Vers une Pac plus simplifiée
La Commission européenne a présenté, le 14 mai, les nouvelles mesures de simplification de la politique agricole commune (Pac), notamment sur les règles environnementales.
On peut parler d’une poursuite de l’inflexion de la politique agricole commune (Pac) amorcée en septembre 2023 avec la mise en place du dialogue stratégique et de la poursuite du détricotage du Green Deal. Ces aménagements de la Pac, notamment portés par Raffaele Fitto, vice-président exécutif à la Cohésion et aux réformes et Christophe Hansen, commissaire à l'agriculture, modifient notamment la définition et le système d’éco-conditionnalité des prairies permanentes (BCAE1). Concrètement, les prairies permanentes concerneraient les surfaces non labourées pendant sept ans (contre cinq auparavant). La Commission souhaite tenir compte des systèmes avec de longues rotations agronomiques pour lutter contre les mauvaises herbes. En peu de mots, elle veut éviter que les prairies permanentes soient retournées pour accueillir possiblement d’autres cultures. La Commission propose aussi que les États membres puissent désormais disposer d’un relèvement du seuil de diminution de surface (sur ces prairies permanentes) par rapport à 2018 de 5 à 10 %. La Commission propose également de clarifier l’application de la BCAE 4 qui vise à protéger les cours d’eau contre la pollution et le ruissellement. L’objectif étant de donner aux États membres la possibilité de mieux aligner la définition des cours d'eau sur la définition établie dans la législation nationale. En ce qui concerne la BCAE 2, elle suggère que les paiements par unité de bétail et par ruche soient possibles pour les engagements agroenvironnementaux et climatiques ainsi qu’un paiement spécifique afin de promouvoir le développement des activités des petites exploitations pour améliorer leur compétitivité et leur viabilité. L’aide forfaitaire qui leur est dévolue pourrait être doublée et passer de 1 250 à 2 500 euros par an. Les agriculteurs pourraient obtenir des versements supplémentaires s'ils prennent des mesures vertueuses en matière écologique. A souligner que les exploitations agricoles biologiques devraient être réputées « vertes par défaut ». Par conséquent, elles devraient échapper à de nombreux items de bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE). « Quand une pratique a déjà été définie une fois comme verte, ça n’a pas besoin de l’être deux fois », a expliqué Christophe Hansen.
Rendez-vous en juillet
S’appuyant sur les propositions de la FNSEA et s’inspirant de la loi d’orientation agricole française, la Commission plaide pour un seul contrôle par an maximum, afin de réduire les lourdeurs administratives. Ce contrôle annuel sur site concernerait les demandes d'aides, les demandes de paiement et le respect des règles de la conditionnalité. Si les circonstances devaient le nécessiter, un deuxième contrôle serait alors effectué « pour garantir la protection efficace des intérêts financiers de l'Union », a détaillé la Commission. Dans cette même veine, Bruxelles envisage de fusionner le système d'identification des parcellaires (LPIS) avec l'application géospatiale (GSA) et avec le système de surveillance des surfaces (AMS). Cette simplification de la Pac, qui doit recevoir l’aval des États membres et du Parlement avant d’entrer en vigueur en 2026, devrait donner plus de latitude aux 27 pour amender leurs plans stratégiques nationaux (PSN). Ces propositions devront s’imbriquer avec celles relatives à la réforme de la Pac qui seront présentées en juillet.
Christophe Soulard
Quelques réactions
Les députés européens ont réservé un accueil assez mitigé aux propositions de la Commission. Céline Imart (PPE) a salué un plan qui « apporte une dose de réalisme et de bon sens qui avait disparu depuis trop longtemps des textes européens ». Mais elle s’inquiète d’un éventuel « coup de rabot » du budget dédié à l'agriculture. Au nom du groupe SD (socialistes), Dario Nardella (Italie) a approuvé l’augmentation de la flexibilité pour les États membres, mais « à condition de ne pas en donner trop en réduisant le rôle majeur que doit jouer l’Union européenne. La simplification ne doit pas se faire au détriment de la clause de conditionnalité sociale », a-t-il dit. Gilles Penelle (Patriotes pour l’Europe) y voit une « victoire et une remise en cause des contraintes du Green Deal ». Il a appelé « à totalement réorienter la Pac vers la production et la souveraineté alimentaire et rompre avec idée que la mission première de l’agriculture serait d’entretenir l’environnement ».