Une corvée de bois sereine

La saison des accidents est de retour. Même si, malheureusement, les acteurs forestiers sont régulièrement victimes dans l'année d'accidents dus à l'exploitation forestière, l'automne est propice à une recrudescence des drames en raison d'une affluence importante de personnes en forêt. Tant parce qu'il peut y avoir des promeneurs, des ramasseurs de champignons, mais aussi parce que c'est l'époque idéale pour constituer une réserve de bois de chauffage. C'est pour cette raison que l'Office national des forêts (ONF) vient d'organiser dans le massif des Bonnevaux, à Bossieu exactement, une journée de formation sur l'abattage en sécurité. La commune possède une vaste forêt et le droit d'affouage anime la vie locale pendant la saison froide. Ainsi, plusieurs habitants du village viennent régulièrement abattre des arbres dans un secteur précis et contraint. D'où la nécessité de rappeler un certain nombre de règles de sécurité.
Imprudences
« Le phénomène de groupe est dangereux », estime Bruno Dupart, formateur chevronné de l'ONF. Un constat partagé par la dizaine d'affouagistes présents, chacun reconnaissant que l'esprit de compétition peut faire commettre des imprudences, quelquefois mortelles. Mis à part l'abatteur, personne ne doit se trouver dans le périmètre immédiat de l'arbre indique le formateur, qui préconise « une distance égale à deux fois la hauteur de l'arbre en question » afin de prévenir le risque d'entraînement d'un sujet voisin lors de la chute. Soit loin, soit très près, mais si l'on reste très près, il faut s'éloigner du tronc au moment de son déséquilibre selon un angle de 45 degrés afin d'éviter un coup du tronc qui pourrait se déplacer en arrière si une branche se plante dans le sol et fait reculer sa masse.
Les opérations de sciage doivent être précédées d'un nettoyage des alentours du tronc et de la zone d'atterrisage de l'arbre. On prévient ainsi au maximum les risques de chutes de l'opérateur lors de ses déplacements, mais également les coups de fouet d'arbustes mis en tension. La direction de chute ne doit pas être jugée de loin : cela peut se révéler extrêmement trompeur. Il faut, au contraire, se mettre dos au tronc en regardant la cime. On distingue alors assez nettement la zone la plus lourde du branchage, celle qui indique le penchant naturel.
Entailles
L'entaille du tronc peut être attaquée par le « plancher » ou par « le plafond », ce dernier ayant la préférence de Bruno Dupart, car le trait de scie du bas peut alors venir mourir exactement à la jonction des deux. « Il faut être précis pour pouvoir réaliser une belle charnière, bien nette », précise-t-il.
L'entaille arrière est réalisée à l'horizontale au niveau du bas de l'angle antérieur. Les bûcherons de l'ONF enfoncent un coin lorsqu'elle est suffisamment profonde : cela permet d'éviter de coincer la lame de la tronçonneuse, et de donner le mouvement de déséquilibre au moment opportun.
Les mesures de précaution générales peuvent être complétées par une protection individuelle : chaussures de sécurité, pantalon indéchirable, casque avec visière. La première réaction est souvent de sourire à la vue de cet harnachement.
Mais très vite chacun, lorsqu'il a un peu d'expérience, raconte un accident qui aurait pu être évité : un coup de lame sur la cheville alors que l'on était en basket, un rebond de la machine qui a entaillé un mollet, une bille qui roule et vient écraser un pied... Les anecdotes sont nombreuses et l'on en rit encore, parce qu'elles se sont bien terminées. Celles-là.
En savoir plus :
- Vente de bois aux particuliers par l'ONF, hors affouage.
Jean-Marc Emprin