Ils sont éleveurs, maraîchers, arboriculteurs, céréaliers... Certains ont de grosses structures, d'autres de toutes petites fermes ; les uns démarrent, les autres ont pris la suite des parents. Autant de profils et de parcours différents qui se retrouvent autour d'une même passion : l'agriculture. Mais pas n'importe quelle agriculture. Pour eux, le métier est synonyme de pratiques agronomiques responsables, conciliant performance économique, respect des écosystèmes et qualité de vie. Serge Desvignes, éleveur à Rochetoirin, a ainsi remplacé l'ensilage de maïs que mangent ses vaches par du méteil, un mélange de céréales bien moins gourmand en intrant, en énergie et en temps de travail. Stéphane Jacquier cultive de l'orge, du blé, du maïs et du colza à Gillonay, comme son père avant lui. Quand il a repris l'exploitation, le jeune agriculteur s'est lancé dans les techniques culturales simplifiées (TCS), une pratique agronomique qui implique de travailler les sols sans en retourner les horizons de façon à retrouver un sol bien vivant, qui résiste mieux à l'érosion. Résultat : les plantes se développent mieux, leurs besoins en eau et en intrants diminuent, et Stéphane, comme son collègue Serge, gagne en temps de travail.

Dynamique agro-écologique

Ces deux exemples illustrent bien la dynamique engagée par de nombreux agriculteurs du département, jeunes ou moins jeunes, soucieux de pratiquer leur métier dans une logique de bon sens. C'est pour faire connaître ces pratiques, parfois innovantes, parfois ancestrales, que les Jeunes Agriculteurs (JA) de l'Isère ont décidé de s'associer à la troisième édition des Vibrations Vertes, un rendez-vous estival qui se pose en agitateur culturel de « territoires peu enclins à la création d'événements artistiques et culturels de par leur situation géographique ou leur caractère un peu insolite ».

Cette année, les Vibrations Vertes ont bien l'intention de mêler culture et agriculture pour faire palpiter le cœur de la station du Pleynet, dans le massif de Belledonne. Pour les JA, il s'agit de proposer au grand public « d'échanger avec les agriculteurs sur leur travail et leur production » afin de « mieux comprendre leur réalité ». Se rejoignant sur l'importance de « communiquer sur les problématiques environnementales » et leurs implications dans les territoires, Exploit'action et les JA ont naturellement choisi l'agro-écologie comme thème pivot de l'édition 2015. Un choix qui fait écho au « projet agro-écologique pour la France » lancé en 2012 par le ministère de l'Agriculture, mais qui correspond aussi à une réalité de terrain puisque de nombreuses pratiques sont déjà en place dans les exploitations iséroises. « Longtemps décriés et accusés de pollueurs, les agriculteurs ont désormais largement intégré la notion de durabilité dans leurs pratiques, rappelle Françoise Soullier, présidente des JA de l'Isère. De nombreuses actions ont été menées en ce sens et ont porté leurs fruits, notamment en ce qui concerne l'amélioration de la ressource en eau. Mais le grand public n'en a pas forcément conscience... »

Attentes de la société

La conférence sur l'agro-écologie qui se tiendra le samedi après-midi sera l'occasion de diffuser pas mal d'informations sur les pratiques actuelles (économies d'eau, réduction du travail du sol, cultures intercalaires mellifères, maîtrise des consommations d'énergie, valorisation des effluents organiques et méthanisation agricole...), et surtout de clarifier les attentes de la société. « A l'heure où l'agriculture vit une profonde mutation, via la ré-appropriation de son environnement tant d'un point de vue social, économique qu'environnemental, le monde agricole assiste à une redéfinition de son rôle qui n'est plus uniquement lié à l'acte de nourrir l'humanité, rappelle Françoise Soullier. Il est certain que l'attente sociétale s'oriente aujourd'hui vers des axes de développement plus sociaux et environnementaux. » D'où l'importance de « démystifier le concept d'agro-écologie » tant auprès des agriculteurs que du grand public. « Si on décompose le terme, il s'agit simplement d'utiliser les logiques agronomiques pour répondre à des impératifs économiques, lance la présidente des JA. Autrement dit de profiter des complémentarités entre agriculture et environnement pour créer une plus-value économique prenant en compte les économies d'intrants, de temps, de passage, mais aussi la juste valorisation du produit. » Le public est-il prêt à vibrer pour une telle approche ?

Marianne Boilève

Créer des ponts entre la culture et l'agriculture

Les vibrations Vertes en pratique