La finalité de notre mandat était de développer l'agriculture qui se renouvelle, de l'aider à capter la valeur ajoutée, permettant d'améliorer le revenu des agriculteurs, rappelle Jean-Claude Darlet, président de l'organisme consulaire. L'idée était aussi de remettre l'économie au centre des enjeux agricoles, pour que ce secteur soit présent et reconnu dans l'ensemble du territoire, en prenant en compte les enjeux de société. » « Nous avons été fidèles à cette ligne de conduite », estime le président de la chambre, même s'il reconnaît que cela n'a pas été facile « car il y a eu un passage où l'économie agricole a été malmenée. Mais on a fait le maximum pour accompagner les agriculteurs ». Du coup, « les revenus des agriculteurs ont légèrement augmenté, mais il était difficile de partir de plus bas », reconnaît-t-il.
Recalibrage
Durant cette mandature, la chambre d'agriculture a subi un sérieux remaniement interne sous l'impulsion de la nouvelle équipe. « Il y avait un déficit de 600 000 euros auquel s'ajoutait un gel de différents financements, rappelle le président. Nous avions des marges de progrès. Au final, l'institution est revenue à l'équilibre budgétaire, voire légèrement excédentaire ».
« Il y a eu un recalibrage de l'encadrement de la chambre et une optimisation des fonctions support par mutualisation ou définition de meilleures fonctionnalités, décrit Pascal Denolly, 1er vice-président. Notre objectif était de revenir dans le domaine technique, d'être plus fort dans les filières avec une présence accrue de collaborateurs auprès des agriculteurs. Nous sommes arrivés à une restructuration sans heurts, avec un accompagnement humain. C'était important mais nous avons encore du chemin à faire pour ramener de la valeur ajoutée dans les exploitations. » Cette plus grande présence technique a été favorisée par la création de deux équipes interdépartementales, l'une en élevage, l'autre en production végétale, qui permettent une meilleure synergie et une bonne utilisation des compétences, rappelle Jean-Claude Darlet.
Rapprochement
Pascal Denolly, responsable du comité d'orientation Economie et services aux exploitations, en rappelle les grandes lignes impulsées par ce groupe. « Au début, nous proposions beaucoup de prestations, mais sur une étagère mal rangée, image-t-il. Nous avons essayé de remettre un peu d'ordre. Je ne ferai pas d'autosatisfaction, ce n'est pas mon genre. Nous sommes en chemin pour aller dans ce sens. » Parmi les bons points, figurent « le rapprochement des responsables des deux principaux abattoirs du département, Le Fontanil et La Mure, afin que la filière viande soit mieux structurée et réponde aux attentes des agriculteurs ». Un travail également avec l'APFI (1) afin de porter les sujets d'un plus grand éventail de filière. Une réelle présence également dans la filière fruitière, dont la chambre ne s'occupait pas auparavant.
Interconsulaire pour longues filières
Le pôle agro-alimentaire est un dossier important aux yeux du responsable en charge de l'économie. « Nous voulons que cela serve au développement des filières longues. Ce travail n'en est qu'au début. Il est difficile, peu visible car les prises de contact doivent être nombreuses pour faire entrer les acteurs dans la démarche. Il faut affronter beaucoup de préjugés, revenir sur des désillusions vécues par certains auparavant. Nous travaillons avec les deux autres chambres consulaires. Nous n'avons pas les mêmes traditions d'accompagnement. Nos ressortissants n'ont pas de la même taille économique, mais nous devons arriver à nous imbriquer pour gagner ».
Pascal Denolly rappelle également le travail effectué en matière d'agriculture biologique, même si le changement de majorité au niveau régional a créé des tensions dans la filière et des perturbations dans les business plan des exploitations. « Nous accompagnons les agriculteurs dans leurs adaptations à la demande sociétale, nous ne devons pas être à la traîne ».
Accompagner les évolutions sociétales oui, mais si les chambres sont encore des interlocuteurs. Ce point agace Jérôme Crozat, élu chambre et président de la FDSEA de l'Isère. « Il faut travailler sur la communication des agriculteurs pour les soutenir, estime-t-il. Car aujourd'hui, les responsables politiques nationaux reconnaissent peu les organismes intermédiaires. Sous l'influence des réseaux sociaux et de certains médias, on a davantage d'échos des Coquelicots (2) ou des végans que de nous, les socio-professionnels. On décrédibilise des filières entières. Et nous avons le sentiment de ne plus être soutenus. Après l'incendie de l'abattoir de l'Ain, nous n'avons pas été témoin d'une grande compassion de la part du président de la République, ni du ministre de l'Intérieur. Nous faudra-t-il bientôt demander la constitution d'une cellule psychologique pour les enfants des bouchers, ceux du livreur d'aliments ou ceux des éleveurs ? Nous devons réinvestir ce terrain de la communication en soutien aux agriculteurs, pour toutes les filières ». C'est dit.
(1) Association des producteurs fermiers de l'Isère
(2) Association loi 1901 dont l'objectif final est d'interdire totalement l'utilisation de pesticides
Jean-Marc Emprin
Des élevages au cœur des territoires
Didier Villard, en tant que vice-président est intervenu sur la relation agriculture et énergie, notamment en élevage. « C'est une piste obligatoire pour préparer demain, affirme-t-il. L'avis neutre de la chambre est indispensable dans un secteur où les intérêts sont nombreux. Le travail entre OPA(1) est important car il met en commun toutes les entrées possibles pour guider des projets lourds en investissement et en réorientation des exploitations. On entend beaucoup trop de discours en matière d'énergies renouvelables, y compris des politiques. Quand il faut y aller, les techniciens se retrouvent quelquefois un peu seuls. »Convaincu de la citoyenneté de l'agriculteur dans le territoire, Didier Villard estime incontournable l'implication de la profession dans les projets locaux. Il faudra trouver des agriculteurs pour porter ces projets. Mais pour sa part, il annonce son retrait de la vie consulaire.
Thierry Blanchet qui menait le comité inter-territoires (11 associations de secteur) soutient cette idée de présence proche des collectivités. « Il nous faut des partenaires politiques (essentiellement des communautés de communes, ndlr) pour accompagner les initiatives agricoles collectives ou individuelles », confirme-t-il. Douze conventions ont été signées avec des intercommunalités durant la mandature.(1) Organisations professionnelles agricolesJME
Le foncier au cœur des préoccupations
Le foncier a constitué une pierre angulaire du travail consulaire durant les six dernières années. André Coppard menait le travail de la commission adhoc au sein de la chambre d'agriculture. « Les PAEN (1) sont importants dans la protection foncière. Plusieurs ont été suivis. L'équipe de la chambre est restreinte sur cette thématique mais travaille sans relâche », analyse-t-il. La profession doit être sur de nombreux fronts car les occasions de friction entre l'outil de travail des agriculteurs, la terre, et les intérêts d'autres secteurs sont fréquentes. Les carrières ont apporté un gros volume de travail car il a fallu négocier des conventions dans plusieurs secteurs. « Il faut aussi faire vivre ces accords, notamment surveiller la réhabilitation des terres agricoles », confie l'élu de la chambre.L'aménagement foncier est au cœur de nombreux dossiers. A Aoste un projet d'infrastructure routière a entraîné un réaménagement des parcelles. Il n'y a pas eu de remembrement, mais simplement des échanges culturaux. Chacun reste propriétaire de son bien, mais échange des parcelles en culture pour garder un schéma d'organisation de l'exploitation compatible avec les contraintes imposées par l'aménagement.(1) Périmètre de protection et de mise en valeur des espace agricoles et naturels périurbains
JME